Deux festivals sur trois sont déficitaires : le CNM alerte sur un modèle économique non viable

par | 28 07 2025 | news, festival

Le Centre National de la Musique a publié vendredi 25 juillet son étude annuelle sur la situation de plus de cent festivals de musiques actuelles. Sa conclusion est forte : leur modèle économique est difficilement soutenable.

Chaque année, le Centre National de la Musique publie une étude sur la situation des festivals auxquels elle fournit une aide. Le but ? Analyser leurs situations économiques pour dresser une vue d’ensemble d’un secteur qui se fragilise d’années en années.

Parmi les 107 festivals analysés, on retrouve aussi bien des festivals au budget important que des noms plus modestes, des Eurockéennes aux Nuits Sonores en passant par Jazz à Vienne.

En lisant le rapport, un chiffre saute immédiatement aux yeux : « En 2024, deux festivals sur trois terminent leur édition avec un déficit ».

S’il n’est pas neuf (cette proportion étant déjà la même l’an passé), c’est le montant du déficit en lui-même qui alerte : il a augmenté de 73% ( -81 770 € l’an dernier contre -115 675 € cette année).

Plus de dépenses que de recettes

Il ne s’agit pas d’un problème d’affluence : 68% des festivals dont le taux de remplissage est supérieur à 90% sont déficitaires.

En fait, même si les rentrées d’argent des festivals augmentent (+4%), leurs dépenses augmentent plus rapidement (+6%) ; soit une différence de 2%. Un phénomène que le CNM qualifie d' »effet ciseaux ».

Trois éléments composent les ressources des festivals, qui ont, elles aussi, augmenté :

  • Leurs recettes propres — soit le prix des billets ou les services de restauration et bar (+3%)
  • Les partenaires et mécènes (+11%)
  • Les subventions (+5%)

Il est important de noter la disparité des situations concernant ces ressources. Plus un festival est gros, moins il dépend des subventions — à l’inverse, plus un festival est modeste, plus ces aides sont cruciales.

Exemple de cette situation : l’arrêt des subventions à Rock en Seine de la part de la Mairie de Saint-Cloud. Si cette coupe de 40 000 euros n’a pas fragilisé ce festival doté d’un budget de 17 millions d’euros (dont 3% viennent de subventions), un festival plus modeste (dont le budget se situe généralement entre 100 000 et 250 000 euros) n’y aurait pas survécu. La fragilité du modèle économique des festivals rend possible à de telles situations de se reproduire.

Concernant les éléments qui composent les charges des festivals, elles ont, elles aussi, augmenté depuis l’an dernier :

  • Les postes techniques — notamment les prestations, comme l’installation de scènes (+6%)
  • Les coûts artistiques — notamment les cachets des artistes (+9)
  • Les dépenses autres — soit la communication, taxes, assurances etc (+4%)

Parmi ces dépenses, ce sont les prestations qui enregistrent la plus forte hausse, puisqu’elles ont augmenté de 30 % depuis l’an dernier.


Les chiffres clés :

  • 68 % des festivals dont le taux de remplissage est supérieur à 90 % sont déficitaires en
    2024, une proportion qui augmente de 26 points par rapport à 2023.
  • En 2024, le budget moyen des festivals observés s’élève à 1,6 millions d’euros,
    caractérisant une hausse de +6 % par rapport à 2023.
  • En moyenne, tandis que les charges des festivals augmentent de 6 % en 2024, les
    produits ne progressent que de 4 %. Cet écart, déjà constaté l’an passé, persiste et se
    creuse.
  • Les hausses des dépenses liées aux coûts d’achat des spectacles (contrats de cession,
    d’engagement, salaires des équipes techniques des artistes) se poursuivent en 2024
    (+9 %), dans des proportions supérieures à celle du nombre de formations artistiques
    programmées sur l’ensemble du panel (+2 %).
  • Les festivals à budgets plus modestes sont davantage dépendants des subventions et
    aides, qui représentent en moyenne 44 % des produits des festivals dont le budget est
    compris entre 100 000 et 250 000 euros.

En somme, le rapport 2024 confirme ce que celui de 2023 dessinait : même si les festivals réussissent à dégager plus d’argent, ils sont également forcés de dépenser plus. Le fait que deux tiers des festivals soient déficitaires est alarmant : leur modèle actuel n’est pas soutenable sur le long terme.