đșđ Ma premiĂšre fois en club : les artistes racontent (ep. 3)
Et rebeÂlote pour les clubs, les voilĂ quâils sont Ă nouÂveau ferÂmĂ©s temÂpoÂraireÂment. Une fois encore, il nous reste touÂjours les souÂvenirs quâon a de ces moments passĂ©s Ă lâinÂtĂ©rieur. Et parÂmi ces souÂvenirs, il y en a un plus mĂ©morable que les autres, câest celui de sa preÂmiĂšre fois. Quâelle soit au Berghain Ă 19 ans pour Cassie RapÂtor, dans une rave alleÂmande Ă 12 ans pour Matthias ZimÂmerÂmann ou dans âun de ces clubs de vacances en bord de mer de mauÂvais goĂ»tâ dans les annĂ©es 80 pour JPYE, la preÂmiĂšre fois est touÂjours une sacrĂ©e hisÂtoire, quâartistes ou perÂsonÂnalÂitĂ©s ont bien voulu nous raconter.
Cassie Raptor : âComme une porte qui sâouvre vers un autre monde.â
Ma preÂmiĂšre vraie fois en club, jâavais 19 ans et câĂ©Âtait au Berghain. Avant ça, jâavais dĂ» passÂer ma tĂȘte deux ou trois fois en club, mais câĂ©tait dans de petites boĂźtes nulles de Nice dont je ne me rapÂpelle mĂȘme pas le nom. Au Berghain, je suis vraiÂment tombĂ©e amoureuse de la techÂno. Avant, je ne conÂnaisÂsais pas ce milieu de la nuit et jâen avais peur, câĂ©tait quelque chose qui Ă©tait pas mal diaÂbolisĂ© dans ma famille parce que je viens dâun petit vilÂlage paumĂ©, on a eu InterÂnet aprĂšs tout le monde. Je suis arrivĂ©e Ă Paris Ă 18 ans, Ă fond dans les Ă©tudes, et câest Ă 19 ans quâune pote mâa dit : « Viens, on se fait un voyÂage de deux semaines Ă Berlin. » Moi jâĂ©tais trop chaude, parce que jâadore lâAllemagne et jâadore lâAllemand. LĂ -bas, je senÂtais quâelle avait un peu la bougeotte et on a fini par aller en club la veille de notre retour. Dans la queue, jâavais vraiÂment peur. Je me disÂais : « Oula, quâest-ce que câest que cette hisÂtoire ! » Jâai rĂ©visĂ© mes trois mots dâallemand pour les redonner Ă lâentrĂ©e, et jâai rĂ©usÂsi, câest passĂ© nickÂel. DĂšs la fouille, je me suis pris une grosse claque, quand jâai vu ces grossÂes colonnes de bĂ©ton. En bas, jâĂ©tais ailleurs, choquĂ©e par lâarchitecture et la maniĂšre dont le son pĂ©nĂ©Âtrait le corps, de la techÂno Ă balle qui rebondisÂsait partout sur les murs. Depuis ce jour, je prĂ©fĂšre jouer dans des lieux clos, en bĂ©ton brut, oĂč tâes lĂ pour en dĂ©coudre avec la musique. Jâai donc passĂ© la soirĂ©e colÂlĂ©e au caisÂson de basse et câĂ©tait ma preÂmiĂšre perche de son. On y est restĂ©es seuleÂment quaÂtre ou cinq heures â ce qui Ă©tait assez frusÂtrant â, juste le temps de cette rĂ©vĂ©laÂtion, avant que ma pote ne vienne me chercher en disÂant : « Allez, on a un avion Ă prenÂdre, on y va. »
Cette soirĂ©e, câĂ©tait beauÂcoup dâinformations dâun coup. Tu vois les gens faire ce quâils veuÂlent. Câest sĂ»r quâil y avait des choses que je nâavais jamais vues ni expĂ©riÂmenÂtĂ©es avant, que ce soit dans la musique mais ausÂsi dans le charÂnel, la libĂ©raÂtion des corps, la sexÂuÂalÂitĂ©. JâauÂrais pu mal le digĂ©rÂer mais comme il y avait une bonne vibe, un respect mutuel, un conÂsenÂteÂment, jâai surtout vu ça comme une porte qui sâouvre vers un autre monde. Ă parÂtir de ce moment-lĂ , jâai vraiÂment comÂmencĂ© Ă sorÂtir en teuf, mĂȘme seule parce que je me senÂtais bien dans cet enviÂronÂnement. Je nây allais pas pour un line-up mais pour sorÂtir et retrouÂver cette ambiance. Dâailleurs, je nâai aucune idĂ©e de qui jouait au Berghain ce soir-lĂ . CâĂ©tait ma pote qui avait tout gĂ©rĂ©, je mâĂ©Âtais laisÂsĂ©e guider et elle a eu raiÂson de me forcer la main, merÂci Ă elle ! Ă lâĂ©poque, jâĂ©coutais surtout du metÂal indus, mais aprĂšs cette soirĂ©e, jâai cherÂchĂ© Ă bossÂer dans la techÂno en devenant DJ, puis en allant au cĆur de la musique en proÂduisant. Bien sĂ»r, ça mâa pris du temps de pouÂvoir conÂsidÂĂ©rÂer ce monde-lĂ comme un vrai plan de vie et dâĂ©panouissement proÂfesÂsionÂnel, mais tout est parÂti de lĂ .
Le track de lâartiste qui symÂbolÂise ce moment :
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Matthias Zimmermann : âAprĂšs cette pause, le premier morceau quâil a mis, câĂ©tait âDa Funkâ.â
Grandir dans la camÂpagne alleÂmande, dans un vilÂlage de moins de 1 000 habiÂtants Ă©loignĂ© dâune heure de voiture de la prochaine ville, ce nâest pas vraiÂment ce qui sâapÂpelle grandir au cĆur de la culÂture nocÂturne. PourÂtant, au milieu des annĂ©es 90, mĂȘme les coins les plus perÂdus dâAlleÂmagne sâĂ©Âtaient pris cette inarÂrĂȘtable vague techÂno et house. LâexÂciÂtaÂtion, le mysÂtĂšre, le dĂ©sir que ce nouÂveau lifestyle offraient, se propageaient partout, y comÂpris en dehors des mĂ©tropÂoÂles. Ă tel point quâun nomÂbre Ă©norme de disÂquaires ouvraient dans des endroits absurÂdes : je me souÂviens quâen 1997, dans la ville de 30 000 habiÂtants dans laqueÂlle je faiÂsais mes Ă©tudes, on avait au moins six disÂquaires, dont quaÂtre spĂ©ÂcialÂisĂ©s en techÂno et house â je vous laisse mĂ©diter sur le ratio. Sans parÂler des raves amaÂteurs dans des lieux farÂfelus qui sont vite devÂenues la priÂorÂitĂ© absolue de tous les apprenÂtis DJs.
En 1995, jâai fait ma preÂmiĂšre âraveâ. Jâavais 12 ans. CâĂ©Âtait dans une clairÂiĂšre. Des potes plus ĂągĂ©s que moi avaient instalÂlĂ© ce qui Ă©tait alors pour moi le sound sysÂtem le plus puisÂsant que je nâavais jamais entenÂdu, du genre Ă faire mourir de peur toute forme de vie alenÂtour. CâĂ©Âtait une soirĂ©e ensoleilÂlĂ©e de la fin de lâĂ©tĂ©. Le DJ qui sâocÂcuÂpait du warm up jouait des trucs varÂiĂ©s qui allaient du trip-hop genre ChemÂiÂcal BrothÂers, de la DnB de Doc Scott, et mĂȘme du rap avec des morceaux dâOlâ Dirty BasÂtard. JâĂ©Âtais fascinĂ© par les vibraÂtions du son qui transperçaient mon corps comme jamais auparÂaÂvant. Mais le vrai choc vint juste aprĂšs, une fois que le DJ suivÂant prit les platines, aprĂšs une pause, crĂ©ant un moment de silence. Ăa ne surÂprendrait plus grand monde aujourÂdâhui, cerÂtains lĂšveront mĂȘme les yeux au ciel, mais ça sâest passĂ© comme ça pour moi et je ne peux rien y changÂer : aprĂšs cette pause, le preÂmier morceau quâil a mis, câĂ©Âtait âDa Funkâ de Daft Punk, et â comme moi â la majoritĂ© des teufeurs qui Ă©taient devant ce sound sysÂtem lâenÂtendaient pour la preÂmiĂšre fois. Ăa a frapÂpĂ© la foule comme un tremÂbleÂment de terre, et on comÂmença Ă observÂer les rĂ©acÂtions de chaÂcun, les yeux Ă©carÂquilÂlĂ©s par la surÂprise. Ăa a tout changĂ© pour moi. AprĂšs 45 minÂutes de set, le DJ se mit Ă jouer sa face B [soit âRollinâ & Scratchinâ â, ndr] et les choses se sont embalÂlĂ©es, comme vous pouÂvez lâimagÂinÂer. Plus tard dans le set, jây ai dĂ©couÂvert le track de Dave Clarke âSouthÂsideâ et celui de Joey BelÂtram âGame Formâ, qui mâont laisÂsĂ© la mĂȘme impresÂsion de stupĂ©faction.
Quand jâai finaleÂment reçu lâalÂbum HomeÂwork le jour de mon quaÂtorzÂiĂšme anniverÂsaire en 1997, je lâai Ă©coutĂ© dans ma chamÂbre au moins trois fois dâafÂfilĂ©e, avec ma mĂšre qui y renÂtrait plusieurs fois, totaleÂment perÂplexe. Les invitĂ©s, dans le salon, sâĂ©Âtaient rĂ©uÂnis pour couper mon gĂąteau, mais aucune chance pour que jây aille, jâavais dâautres choses plus imporÂtantes Ă faire maintenant.
Le track de lâartiste qui symÂbolÂise ce moment :
Roni : âJâai le FOMO alors mĂȘme que je suis dans la soirĂ©e.â
JâĂ©tais dĂ©jĂ allĂ©e de nomÂbreuses fois en club avec ma mĂšre (depuis mes 12 ans Ă vrai dire), mais jamais sans elle. Ce soir-lĂ , je dois ĂȘtre en secÂonde, jâai 16 ans et ça fait quelques temps que jâentends parÂler des soirĂ©es Open House Ă lâElysĂ©e MontÂmartre. Je dis Ă une copine quâon doit absolÂuÂment y aller. Ă lâĂ©poque, je vis en banÂlieue, et je dois prenÂdre le RER Ă minuÂit pour ne pas arrivÂer trop tĂŽt. Anvers, câest lĂ quâon descend. Il va falÂloir passÂer lâĂ©preuve du feu pour pouÂvoir entrÂer. Se donÂner des allures sĂ»res de soi, des allures dâadultes. Je nâai pas pris de piĂšce dâidentitĂ© exprĂšs pour avoir un menÂsonge de moins Ă faire si touteÂfois on me la demande (car je mens trĂšs mal). Je nâauÂrais quâĂ dire âje ne lâai pasâ. Ici, se joue un coup de pokÂer conÂtre la vie. Ă cet Ăąge-lĂ , quand tu tâengages dans la file dâattente, tu joues le tout pour le tout. Si tu te fais recalâ, câest la merde car tu dois attenÂdre dans la rue jusquâĂ 6h du matin et le preÂmier RER. âBonÂsoir, vous ĂȘtes comÂbiÂen ?â Le physio sâappelle Fred, il devienÂdra un ami plus tard, mais en ce moment il a juste lâair dâun gars beauÂcoup trop cool et dĂ©tient sur moi un droit de vie ou de mort. Je retiens ma resÂpiÂraÂtion en rĂ©ponÂdant âdeuxâ. Il nous fait un sourire en coin et nous tend des tickÂets boisÂsons. âMerÂci, bonne soirĂ©eâ. On fait les meufs pas trop surÂprisÂes, on prend nos tickÂets et on entre en se pinçant les lĂšvresâŠ
La piĂšce est Ă©lecÂtrique, il y a des gens de tout Ăąge, des looks de toute sorte, ça clope, ça boit, ça danse, et ça se frotte dans les coins. Je mâenfonce dans la foule, jâai envie dâĂȘtre au cĆur du truc, de trouÂver ma place. Je ne fais que danser sur cette house qui me prend au venÂtre, jâai des talons beauÂcoup trop hauts qui me font mal aux pieds mais je mâen tape. Je danse le sourire aux lĂšvres et la clope au bec. Je souris Ă tous les regards que je croise, et je bois pas mal. Ce que jâadore avec cet endroit, câest la hauÂteur sous plaÂfond et la maniĂšre dont la musique sonne. Ăa vibre super fort, je me sens comme une pousÂsiĂšre faisant parÂtie dâun grand tout oĂč je peux ĂȘtre qui je veux. Chaque secÂonde que je passe Ă me dĂ©placÂer hors du danceÂfloor â pour aller aux toiÂlettes ou au bar â me donne lâimpression de rater quelque chose. Jâai le FOMO alors mĂȘme que je suis dans la soirĂ©e.
On finit en after au Kit Kate le dimanche matin. Ăa dĂ©gueule de monde du sol au plaÂfond. Il est 9h du matin, jâai 16 ans et je suis choquĂ©e. En pleine conÂtemÂplaÂtion, je ne sais pas si ce que je vis est cool ou totaleÂment fou. Câest lâun de ces moments quand tâes jeune oĂč tu te demanÂdes si tu es en danÂger ou si tu peux te laissÂer aller. Je vois un gars sauter par dessus les canapĂ©s qui dĂ©limÂiÂtent lâespace VIP puis prenÂdre lâair norÂmal de celui qui nâa rien fait. Je le regarde sans trop savoir quoi faire. Il me dit : « Ă cette heure-ci, on est tous des sarÂdines grilÂlĂ©es. » Je ne sais pas quelle heure il est, jâai juste oubliĂ© le monde, le temps, je fais lâexpĂ©rience du bonÂheur absolu, celui de lâinstant prĂ©sent. Je me fais tabassÂer la tĂȘte et jâadore ça.
Le track de lâartiste qui symÂbolÂise ce moment :
PotĂ© : âJe voulais juste ĂȘtre dans la foule, devant les subs avec la basse et les vibrations dans ma poitrine.â
Je devais avoir 16 ou 17 ans, câĂ©Âtait vers 2011 donc la dubÂstep Ă©tait vraiÂment le gros truc de lâĂ©poque. CâĂ©tait Ă LonÂdres, au Cable, une salle qui nâexiste plus. Je ne crois pas que jâavais dit Ă mes parÂents oĂč jâallais, je leur ai juste dit que jâĂ©tais avec des amis et ça ne les dĂ©rangeait pas. Mes menÂtors et amis du colÂlecÂtif DubfÂreaks y jouaient ce soir-lĂ . Parce que je nâĂ©tais jamais allĂ© Ă des conÂcerts auparÂaÂvant, cette soirĂ©e Ă©tait la preÂmiĂšre fois oĂč je voyÂais une foule de gens qui dansent et câest vraiÂment la preÂmiĂšre chose qui mâa frapÂpĂ© : lâunitĂ© qui aniÂmait la salle. Quand je sorÂtais au dĂ©but, dans des raves dubÂstep, je ne buvais pas et en y repenÂsant, ça me parait fou, lâidĂ©e dâaller quelque part pour danser seul, de 21h jusquâau dernier track Ă 6h sans une goutte dâalcool, câĂ©tait naĂŻf et en mĂȘme temps telleÂment beau. Si jây allais, câĂ©tait pureÂment pour la musique. Dans la soirĂ©e, jâai entenÂdu des chanÂsons comme « JahoÂva » de Rusko que jâĂ©coutais sur YouTube, ou que je metÂtais chez mes potes durant ce qui avait semÂblĂ© ĂȘtre toute mon adoÂlesÂcence. Dâentendre ces bangers sur un vrai sysÂtĂšme son et de voir les rĂ©acÂtions, câĂ©tait impresÂsionÂnant et ça mâa renÂforÂcĂ© dans lâidĂ©e de devenir DJ ou musiÂcien. CâĂ©tait une expĂ©riÂence telleÂment rafraĂźchissante !
Jâaurais pu ĂȘtre backÂstage avec mon ami mais je nâĂ©tais pas lĂ pour me faire voir, jâĂ©tais juste lĂ pour le son et si jây Ă©tais allĂ© je me serais probÂaÂbleÂment ennuyĂ©. Je voulais juste ĂȘtre dans la foule, devant les subs avec la basse et les vibraÂtions dans ma poitrine. Pour moi, la musique Ă©tait la seule raiÂson dâaller clubÂber, pour reparÂtir avec les oreilles qui sifÂflent. Ă cette soirĂ©e, jâai quand mĂȘme dĂ» croisÂer des types que je conÂnaisÂsais de loin, ou des gens avec qui je disÂcuÂtais en ligne, parce quâil y avait une Ă©norme comÂmuÂnautĂ© de gens de mon Ăąge qui Ă©coutaient et qui proÂduiÂsaient de la dubÂstep pour ensuite la partager en ligne. Le pubÂlic conÂsisÂtait donc prinÂciÂpaleÂment dâadolescents comÂplĂšteÂment fous. CâĂ©tait une pĂ©riÂode assez rebelle pour les gens de ma gĂ©nĂ©raÂtion, sur cette scĂšne. On sâĂ©tait Ă©cartĂ© de la musique quâon Ă©coutait en granÂdisÂsant, prinÂciÂpaleÂment parce quâon satÂuÂrait du rap. Le genre Ă©tait devenu ennuyeux et rĂ©pĂ©tiÂtif dans les thĂšmes, dans les sonoritĂ©s. Ce nouÂveau son, le son dubÂstep, nous a fait accrocher parce quâil ne respecÂtait pas les codes, que cela soit dans la strucÂture, la proÂducÂtion et les sonoritĂ©s : câĂ©tait comÂplĂšteÂment rĂ©volutionnaire.
Le track de lâartiste qui symÂbolÂise ce moment :
JPYE : âCes clubs de vacances en bord de mer de mauvais goĂ»t Ă©taient totalement faciles dâaccĂšs pour les enfants, nous avions environ 15 ans !â
Mon preÂmier club câĂ©Âtait, je crois, en 1987. Je ne me souÂviens pas exacteÂment de quel club il sâagisÂsait mais câĂ©Âtait un de ces clubs de vacances en bord de mer de mauÂvais goĂ»t avec un DJ qui dit souÂvent des bĂȘtisÂes au micro et qui offre des cigÂaÂrettes ou de lâalÂcool en proÂmoÂtion. CâĂ©Âtait soit sur la CĂŽte dâAzur oĂč jâai granÂdi, soit sur la cĂŽte ouest de la France, au nord de La Rochelle. Je garde de trĂšs bons souÂvenirs de ces clubs. AujourÂdâhui, la culÂture des clubs est boudĂ©e par les milÂlenÂniÂals et la pluÂpart dâenÂtre eux la conÂsidÂĂšrent comme âhas beenâ depuis lâinÂvenÂtion des appliÂcaÂtions de renÂconÂtre, mais conÂtraireÂment Ă la croyÂance popÂuÂlaire, ces clubs ne serÂvaient pas uniqueÂment Ă flirter. Ce dont je me souÂviens surtout, câest que nous pasÂsions un bon moment, en apprĂ©Âciant la musique et en Ă©tant stuÂpides. La musique Ă©tait vraiÂment enivrante, avec de la pop synÂthĂ©Âtique, de la new wave et la subÂlime dance mainÂstream des annĂ©es 80 que nous nâapÂpeÂlions plus âdisÂcoâ, avec des artistes comme Prince, Michael JackÂson et MadonÂna Ă©videmÂment. Ces clubs Ă©taient totaleÂment faciles dâacÂcĂšs pour les enfants, nous avions envÂiÂron 15 ans ! Pas de file dâatÂtente, le videur ne demandait rien, il disÂait gĂ©nĂ©raleÂment bonÂjour et nous dirigeait vers la caisse pour payÂer les 50 francs qui comÂpreÂnaient une boisÂson diluĂ©e Ă lâeau. Les clubs de Paris Ă©taient totaleÂment difÂfĂ©rents. Quelques annĂ©es plus tard, alors que jâavais envÂiÂron 17 ans, jâai rĂ©usÂsi Ă passÂer devant JenÂny BelâAir, la videuse culte du Palace. On mâa refusĂ© lâenÂtrĂ©e Ă plusieurs reprisÂes, mais ce jour-lĂ , un ami gay la conÂnaisÂsait et je suis entrĂ© avec lui. Iggy Pop Ă©tait lĂ , cela donÂnait un senÂtiÂment de âGimme DanÂgerâ Ă un fan des Stooges comme moi. Ce nâĂ©Âtait plus lâĂąge dâor du club, Guy Cuevas nâĂ©Âtait plus le DJ et lâĂ©pidĂ©mie de SIDA faiÂsait des ravÂages, mais je suis heureux dâavoir conÂnu au moins une fois ce club mythique.
Le track de lâartiste qui symÂbolÂise ce moment :
Sunareht : âĂ partir de lĂ , jâai voulu que mes tracks fassent danser les gens comme jâaurais pu, moi, danser dans ce club.â
Jâai essayĂ© plusieurs fois dâaller au Social Club, parce quâil y avait une lĂ©gende qui disÂait quâon pouÂvait y entrÂer mĂȘme si on nâĂ©tait pas majeur. Jâai donc essayĂ© dây aller entre mes 16 et mes 18 ans et je me suis fait recaler, bien Ă©videmÂment, Ă chaque fois. On avait mĂȘme essayĂ© avec des filles qui nous disÂaient que pour elles, ça marÂchait, mais aucun dâentre nous nâa rĂ©usÂsi. Plus tard, jâĂ©tais en couÂple avec une fille qui Ă©tait un peu plus jeune que moi, jâai donc attenÂdu quâelle soit majeure pour quâon y aille ensemÂble, on avait tous les deux 18 ans. Il y avait cette soirĂ©e qui sâappelait Shake Dat Ass avec KapÂtain CadilÂlac et MarÂvy Da Pimp qui avaient invitĂ© MumÂdance. Ă la base, jây allais parce que je conÂnaisÂsais les morceaux de KapÂtain CadilÂlac, il faiÂsait des trucs un peu booty que jâavais bien kifÂfĂ©s. Moi, jâĂ©coutais surtout des trucs un peu plus expĂ©riÂmenÂtaux en musique Ă©lecÂtronÂique, du style Aphex Twin ; la club music est venue plus tard. Ce soir-lĂ , je me rapÂpelle surtout du set de MumÂdance qui mâa retournĂ©. Je me suis dit : « Wouah, câest qui ce gars, câest trop ouf ! » Jây Ă©tais allĂ© comme si jâalÂlais Ă un conÂcert, mais de voir autant de gens rassemÂblĂ©s par la musique, par la danse, ça mâavait vraiÂment beauÂcoup plu ; lâimÂpact du son sur le corps, lâambiance, la sueur des gensâŠ
On nâest pas parÂtis trop tard car ma copine voulait renÂtrÂer, mais pas moi. On a fini par le faire, mais ça mâavait piquĂ© : jâai vraiÂment suivi MumÂdance de prĂšs et tout ce quâil a fait par la suite, ça mâa ouvert Ă dâautres choses musiÂcaleÂment. CâĂ©tait une soirĂ©e vacheÂment marÂquante. AprĂšs cette preÂmiĂšre fois, jâai comÂmencĂ© Ă aller au Social dĂšs que je le pouÂvais, dâabord avec cette fille avec qui jâĂ©tais Ă lâĂ©poque, puis ensuite seul. Jâai fait une grosse sesÂsion de clubÂbing soliÂtaire entre 2010 et 2012, oĂč jâallais au Social toutes les semaines, tout seul, ausÂsi bien quand je conÂnaisÂsais les artistes que lorsque je ne les conÂnaisÂsais pas. Je savais que si jâallais au Social en semaine, ce serait forÂcĂ©Âment cool et que je dĂ©couÂvriÂrais un truc bien. Je proÂduiÂsais dĂ©jĂ un peu avant ça, mais ces preÂmiĂšres soirĂ©es ont vraiÂment changĂ© lâapÂproche que jâavais de la proÂducÂtion musiÂcale. Cette expĂ©riÂence mâavait donÂnĂ© envie de faire un album-concept alors que je venais Ă peine de mây metÂtre (câĂ©tait vraiÂment pas ouf (rires)). Le fait dâaller en club, ça a renÂdu ma musique⊠plus club, tout simÂpleÂment. Je veux dire quâĂ parÂtir de lĂ , jâai voulu que mes tracks fassent danser les gens comme jâauÂrais pu, moi, danser dans ce club.
Le track de lâartiste qui symÂbolÂise ce moment :