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5 mai 2014

Reptile Youth : “un show réussi doit avoir une part d’imprévu”

par rédaction Tsugi

Auteur d’un dance-punk électrosensible, malin et communicatif, le duo Danois Reptile Youth, que nous avions déjà apprécié sur disque, nous a soufflés en live au Spot Festival. On a eu la chance de les croiser quelques heures avant la déflagration.

Tsugi : Vous jouez dans quelques heures, vous vous mettez la pression avant de monter sur scène ?

Esben : Non, on ne la ressent jamais, ou alors c’est toujours une énergie particulière qui peut être emmagasinée à bon escient. Et ce soir c’est un show assez court, il y a donc moins de raisons de flipper.

Le public du Spot vous est acquis, mais il y a tout de même un paquet de pros qui sont là pour vous voir… Ce n’est pas un peu étrange ?

Mads : Ce soir, ça devrait aller je pense. Hier, nous avons eu l’occasion de jouer pour la soirée d’ouverture du festival, et il n’y avait que des professionnels. C’était dur, parce que tu as beau te démener sur scène, tu vois bien que les gens analysent ce que tu joues plutôt que de se lâcher, et de nous renvoyer un peu de l’énergie qu’on leur donne. Il faut qu’il y ait une sorte de circuit d’énergie pour que ça marche et que tout le monde apprécie. Hier, on avait un peu l’impression d’être une fille dans les bras de son homme, on disait “je t’aime mon amour”, et il répondait “ouais, whatever”. (rires)

Esben : On a déjà joué au Spot l’année dernière dans une plus petite salle, l’ambiance était d’enfer donc ça devrait bien marcher encore ce soir… Mais la salle dans laquelle on joue est immense, du coup on n’est pas encore trop habitués à ça !

Vous avez la réputation de mettre vos tripes sur la table en concert, et c’est ce qui semble stimuler la curiosité des gens ici… Vous avez prévu un show plus intense, du coup ?

Mads : J’aime bien cette expression des “tripes sur la table”, je vais la noter (rires). On ne joue pas longtemps, c’est davantage un long showcase qu’un réel concert. C’est impossible de jouer avec la set-list, de créer des montées et des descentes de pression, on va donc juste y aller crescendo. On va essayer de brûler un bout de papier et voir si la flamme prend, ou au contraire si elle s’éteint. On n’a qu’une seule chance. (le papier a bien cramé, ndlr)

C’est quoi pour vous un show de Reptile Youth réussi ?

Un show dans lequel il se passe quelque hose d’imprévu, de vraiment fou. Un jour on avait été programmé dans un petit festival amateur en Belgique, au bord d’un lac, l’ambiance était chouette mais la scène était assez petite et le plancher était très fin, il bougeait.

Esben : Il a commencé à faire des bonds, ce con ! (rires)

Mads : Bref, ce qui devait arriver arriva, je suis passé à travers le plancher d’un coup, heureusement sans me faire mal. On a tout de même pu finir le concert, et à la fin, je ne sais pas ce qui nous a pris, on s’est dit “allez, on court se baigner”. On est partis de la scène en courant, on a sauté la barrière pour aller se jeter à l’eau. Et une partie du public nous a suivis ! Les gns du festival étaient furieux contre nous d’avoir créé cet incident et d’avoir cassé leur barrière, mais vu qu’ils étaient désolés que la scène ait cédé pendant notre concert, on était quittes.

Vous vous rappelez de vos tout premiers souvenirs musicaux ?

Esben : Je me rappelle très bien de mon père qui écoutait Paul Simon.

Mads : Le mien m’a aussi beaucoup joué de disques lorsque j’étais enfant. Je me rappelle très nettement d’un rassemblement d’amis de mes parents chez moi, j’étais tout jeune et je devais fredonner les paroles d’un disque qui passait sur la platine… Et les gens m’ont félicité, ils m’ont dit que j’avais une belle voix. Avec le recul, ils ont forcément dit ça pour me faire plaisir, mais c’est peut-être à ce moment-là que j’ai du me dire “tiens, je serai musicien quand je serai grand”.

Esben : J’aime bien cette histoire, c’est intéressant de se dire que, peu importe ce qu’ils pensaient, c’est ce qu’ils t’ont dit et la répercussion que ça a eu en toi qui t’a motivé par la suite à progresser. Comme si on avait tous ce genre de verrous en nous qui ne demandent qu’à être cassés…

Mads : En fait, on est pile dans le moment où nous, la génération des enfants de ceux qui ont vécu la période post-68, sommes en mesure de nous exprimer. Quand on était gosses, on a tous grandi dans des environnement familiaux très permissifs, on nous encourageait à tout, et puis la musique prend une place assez importante à l’école ici… Sans compter le moment où tu passes en boarding school étant ado, ce qui te permet d’échanger tes expériences avec des gens de ton âge en prenant tes premières cuites… Bref, notre génération a grandi au bon moment.

Esben : J’ai aussi eu la chance de grandir dans un environnement particulier, j’habitais dans une communauté plus ou moins auto-gérée. Quand je réfléchis à ce que font nos amis autour de nous,  beaucoup d’entre nous ont connu des histoires similaires et la plupart font partie de projets créatifs…

On tiendrait donc la raison du dynamisme de la scène de votre pays depuis quelques temps ?

Sûrement, en tout cas ça joue un rôle important. Mais il n’y a pas que ça. Le Danemark est tout petit, on est 5 millions, il y a cinq ou six grandes villes… Tout le monde échange, se connaît, se prête des musiciens… C’est une idée que j’aime bien : “hey mec, on a besoin d’un bassiste pour un concert ce soir, tu viens jouer avec nous ?”.

Vous vous sentez proches de qui dans cet univers ?

Mads : Nous sommes bien potes avec Rangleklods, que tu connais peut-être. Mais aussi avec Mø, qui assure pas mal en ce moment. On se voit beaucoup et on se file des coups de main quand on peut.

– Lire notre compte-rendu du Spot Festival –

Si je vous dis que votre musique est ludique, ça vous fait plaisir ou vous détestez ?

Mads : Haha, non, en fait c’est un très beau compliment parce que ça n’est pas si facile. Toi qui es journaliste tu dois être d’accord avec nous : on voit quand même plein de groupes de musique très bons mais qui se prennent beaucoup trop au sérieux… ll y a une place pour le fun, et même l’humour, dans notre musique et dans la musique en général, c’est possible sans qu’on soit obligés de tomber dans le comique. Faire de la musique, c’est s’amuser avant tout, non ? C’est important de réussir à garder ça en soi, même lorsqu’on essaie de dépasser le côté “loisir” pour faire des concerts et sortir des albums.

Tourner à l’étranger, c’est une obligation, une envie, une nécessité ?

Mads : En fait, Reptile Youth est pratiquement né à l’étranger. Nous avons joué en Chine à nos débuts, et nous avons été nourris par les différentes expériences que nous avons eu partout où nous avons eu la chance de présenter notre musique. Au Danemark, si tu marches très bien, tu peux sûrement tourner indéfiniment et arriver à manger avec ça. Nous, lorsqu’on joue une série de concerts qui marchent bien chez nous, on préfère aller jouer à l’étranger en perdant l’argent que l’on a gagné à la sueur de notre front. Au moins pour voir d’autres publics et se remettre un peu en danger, tu vois ? C’est impossible de rester créatif si tu te complais dans ton petit cocon.

Quelque chose à dire aux Français qui vous verront au Nuba le 28 juin ?

Esben : Comment tu as dit, déjà ? Ah oui, on va “mettre nos tripes sur la table” (rires). Plus sérieusement, on se sent bien à chaque fois que l’on peut jouer en France, le public est toujours incroyable et puis c’est toujours génial de pouvoir manger des bonnes choses en tournée…

Rivers That Run For A Sea That Is Gone

En concert au Nuba (Paris) le 28 juin et dans toute la France à l’automne

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