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17 septembre 2024

10 maxis qui ont fait la techno de Detroit (1981-1988)

par Benoît Carretier

Du galop d’essai de A Number Of Names au raz-de-marée Inner City, sélection arbitraire de dix maxis nés avant la sortie de la compilation historique Techno!. Un article issu du Tsugi 172

Par Benoît Carretier

 

A Number Of Names – ‘Sharivari’ (Capriccio, 1981)
Detroit

© DR

Le débat reste ouvert. Quel disque marque le début de la scène électronique de Detroit ? ‘Sharivari’ de A Number Of Names ou ‘Alleys Of Your Mind’ de Cybotron ? On se gardera bien de trancher, mais on avouera une faiblesse pour ‘Sharivari’, à la fois hommage à l’italo-disco et à la scène des soirées lycéennes, essentielles à Detroit dans les années 1980. Petit tube à sa sortie, ‘Sharivari’ a connu plusieurs vagues de remixes : en 2002 de The Hacker et Vitalic en France et, grâce au label Puzzlebox à Detroit, des mains de Scan 7, Ectomorph, ADULT. ou encore Mike Grant. Sans compter une nouvelle édition en 2013.

 

Model 500 – ‘No UFO’s’ (Metroplex, 1985)
Detroit

© DR

Difficile de piocher dans l’impressionnante discographie de Juan Atkins depuis ses début avec Cybotron en 1981. Sous son alias Model 500, faut-il choisir le magnifique ‘The Chase (Smooth Mix)’, sorti en 1989, ‘Off To Battle’ ou ‘Techno Music’, apparu originellement sur la compile Techno! de 1988 ? On optera sans riques pour ‘No UFO’s’, première sortie à la fois de son label Metroplex, et de Model 500, et première trace de l’utilisation de la TR-909 dans un morceau techno. Une réussite – même en version vocale. La face B, l’électro syncopée de ‘Future’, en impose également. Deux faces deux classiques (dont un absolu). 

 

XRAY – ‘Let’s Go’ (Transmat, 1986)
Detroit

© DR

Surproductive, la triplette AtkinsMaySaunderson jongle avec les pseudos et passe d’un label à l’autre avec une déconcertante facilité. Derrière ‘XRAY’, on retrouve ainsi Atkins et May (et le frère de Juan, Aaron – non crédité –, aux vocaux), qui oublient le temps de 9 minutes leurs gimmicks sonores respectifs pour un résultat hypnotique, et même un peu sale. Première référence de Transmat, le label de Derrick May, le maxi contient en face B un ‘Untitled’ que beaucoup considère comme le premier morceau « techno » à posséder tous les codes du genre, à savoir des beats 4/4 associés à des atmosphères éthérées. 

(Pour écouter le track, ça se passe par ici)

 

 

 

 

 

Channel One – ‘Technicolor’ (Metroplex, 1986)
Detroit

© DR

À Detroit comme avant à Chicago, le studio est un truc qu’on essaie en famille. Et si le monde techno fera bientôt la connaissances d’un certain Carl Craig, d’abord dans l’ombre de Derrick May puis à la tête de Planet E, le Craig de Channel One est son cousin Doug, associé à Juan Atkins pour un ‘Technicolor’ 100% électro kraftwerkienne, qui anticipe l’apparition imminente d’une scène électro-techno dans la ville. Situé quelque part encore Model 500 et le ‘Numbers’ des Beach Boys de la Ruhr, ‘Technicolor’ sera malheureusement une collaboration sans lendemain. Doug Craig retentant le coup en solo l’année suivante avec « It’s Channel One » avant de passer à autre chose.

(Pour écouter le track, ça se passe par ici)

 

 

 

 

Suburban Knight – ‘The Groove’ (Transmat, 1987)
Detroit

© DR

De Suburban Knight (James Pennington à l’état civil), on a surtout retenu les terribles ‘The Art Of Stalking’ (1990) et ‘Nocturbolous’ (1993, sur UR). Mais son premier maxi solo, ‘The Groove’ contenait déjà les éléments de sa techno sombrissime – la virulence en moins –, qui allait influencer la partie la moins docile de la scène techno anglaise. Avec son énorme basse, pièce centrale des trois versions (l’élastique ‘Pan Mix’ en face A et les mixes signée Derrick May en face B, le charpenté ‘Hot mix’ et le dépouillé ‘Late Mix’), plus dure, moins commerciale et, bientôt, l’avènement d’Underground Resistance

 

 

Rhythim is Rhythim – ‘Strings Of Life’ (Transmat, 1987)
Detroit

© DR

Le morceau le plus célèbre de Derrick May, surclassant en popularité des tracks plus complexes comme ‘Beyond The Dance’ ou même l’épatant ‘Nude Photo’, pour lequel il a utilisé pour la première fois son Yamaha DX100, trouvant définitivement son style. Mais ‘Strings Of Life’ reste ‘Strings Of Life’, indémodable. Est-ce dû aux samples de cordes de l’Orchestre symphonique de Detroit ou à ces notes de piano jouées par Michael James ? On ne sait pas si l’alchimiste de la techno considère ce morceau, souvent classé comme dans les meilleurs titres « dance » de l’Histoire, comme le sommet de sa discographie finalement assez clairsemée, mais sans ce standard, beaucoup seraient passé à côté de Detroit.

Blake Baxter – EP (Incognito, 1988)
Detroit

© DR

Si vous considérez que la techno de Detroit est cérébrale, conscientisée, futuriste et engagée, n’écoutez pas les premiers Blake Baxter. Car le truc de celui qui compte parmi les créateurs du genre (les Techno 6, avec la triplette de Belleville, Santonio Echols et Eddie Fowlkes), c’est l’abandon, le lâchage, le stupre.

Oui, la techno de Blake Baxter, « The Prince Of Techno », sent le cul, tout simplement. Et ce, depuis son premier EP en 1987, porté par ‘Get Layed’. Aussi talentueux aux platines et aux machines que derrière un micro, Baxter réussit avec son EP le coup parfait, avec les remuants ‘Sexuality’ et ‘Hornie’. Et quand il faudra fournir un titre à la compilation fondatrice Techno!, il arrivera avec le salace et irrésistible ‘Ride Em Boy‘. Une tuerie.

(Pour écouter l’un des track, ça se passe par ici)

 

 

 

 

Reese – ‘Just Want Another Chance’ (Incognito, 1988)
Detroit

© DR

Incontournable jusqu’à la fin des années 1990, Kevin « The Elevator » Saunderson a amené la techno à un niveau inédit. Tapant alternativement dans la house vocale (Inner City) et dans la techno dure voire la rave (sous pseudos Reese ou E-Dancer), il peut se targuer d’avoir influencé les scènes drum’n’bass et dubstep britanniques. Tout ça grâce à cet impeccable track de 1988, où apparait pour la première fois la « Reese Bass », une épaisse ligne de basse créée sur un synthé à distorsion de phase Casio CZ-5000, puis à Ray Keith qui sample l’intro du radio edit pour le ‘Terrorist’ de Renegade. La drum’n’bass naissante s’empare du sample et Detroit se retrouve dans une nouvelle révolution musicale.

 

Final Cut – ‘Enjoy This Trip’ (Full Effect Records, 1988) 
Detroit

© DR

En 1988, à 25 ans, Jeff Mills est déjà auréolé d’une certaine gloire à Detroit. Le public est suspendu à ses shows radio et sa technicité aux platines fait l’unanimité. La production le démange et il s’associe à Tony Srock pour fonder Final Cut. Le résultat, une poignée de maxis et un album, dresse un pont entre acid, techno et indus.

‘Enjoy This Trip’ louvoie ainsi entre les univers mais on y entend déjà la patte du Jeff Mills techno, qui cogne à bon escient et maîtrise les loops à la perfection. En 1990, avant que Final Cut ne vire indus sur les bons conseils de l’Écossais Chris Connelly, brailleur en chef de Revolting Cocks aux côtés d’Al Jourgensen de Ministry, Jeff Mills prend le large et s’en va cofonder Underground Resistance.

(Pour écouter l’un des track, ça se passe par ici)

 

 

 

 

Inner City – ‘Big Fun’ (KMS/Virgin, 1988) 
Detroit

© DR

Le tube ultime, qui a placé Detroit au centre de la révolution électronique et fait entrer l’underground techno dans le top 10 anglais. Et pourtant ‘Big Fun’ n’aurait pas dû apparaitre sur la compilation Techno! que Neil Rushton ramènera dans ses valises à Londres.

Ce crossover parfait pop/house, enregistré dans le studio Saunderson avec James Pennington et Art Forest, qui avaient participé à la rythmique et à la mélodie, n’était qu’un track parmi tant d’autres. Alors que Rushton devait retourner en Angleterre, il lui manquait un dernier titre. La veille de son vol, Kévin débarqua avec un paquet de bandes à trier chez Derrick May, qui coordonnait le tracklisting de Techno!. Et dans le tas, Rushton trouva ‘Big Fun’. Le reste, appartient à l’histoire.

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