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15 décembre 2014

VILLANOVA: « Cet EP, ce n’est pas de la tech-house d’Ibiza »

par rédaction Tsugi

Il y a deux ans, Adrien et Marc-Antoine de Villanova cassaient la baraque avec Mothafunk, leur EP star. Pourtant, ne leur parlez pas trop du passé: ils ont réévalué leurs intentions et évolué depuis. Loin de renier leurs précédentes sorties, ils souhaitent toutefois affirmer avec ce nouvel EP Roomba Rose (My Favorite Robot) leur aptitude à la mélodie dansable, contre tous les clichés de la tech-house dite ‘commerciale’.

Depuis cette couv’ du TSUGI n°56 « Le futur leur appartient » où vous figuriez avec d’autres jeunes musiciens à suivre, que s’est-il passé dans votre vie ? Et je profite d’avoir la photo sous les yeux, pourquoi ces grands décolletés ?

Marco : Je me souviens qu’il y avait un mec qui avait vu la couv’ et qui avait commenté : « C’est toujours les mêmes, ces gens qu’on voit, en plus ils ont toujours le même style ces connards, et lui (en me montrant) il a l’écharpe du Père Noël est une ordure. » (Rires)
Adri : On a tous des têtes incroyables dessus ! Ça c’était en 2012, donc on n’avait pas encore sorti notre deuxième maxi. On fait un EP par an en fait.

Tsugi n°56, octobre 2012, avec Villanova en bas tout à droite.

Vous ne voudriez pas faire plus de sorties ? Vous ne trouvez pas assez de temps pour produire ensemble ?
Marco : Au contraire, on se voit très souvent ! On devrait en faire plus… Mais on a fait plein de remixes entre temps.
Adri : C’est surtout une question de labels. On va dire qu’on est un peu exigeant sur la qualité des labels.
Adri : Par exemple Cocoon pour avoir un titre chez eux ça a mis un an.

C’est une belle porte d’entrée quand même sur Cocoon, ils vont sans doute vous proposer d‘autres choses maintenant.
Adri : Oui, mais ils attendent un EP je pense.
Marco : Et eux ne veulent que des trucs de bangers, ils s’en foutent un peu de ton identité musicale. Ils veulent des morceaux qui cassent le club !
Adri : On est moins dans ce créneau, Roomba Rose c’est plus musical par exemple.

Pourtant toi, Adri, tu as débuté par le mix, tu es donc peut-être plus sensible à cette approche « club » d’un morceau !
Adri : J’ai mixé dans plein d’endroits différents, dans des bars, des restaurants, et dans différents styles, y compris de la musique plus douce. Par exemple à St Barth sur les plages je mixais du dub, du reggae…

Et du coup, comment vous répartissez-vous les rôles au sein de Villanova ? Marco, vu que tu as commencé par le piano, tu es peut-être un peu plus orienté synthés ?

Marco : Non, on fait tous les deux un peu tout tous les deux. Adri m’a appris à mixer !
Adri : Et Marco m’a appris pas mal de trucs sur Ableton.

Donc vous vous êtes bien apportés et vous êtes rôdés tous les deux à présent. Quant à cette petite guéguerre du format, entre vinyle et CD…

Adri : Nous on s’en fout. On mixe sur clef USB.
Marco : Moi, je n’aime pas trop le son du vinyle. Des fois ça craque. (Rires). Je suis allé une fois chez un disquaire, Syncrophone, acheter un vinyle d’une diva disco pour une personne de soixante-dix ans.
Adri : Après, c’est vrai que l’objet est beau. Quand je pars chez mes parents à Marseille c’est toujours agréable de replonger dans leur vieille collection de disques et à chaque fois ça me rappelle des moments, beaucoup moins que quand je scrolle mon iTunes !

Depuis votre premier EP Mothafunk , il a du se passer pas mal de choses dans vos vies musicales pour que vous en arriviez à Roomba Rose ?
Marco : On a fait de superbes salles en France, on a joué dans pas mal de festivals. Aux Trans Musicales, Nördik Impakt…
Adri : On a fait la Techno Parade avec Seb (Agoria, nldr), en 2013. Notre premier Rex, Calvi, Space Ibiza etc…

Vous avez par la même occasion rencontré des personnes qui vous ont beaucoup fait avancer ?
Marco : Surtout Seb !

Et la rencontre avec le label My Favorite Robot, c’est arrivé comment ?

Marco : Tim Paris nous a demandé un remix, ça s’est passé très simplement.

Il y a eu une grosse effervescence autour de vous il y a deux ans et après on vous a un peu moins vu. Ce nouvel EP, vous pensez qu’il va vous remettre sur le devant de la scène ?

Adri : On a fait un truc qui a bien marché, c’est dangereux quand ça va vite parce que ça retombe très vite. On n’a pas voulu faire un « Take You » numéro deux et on s’est un peu posé.
Marco : En fait, Hot Creations nous avait demandé un EP, mais entre temps on a évolué musicalement et on n’avait plus envie de faire ça. On s’est dit que c’était dangereux.
Adri : Même aujourd’hui, des gens nous considèrent comme des mecs qui font de la commerciale, des machines à tubes, accessibles… Alors qu’on se casse le cul pour prouver le contraire. Ce qu’on sort n’a rien à voir, mais on nous colle encore cette étiquette.

Et là vous êtes contents de ce que vous avez fait ?

Adri : Très ! Et je ne sais pas si vous avez écouté le remix qu’on a fait d’Agoria ? Sur My Favorite Robot. On est tellement fiers de ce morceau, il est dans la compil’ que Timo Maas a faite pour le label, et à part des puristes, pas grand-monde ne l’a entendu, ça me rend fou. Je suis déçu qu’il n’ait pas résonné plus fort.
Marco : Le flottement en fait ça a été le premier EP sur My Favorite Robot, notre deuxième EP, c’était de la bonne petite tech-house. Des mecs comme Seth Troxler les jouaient. On découvrait d’autres choses, on ne s’était pas encore trouvé. Là, on s’est davantage trouvé. On a fait des sons plus mélodiques, plus mélo-dramatico….je ne sais pas. Cet EP, ce n’est pas de la tech-house d’Ibiza, c’est de la tech-house sobre.

 

C’est My Favorite Robot qui vous a proposé le featuring avec Flowers and Sea Creatures sur « 5 o’clock in the morning »?

Marco: Non, c’est nous, on leur a envoyé un morceau et puis ça s’est fait comme ça. Ca fait presque un an en fait. Les voix, elles,  n’ont pas changé mais on a refait pas mal les instrus, on était partis sur un morceau style Innervisions mais on a complètement changé depuis.
Adri : On a reçu un beau message dessus d’ailleurs, quelqu’un qui nous a écrit au sujet de ce morceau « J’avais oublié comment la musique pouvait être touchante… ».
Marco : Après la sortie du premier EP, quelqu’un nous avait écrit, nous racontant qu’il était dans sa voiture avec son chien et ses valoches dans son break, et qu’heureusement qu’il avait notre disque dans sa bagnole parce que c’était ce qu’il l’aidait à tenir.
Adri : Oui, c’est bien que ça puisse en toucher certains, parce que dans le milieu, les gens ont tendance à penser efficacité, dancefloor, playlists, charts, tops et nous on n’est pas du tout là-dedans en fait. Le dernier live qu’on a fait au Grand Palais par exemple, c’était complètement intellectuel, on n’aurait peut-être pas du faire ça parce qu’on jouait entre Tale Of Us et Madeon…

Le public était surpris ?

Marco : Oui, ce n’était pas du tout ce à quoi ils s’attendaient.
Adri : Alors que pourtant ça allait super bien dans le lieu. Mais les gens attendaient du Madeon quoi.

Vous avez vu le top RA des Djs de l’année 2014 ? En premier Dixon, en deuxième Tale Of Us, Âme, Seth Troxler, Maceo Plex. C’est plutôt des DJs qui jouent pas mal tech-house d’ailleurs.

Marco : C’est plutôt normal, ils dégagent une aura.
Adri : Il y a Rødhåd quand même qui fait de la techno et qui est dans le top 10 !

Vous auriez mis qui dans le top vous ?

Marco : DJ Koze, Isolée…

Et votre album de l’année ?

Adri : Syro d’Aphex Twin, j’ai bien aimé, j’ai écouté trois frois et à partir de là ça passe très bien.
Marco : Moi j’ai trouvé qu’il n’y avait pas trop d’idées, c’était plutôt un délire de producteur, il n’y a pas trop de musique.

La musique un peu plus conceptuelle comme la sienne, qu’en pensez-vous ?

Marco : Faudrait que le concept dégage des émotions. J’ai découvert Vessels moi, un bon crossover entre du dur et de l’émotion.

Vous avez commencé à préparer un album ? Généralement, on attend beaucoup des producteurs qu’ils fassent ce genre de format long.

Adri: On va continuer à perdre les gens avec nos EPs.
Marco : Oui parce qu’il y a du nazisme de style, c’est –à-dire que les mecs ont un style et ils restent dans ce sillon très étroit, même les labels. Pour ça, je suis assez content de nous. C’est dur aussi d’avoir cette personnalité artistique qui part dans tous les sens, tu ne peux pas dire « je suis ça ». Ce n’est pas le moment pour nous de parler d’album.
Adri : Je ne pense pas que ce serait très cohérent si on faisait un album maintenant. Je pense à notre prochain EP qui va sortir début 2015 sur Rebirth, ça va être plus traditionnel.
Marco : Oui, ça va être beaucoup plus housy, y’aura des morceaux avec une chanteuse hyper jazz, et derrière ça tourne un peu lounge : pour moi c’est house traditionnelle ça. En fait j’aimerai bien avoir la légitimité de faire ce que je veux dans un album. Si j’ai envie de faire un morceau avec Jacques Dutronc je le fais…

Que pensent vos manageurs de vos changements de style impromptus ?

Marco : C’est un peu dur de nous gérer, parce qu’il veulent un peu nous cadrer.On avait fait faire un clip tellement fou pour Roomba Rose, mais il avait été dur à accepter.
Adri : Il n’est pas passé, non.
Marco : Peut-être qu’on faire un clip pour notre ballade, « 5 o’clock in the morning ».
Adri : On a un autre titre pour lequel on a fait un clip, on ne sait même pas encore où il va sortir, c’est encore un autre style, une sorte de broken beat sur lequel je pose ma voix. On a lancé un projet de financement participatif et on a récolté plus de 7000 euros. Au final, c’est un court-métrage qui va être présenté dans des festivals du film, etc. tellement c’est beau. C’est réalisé par Pierre Teulières, qui a déjà réalisé le clip de Bot’Ox. On ne sait vraiment pas où on va le sortir.

Et c’est important pour vous de faire des clips pour vos morceaux ?

Adri : Moi j’adore ça. J’adore laisser un mec faire ce qu’il sait faire avec la musique. Quand je disais à Marco, pour ce clip « Seahorses », je me revois encore écrire les paroles chez toi, et puis de voir cet hippocampe à l’écran, je trouve ça fou, fou de voir où idée est arrivée.

Vous imaginez quelle réception à Roomba Rose ? Vous pourriez accoler deux adjectifs à votre EP ?
Adri : Je viens de voir que Roomba c’était le nom d’un aspirateur, tu sais le genre d’aspirateur qui scanne ta pièce et qui nettoie tout seul ! (Rires)
Marco : Christique, religieux !
Adri : Mais pour l’instant les feedbacks sont vraiment très encourageants sur cet EP, alors que je trouve qu’il n’est pas super évident à jouer. On n’a pas eu l’occasion de le passer tellement pour le moment…on participe au BPM Festival au Mexique pour le showcase de My Favorite Robot et justement on va en profiter pour le marteler.

D’autres dates prévues bientôt ?

Adri : On va faire une résidence au Badaboum ! On a vraiment adoré cet endroit. On a joué avec Luke Solomon il y a trois semaines là-bas.
Marco : En plus l’équipe du Badaboum croit en nous. J’avoue qu’on a eu quelques petites embuches comportementales, nous avons été catalogués comme déviants ! Pour la petite histoire, à Nice, le live était mal calé, c’était fâcheux, Adrien était un peu déçu et il s’est un peu noyé dans les alcools. Il a fait un petit after et apparemment, il y a eu un trou de cigarette dans un canapé. Avec le folklore sudiste, ça a fini en « Adrien a trashé une chambre d’hôtel ».
Adri : Une vraie rock star.
Marco : Ca a fait le tour des organisateurs de festival…La dernière fois, je parlais à un orga’ et il me disait qu’on avait la réputation de faire n’importe quoi. Si on avait été Américain ou Anglais, ça aurait été différent, c’est juste qu’on est en France ici.
Adri : Les mecs du Badaboum, eux, sont passé outre. Mais de toute façon, tu vois très bien que les bookers, les artistes, entre eux avant les soirées ils ne parlent que de ça, que d’histoires de ce genre. Je me souviens d’un dîner avant une soirée au Showcase avec Joris Voorn, Nina Kraviz, Agoria…grosse table, ça n’a jamais parlé de musique une seule fois ! Il faut arrêter d’être blasés comme ça ! Nous les petits jeunes on était déçu.

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