Rosalía, Clark, Charlotte de Witte… Les sorties de la semaine

par | 7 11 2025 | news

On s’enfonce un peu plus dans la grisaille automnale, mais cette semaine, on a du lourd pour vous remonter le moral. Dans notre sacoche : la techno de Charlotte de Witte, le rap mature d’Orelsan, le jazz électronique de Béesau, le tant attendu quatrième album de Rosalía, mais aussi les nouveaux disques de Midlake, Caïman, Max Baby, Clark, Mira Ló et Danny Brown. À vos écouteurs.

Charlotte de Witte – Charlotte de Witte

Jusqu’alors, l’idée d’aller plus loin ne lui était jamais venue. Une vingtaine d’EP, un statut de headliner dans les festivals du monde entier, une Boiler Room culte : après quinze ans de carrière, Charlotte de Witte aurait pu aisément se contenter d’entretenir un tel CV.

Entre deux avions, la productrice belge a toutefois ressenti le besoin d’enregistrer un premier disque, moins par goût du risque (qu’on le plébiscite ou non, ce disque ne semble pas en mesure d’ébranler l’hégémonie de son autrice) que par volonté de prolonger son geste artistique.

Ecouter ces onze morceaux, c’est entendre ce qui définit son identité musicale : ce beat matraqué, cette basse hypnotisée et soumise, ce rythme tendu qui ne fléchit jamais, obnubilé par l’idée de provoquer d’incontrôlables mouvements, des hanches – mention spéciale à « The Heads That Know » en duo avec Comma Dee, perfusé à l’énergie du grime.

La suite de cette chronique est à retrouver dans le Tsugi Mag n°184

Par Maxime Delcourt

Clark – Steep Stims

Steep Stims signe un retour aux sources purement instrumental pour Clark, dont le dernier fait d’armes était Sus Dog, un album où il explorait pour la première fois sa voix. Pour autant, le compositeur britannique n’a rien perdu de son goût pour le défi.

Sur cet album croisé entre electronica, techno, ambient ou encore jungle, il s’impose une contrainte radicale : ne produire la musique qu’à partir d’un seul synthétiseur, l’Access Virus, et d’une boîte à rythmes.

Une approche qui donne une homogénéité au projet sans jamais sombrer dans la redondance. Au contraire, Steep Stims donne l’impression d’une fête qui refuse de s’éteindre, se renouvelant sans cesse au fil de morceaux comme “Globecore Flats”, “Blowtorch Thimble” ou encore “Janus Modal”

Par Cecilia Cavassoni

Rosalía – LUX

« Démesure » est probablement le mot qui décrit le mieux LUX, quatrième album de Rosalía. Orchestre symphonique, textes chantés en treize langues, iconographie mystique, quasi liturgique : tout semble « trop ». Mais chez Rosalía, l’excès n’est pas un artifice — c’est une méthode. En quatre mouvements clairement définis, la chanteuse catalane module sa voix du lyrique à la pop pour sonder la violence du sentiment amoureux et conter toutes les figures qui composent « la femme » : sainte, la sainte, sorcière, diva, mariée ou prostituée.

« Reliquia », co-produit notamment par Guy-Manuel de Homem-Christo (moitié discrète de Daft Punk), pousse l’hybridation sacrée/profane à son paroxysme. Le morceau avance par phases, des cordes en ouverture au final 100% électronique. De son côté, « Berghain », dévoilé avant la sortie de l’album, emprunte à l’opéra tout en restant résolument pop et moderne. Et au détour de la tracklist, « Sauvignon Blanc » — chanté en espagnol mais écrit en français — nous rappelle que l’on a ouï dire que nos frenchies de Justice l’auraient aidée à prononcer correctement le nom de son vin préféré.

Si l’album est un patchwork complètement fou traversé de mille influences, on retrouve néanmoins les racines latines de Rosalía dans « La Rumba Del Perdón », en collaboration avec la chanteuse de flamenco Estrella Morente et la chanteuse lyrique espagnole Silvia Perez Cruz. On

On a trop peu de lignes pour vous passer en revue les quinze titres de l’album, alors allez — d’urgence — écouter par vous-mêmes, il y a peu de risques que vous soyez déçus.

Par Gil Martel

Mira Ló – Stronger

Mira Ló, DJ et productrice issue de l’écurie Pont Neuf Records, dévoile Stronger, un EP de quatre titres de house solaire qui donne l’irrépressible envie de danser. Chaque morceau porte un titre au comparatif — « Riser », « Higher », « Louder » — un parti pris qui annonce la couleur. On est conquis par les pistes d’ouverture et de clôture : la première, portée par une boucle de piano, flirte avec le disco et manque de peu de nous plonger dans une transe festive ; tandis que la dernière déploie un beat lumineux, traversé d’une douce nostalgie.

Par Gil Martel

Orelsan – La fuite en avant

Orelsan serait-il enfin sorti de l’adolescence ? Avec La fuite en avant, le rappeur caennais signe un retour beaucoup plus personnel — là où Civilisation scrutait la société avec un regard critique. Il y évoque sa paternité récente (sa femme a accouché de leur premier enfant en 2023), son changement de décor — retour en Normandie après des années à Paris — et sa lassitude grandissante face à la célébrité, un thème devenu récurrent depuis Le Chant des Sirènes

Si on n’a pas flashé sur tous les titres dès la première écoute, et c’est bien normal, vu la densité et la richesse des textes de l’artiste, certains morceaux — notamment ceux sans refrains — nous ont vite emportés. On pense à « Le pacte », qui ouvre l’opus, et les deux sons narrés par son alter ego odieux, « La petite voix » et « SAMA »

Côté production, on retrouve les compagnons de route Skread et Phazz. Mais Orelsan laisse aussi la place à d’autres influences dans le surprenant « Yoroï », morceau mi-rock mi-électronique co-produit par Thomas Bangalter (Daft Punk) ainsi que dans « Plus rien », en featuring avec la chanteuse japonaise Lilas, qui ose une rythmique drum and bass que l’on n’avait encore jamais entendue dans ses projets.

Par Gil Martel

Max Baby – Break

Encore une fois, Max Baby convoque la destruction dans sa musique. Après Out of control, into the wall (2024), le compositeur et producteur revient avec Break, un EP de 7 titres. Mais au-delà du chaos, c’est la rupture qu’il explore, rupture amoureuse avec “I can do anything”, rupture avec l’enfance sur “Playground” ou encore rupture avec les croyances dans “Dogma”.

Réalisé en totale solitude, l’EP déploie un rock tantôt brumeux, comme sur “Always”, belle clôture du disque, tantôt aérien comme dans “Feet”. Un voyage introspectif à découvrir sur scène, Max Baby se produira pour la première fois en tête d’affiche au Main Room, le 19 novembre. 

Par Cecilia Cavassoni

Danny Brown – Stardust

Il y a toujours une certaine excitation au moment d’entamer un album de Danny Brown. Que va faire l’un des rappeurs les plus fascinants de cette dernière décennie, déjà remarqué cette année par la réédition de son excellent Scaring the hoes avec JPEGMAFIA ? Sur Stardust, Danny Brown s’aventure du côté de l’hyperpop et de la house en s’alliant avec underscores, 8485, femtanyl ou encore Frost Children.

Si certains morceaux semblent un peu surfaits — on pense par exemple à l’ironique “Copycats”, qui imite Charli XCX Danny Brown parvient à nous séduire grâce à son débit addictif et sa capacité à s’approprier n’importe quel genre musical.

Surtout que l’album regorge de pépites, du psychédélique “Starburst” au liquide “Whatever the case” avec ISSBROKIE ou encore le frénétique “1L0v3myL1f3!”.

Par Cecilia Cavassoni

Béesau – Une fleur et des papillons

Bien que très convoité par la scène rap,  Béesau choisit de se livrer en solo avec Une fleur et des papillons, un album concept qui retrace, morceau après morceau, les différentes étapes d’une relation amoureuse. Le récit se déploie sur des compositions à la croisée des genres musicaux, entre jazz, musique électronique influences UK et sonorités urbaines.

Dans « Pas encore », la trompette céleste du musicien se mêle à des rythmiques jungle et drum and bass, atteignant un nombre de BPM relativement peu commun dans le jazz. « No Rain No Flowers » se termine en apothéose sur sonorités électroniques industrielles que l’on n’aura clairement pas vues venir. À mesure que les sons s’enchaînent, on se surprend à passer d’un discret balancement de tête à l’envie irrépressible de se lever pour danser.

Par Gil Martel

Caïman – Dreamcore 

Les rêves peuvent être à la fois doux et effrayants. Caïman nous le rappelle sur son deuxième album Dreamcore où se mélange la douceur de la guitare indie folk et de sa voix à la noirceur de certaines images, comme sur le morceau au titre évocateur “dreams are way to see dead people”.

Rassurez-vous, on ne regrette jamais de s’aventurer dans ce voyage imaginaire et spirituel. Surtout quand la jeune pépite lyonnaise insuffle une dimension collective à sa rêverie avec “roya”, morceau adressé à Cédric Herrou et à la communauté de la vallée de la Roya sur lequel on entend la poétesse rwandaise Chantal Esi Umuraza.

Ou encore, quand Caïman convoque les enfants des sorcières grâce aux harmonies envoûtantes de sa voix sur « nocturne ». Une jolie découverte.

Par Cecilia Cavassoni

Midlake – A Bridge To Far

Pochette avec des arbres en mode automne-hiver, guitare sèche, piano, mélodies douces-amères qui réchauffent le cœur, le son presque imperceptible d’un feu qui crépite, une envie d’enfiler une grosse chemise en laine… Pourquoi lutter?

Ses membres ont beau avoir pris vingt ans de plus, perdu des camarades de jeu en route, dont le chanteur Tim Smith, tenté un virage plus progressif, fait une pause de quasiment dix ans, Midlake donne l’impression d’en revenir toujours au même point : ce son entre folk et soft rock, qui puise dans Fleetwood Mac et Crosby, Stills & Nash And Young, sur lequel le groupe texan s’était fixé avec brio avec son second album, The Trials Of Van Occupanther (2006), emmené par le tube « Roscoe » et s’éloignant du son lo-fi psychédélique de leur premier. (…)

La suite de cette chronique est à retrouver dans le Tsugi Mag n°184

Pr Gérome Darmendrail