© Alban Gendrot

Plage et techno à moins d’une heure de Paris : on a passé un dimanche à Marvellous Island

Ah la Seine-et-Marne… Pour y avoir gran­di, ce n’est pas tou­jours l’é­clat’. Il y a Dis­ney­land, Val d’Eu­rope, une chou­ette salle de con­cert (File7)… Et c’est à peu près tout. Côté fes­ti­vals, a for­tiori élec­tron­ique, dif­fi­cile de trou­ver son bon­heur vers Marne-la-Vallée. Mais depuis qua­tre ans, une bande d’ir­ré­ductibles Parisiens a pris ses quartiers dans l’un des plus jolis spots du nord du 77 pour y installer le fes­ti­val Mar­vel­lous Island : la base de loisirs de Tor­cy, qui com­prend de grands espaces verts, un lac, une petite forêt et quelques plages de sable blanc. Promis, au moin­dre ray­on de soleil, on se croirait dans le Sud, les gril­lons en moins, l’herbe gorgée de vert en plus. Un lieu où les kids du coin se retrou­vent bien sou­vent en été autour d’un feu de camp, pour piquer une tête sur le lac com­plète­ment lisse, descen­dre quelques bières et griller des chamal­lows. C’est presque en pèleri­nage qu’on y retourne chaque année, dans le cadre un peu par­ti­c­uli­er de Mar­vel­lous Island. La base est mécon­naiss­able. La plage est envahie par une énorme scène extérieure, bardée de pan­neaux lumineux et sur­plom­bée d’une petite butte qui lui donne des allures d’am­phithéâtre naturel. En haut de la côte, quelques stands, dont un tatoueur et un bar (vu le nom­bre de mus­clés tatoués avec un verre à la main, il s’ag­it là des deux prin­ci­pales pas­sions du pub­lic !). De l’autre côté, à la place de l’an­cien hangar détru­it il y a peu, se dresse un énorme igloo bleu marine, sorte de chapiteau nou­velle généra­tion appor­tant l’a­van­tage (non nég­lige­able) de couper du vent. Plus loin, des food-trucks, un micro-scène Des­per­a­dos aux sélec­tions hip-hop ou trap et, tout près de l’en­trée, une Hip­pie Stage dédiée à la trance ou aux sets un poil exo­tiques. Dif­fi­cile avec quelques mots de faire hon­neur à ce cadre rêvé pour une teuf. Mais l’amé­nage­ment, la déco, le paysage et le pub­lic du coin, hyper sym­pa et ouvert, restent les grands atouts de ce festival.

© Alban Gendrot

Alors bien sûr, on n’a pas passé notre dimanche à compter les pâquerettes ou à faire de la bal­ançoire au bord du lac, même si pour une fois le soleil était de la par­ty. Ayant loupé les fes­tiv­ités du same­di soir, retour en ado­les­cence et envie de château de sable ou pas, ça aurait été trop bête de rater les con­certs et DJ-sets pro­posés par Mar­vel­lous Island. Car les gus ont mus­clé leur jeu cette année, invi­tant de gross­es têtes d’af­fiche tech­no pour son hangar-igloo et des noms élec­tro plus doux pour sa plage. Denis Hor­vat par exem­ple, qui sera respon­s­able du pre­mier “Domi­no” d’Ox­ia de la soirée. On n’en a pas relevé d’autres, mais à croire que ce morceau est l’hymne du fes­ti­val : joué plusieurs fois l’an­née dernière, notam­ment par Oxia him­self, le titre aura fait bondir sur ses pieds toute la colline ce week-end, et ce dès les pre­mières notes. Puis Dominik Eul­berg pour un très bon live où il offrira, date française oblige, son remix de “Parade” de Rone en fin de con­cert. Avec le soleil qui faib­lit en toile de fond, il y a de quoi rester rêveur… Jusqu’à ce que Boris Bre­jcha vien­nent pass­er la sec­onde. Mais côté Beach Stage, c’est Stephan Bodzin qui gag­n­era toutes les palmes en cette veille de Pen­tecôte. Déjà invité l’an­née dernière en DJ-set, il présen­tait son dernier live, superbe, onirique et toute­fois dansant. Cer­tains sont allongés dans l’herbe les yeux fer­més, d’autres, sou­vent déguisés, se dandi­nent pen­dant une heure et demie, exul­tent quand arrive son “Ker­beros”.

Stephan Bodzin © Alban Gendrot

Mais la com­mu­nion doit bien vite s’ar­rêter : comme chaque année, Mar­vel­lous Island est obligé de faire taire sa scène extérieure à minu­it pour éviter les nui­sances sonores. A ce pro­pos, kudos au fes­ti­val pour le son 2018, pas trop fort, pas trop faible, pas dérangeant pour une bonne par­tie des com­munes avoisi­nantes comme Lagny-sur-Marne (bien aidée par le vent qui souf­flait dans l’autre sens, certes), par­faite­ment réglé sur toutes les scènes — un acousti­cien s’est même déplacé toute la nuit chez les riverains pour pren­dre des mesures et adapter ses réglages en fonc­tion. Un vrai bon point par rap­port aux années précé­dentes. Mau­vaise nou­velle cela dit : les prix au bar parais­sent tou­jours autant exor­bi­tants, et les toi­lettes sont tou­jours aus­si cracra. On ne peut pas tout avoir.

Un peu per­dus sans sable sous les pieds, pas mal de gens se retrou­vent après minu­it dans le foin de la Hip­pie Stage, his­toire de vari­er les tex­tures de semelle. Et prof­iter de Birds Of Mind : les deux Français con­vo­quent des rythmes trop­i­caux, des sonorités ori­en­tales, un remix de “Sin­ner­man” de Nina Simone (prob­a­ble­ment celui de Felix Da House­cat), “Pick Up” de DJ Koze (extrait de son dernier album Knock Knock)… Tout pour don­ner le sourire sous les signes peace’n’love de la salle, qui com­men­cent à ressem­bler à des bret­zels en cette fin de week-end. C’est presque avec regret qu’il faut aller rejoin­dre les 4/4 tech­no du grand hangar, où Anetha offrira une fin de set en apothéose avant que la grosse tête d’af­fiche Ben Klock prenne le relais et vienne clore, pour ce qu’on en aura vu ce dimanche, une très belle édi­tion. On ne pen­sait pas écrire ça un jour, mais ce week-end, c’est dans le 77 qui fal­lait être. On était plus de 20 000 à le savoir.

 

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