Cour des comptes Paris entrée © TouN

Des “gros” artistes profiteraient plus des subventions que des talents émergents

C’est ce que pointe du doigt la Cour des comptes, dans son rap­port annuel sur le reverse­ment des droits d’au­teur, pub­lié en juin dernier. La juri­dic­tion souligne que les sub­ven­tions accordées au développe­ment de l’activité créa­trice reviendraient surtout aux artistes bien en place, qui ne néces­si­tent pas for­cé­ment d’un sou­tien financier.

 

En France, l’Etat par­ticipe finan­cière­ment au renou­velle­ment musi­cal et à l’émergence de nou­velles têtes. Pour­tant, ces aides fini­raient en grande partie…dans les poches des pro­duc­teurs et artistes con­fir­més, capa­bles de rem­plir sans effort les plus grandes salles, comme Indo­chine, Gims ou Mylène Farmer. Cer­tains artistes décédés comme John­ny Hal­ly­day (2017) et Michel Delpech (2016), fig­urent même dans la liste des subventionnés.

 

Cour des comptes

Evo­lu­tion de l’aide à la créa­tion artis­tique et cul­turelle. Cap. écran rap­port annuel de la Cour des comptes

 

Revenons rapi­de­ment sur l’origine de ces finance­ments. Pour la faire sim­ple, l’achat d’un CD ou d’un smart­phone ‑capa­ble de stock­er des musiques- implique une rede­vance, elle-même rever­sée aux artistes par le biais de sub­ven­tions. 75% de ces sub­ven­tions revi­en­nent directe­ment aux artistes et pro­duc­teurs. Les 25% restants sont quant à eux dédiés à la créa­tion artis­tique et au “dynamisme cul­turel”. Pour­tant, la Cour des comptes, qui s’est intéressée à deux organ­ismes de redis­tri­b­u­tion des droits d’auteur (la SCPP et la SPPF), observe  “une forte con­cen­tra­tion des bud­gets au prof­it des plus gros pro­duc­teurs, c’est-à-dire ceux qui génèrent le plus de droits”. Un con­stat plutôt antin­o­mique, étant don­né que ces sub­ven­tions pour le “dynamisme cul­turel” devraient revenir aux artistes émer­gents, dont les moyens économiques peu­vent être faibles.

La faute, selon la Cour des comptes, à un sys­tème de redis­tri­b­u­tion désa­van­tageux pour les jeunes artistes. Le mod­èle est sim­ple : le mon­tant des sub­ven­tions allouées s’aligne sur le mon­tant des droits générés. En d’autres ter­mes, les artistes qui vendent le plus sont les mieux aidés. Dans son rap­port, la juri­dic­tion affirme qu’”il ne devrait pas exis­ter de cor­réla­tion directe entre le mon­tant des droits générés et les aides attribuées. C’est le principe même de l’action artis­tique et cul­turelle, con­sacré par le lég­is­la­teur qui a souhaité y allouer des ressources spé­ci­fiques”. La SCPP, l’un des deux plus gros redis­trib­u­teurs de droits d’auteur visés par la juri­dic­tion, a rap­pelé à la Cour des comptes que “toute créa­tion com­porte un risque, même pour des artistes plus con­fir­més dont les pro­jets sont plus coû­teux”.