đïž âDu groove pur et durâ : on a reçu Mac Declos pour une interview Ă 360Âș
Il Ă©tait parÂmi les nomÂmĂ©s dans les catĂ©Âgories âArtiste masÂculinâ et âAlbum de lâanÂnĂ©eâ de nos VicÂtoires de la musique alterÂnaÂtives, Mac DecÂlos, une des derniĂšres recrues de Mama Told Ya âle label dâAnetha- nous a renÂdu visÂite. Le jeune DJ et proÂducÂteur a toute la vie devant lui et pourÂtant, il en a vĂ©cu des choses. Avec nous il revient sur ses dĂ©buts, ses menÂtors, lâhisÂtoire derÂriĂšre son preÂmier album Hard Work Always Pays Off⊠ou encore sur sa vision de la nouÂvelle scĂšne techÂno dont il fait parÂtie. Mais ce quâon retient surtout, câest sa perÂsonÂnalÂitĂ© sponÂtanĂ©e, instiÂgaÂtrice du groove qui lâhabite et dont lui seul a le secret.
Tu faiÂsais quoi, avant dâĂȘtre DJ et proÂducÂteur de musique Ă©lectronique ?
Jâai comÂmencĂ© par la danse. Ma maman est prof de danse urbaine et jazz, puis mon papa est guiÂtariste de jazz. Quand jâĂ©tais petit je ne savais pas trop quoi faire alors je me suis investi dans la danse. Jâai fait un bac spĂ©ÂcialÂisĂ© en NorÂmandie, jâai suivi des cours au CenÂtre ChorĂ©Âgraphique NationÂal de Lille penÂdant un an, puis je suis entrĂ© dans une Ă©cole Ă Paris. La danse a pris une grosse part ma vie : de mes 8 ans Ă mes 22 ans, et câest devenu trop pour moi.
Quand est-ce que ton preÂmier conÂtact avec la musique Ă©lecÂtronÂique sâest-il Ă©tabli ?
Jâai dĂ©couÂvert la musique Ă©lecÂtronÂique Ă Lille quand jâallais au MagÂaÂzine Club. Je me rendais souÂvent en BelÂgique ausÂsi car ce nâĂ©Âtait pas loin en voiture, au KomÂpassklub. En plus, je faiÂsais de la house dance, un style hip-hop venant de ChicaÂgo donc je baigÂnais beauÂcoup dans ce genre de musique. Alors jâai achetĂ© un conÂtrĂŽleur et jâai comÂmencĂ© Ă mixÂer. Ensuite jâai parÂticipĂ© Ă un tremÂplin pour le fesÂtiÂval ElecÂtro LĂ©o : jâai Ă©tĂ© pris, puis je suis entrĂ© dans un colÂlecÂtif caenÂnais qui sâappelle M.A.D Brains. Ils Ă©taient en relaÂtion avec le Nördik Impakt (aujourÂdâhui NDK), dont jâai gagÂnĂ© le tremÂplin peu aprĂšs. Ce fesÂtiÂval mâa accomÂpaÂgÂnĂ© penÂdant trois ans. Jâai jouĂ© Ă leurs 20 ans quand jâavais 19 ans; entre LauÂrent GarÂnier et Maceo Plex en peak time, donc pas le warm up Ă 20 heures (rires) ! Câest comme ça que jâai commencĂ©.
Est-ce que tu tâinspires de la danse pour comÂposÂer tes tracks ?
Pas claireÂment mais il y a un truc que je dis tout le temps : âil nây a pas de danse sans musique et il nây a pas de musique sans danseâ. Dans ma techÂno jâessaie de garder un cerÂtain groove. Une musique assez chaleureuse, mĂȘme si cela peut ĂȘtre pointu ! Je veux faire des proÂducÂtions qui donÂnent envie de danser, car pour moi câest lâessence mĂȘme du mĂ©tiÂer de DJ.
Qui est Mac DecÂlos ? Est-ce quâil est difÂfĂ©rent dâAntonin DeclomesÂnil ?
Pas vraiÂment. Mac DecÂlos, câĂ©tait le nom dâartiste de mon papa. Quand il jouait du jazz ou du blues dans des bars, il y avait des affichÂes avec Ă©crit âMac DecÂlosâ dessus. Au moment de dĂ©buter ma carÂriĂšre de DJ, je lâai adopÂtĂ©, sans penser que ça irait si loin. Donc ce nom est familÂial, qui dit âfamilÂialâ dit âsangâ. Et qui dit âsangâ dit âmoiâ (rires). Puis sur scĂšne je suis sans filÂtre, ce nom ne fait quâun avec moi. Mais je comÂprends que cerÂtains artistes aient besoin de se crĂ©er un alter-Ă©go, un personnage.
Je me souÂviendrai touÂjours, quand jâai jouĂ© aux 20 ans de Nördik Impakt. Mon nom Ă©tait juste au-dessus de celui de LauÂrent GarÂnier sur le line-up. Mon papa est de 70 donc cet artiste lui parÂle. Il mâavait dit : âCâest bien fils, tâas rĂ©usÂsi Ă metÂtre mon nom au-dessus de LauÂrent GarÂnierâ (rires) !
Tu tâes vite dirigĂ© vers la house, mais comÂment as-tu affirÂmĂ© ton attrait pour la techno ?
Câest assez drĂŽle : au dĂ©but, je mixÂais pour mes potes en apparteÂment lors dâapĂ©ros âĂ la coolâ. Un jour Ă Lille, une conÂnaisÂsance qui aimait ausÂsi la musique Ă©lecÂtronÂique est venue avec sa clĂ© lors dâune soirĂ©e. Puis il mâa dit âJe peux passÂer du son ? Je mixe plutĂŽt de la techÂno par conÂtreâ. Quand il est parÂti, il a oubliĂ© sa clĂ© sur mon ordi ! Je lâai rĂ©cupĂ©rĂ©e, jâai Ă©coutĂ© et jâai eu mes preÂmiers tracks techÂno de Jeff Mills, Phase Fatale⊠Et jâai aimĂ© de plus en plus. Mais Ă la base je mixÂais de la house, je jouais mĂȘme au Djoon.

© MarÂiÂon Sammarcelli
Tu as comÂmencĂ© par le deeÂjayÂing, grĂące Ă quoi ou Ă qui tâes-tu dĂ©cidĂ© Ă faire tes proÂpres proÂducÂtions ?
En parÂalÂlĂšle de la musique Ă©lecÂtronÂique, jâai touÂjours fait de la guiÂtare, grĂące Ă mon papa. Donc jâavais la fibre du comÂposÂiÂteur (rires). Mais câest lâaccompagnement suite au tremÂplin du Nördik Impakt qui mâa beauÂcoup aidĂ©. PenÂdant trois ans, jâavais accĂšs Ă un stuÂdio quand je le voulais et jâĂ©tais accomÂpaÂgÂnĂ© par le Cargö, et BrusÂco qui bosse lĂ -bas. Ils me finançaient ausÂsi une masÂterÂclass avec un artiste de mon choix. Et Ă lâĂ©poque jâavais choisi AWB, parce que câest un artiste de la rĂ©gion norÂmande et quâil est cool (rires).
ComÂment ton entrĂ©e chez Mama Told Ya, le label dâAnetha, sâest-elle faite ?
Ăa sâest fait assez naturelleÂment. Ăa a comÂmencĂ© par Anetha qui a jouĂ© un de mes morceaux sorÂti sur une comÂpilâ du label AgoÂra. Alors je voulais lui envoyÂer mes tracks, et ABSL âque je conÂnaisÂsais dĂ©jĂ - lâa fait Ă ma place. Et elle a beauÂcoup aimĂ© ! Ensuite on a vraiÂment parÂlĂ© et on a fait lâalbum.
Quelle est lâhistoire derÂriĂšre Hard Work Always Pays Off ? ComÂment dĂ©crirais-tu ce preÂmier album ?
âHard work always pays off â (âLe traÂvail paye touÂjoursâ) est une citaÂtion que je garde souÂvent en tĂȘte, depuis que jâai comÂmencĂ© Ă faire de la musique. Mes parÂents me lâont touÂjours dit. CâĂ©tait imporÂtant pour moi de posÂer les bases avec cette phrase super forte. Jâai proÂduit lâalbum en un an et câĂ©tait beauÂcoup de traÂvail. En terme de palette musiÂcale, câest Ă 360Âș : jâĂ©coute vraiÂment de tout. Il y a des morceaux assez calmes qui ne sont pas dessus, car on voulait garder un aspect club pour mon preÂmier album. Mais il y a des tracks un peu plus afrobeat, trance, psyÂchĂ©, ghetÂto⊠Cet album câest moi, tout simÂpleÂment !
Quelle est la prodâ dont tu es le plus fier ? Et celle qui tâa donÂnĂ© le plus de fil Ă retordre ?
OffiÂcielleÂment je dirais que la proÂducÂtion dont je suis le plus fier câest âI wanÂna see u moveâ. Et offiÂcieuseÂment, câest âHave Yeâ. Ce track nâest pas techÂno mais techÂniqueÂment, câest mon rĂȘve musiÂcal : il y a des harÂmonies, je chante un peu dessus⊠Plus tard jâaimerais ausÂsi bossÂer en stuÂdio avec des groupes de pop ou de rap. Mais âI wanÂna see u moveâ me rend fier car câest celle que jâai mis le moins de temps Ă comÂposÂer et qui foncÂtionne le mieux (rires) ! Puis ce morceau me reprĂ©sente bien : du groove pur et dur.
Celle qui mâa donÂnĂ© le plus de fil Ă retorde, câest âGlitchÂing & BubÂblingâ : le morceau est en quaÂtre parÂties, il dure 6:30 et est Ă©volutif.
Quand tu comÂposÂes, quel est ton procesÂsus crĂ©atif ? Quâest-ce que tu fais en premier ?
Le plus imporÂtant pour moi câest la sponÂtanĂ©itĂ©. Je suis allongĂ© sur mon canapĂ©, jâai une idĂ©e ou une piste, je chope mon ordiÂnaÂteur et je la fais ! Donc ce que je fais en preÂmier, câest trouÂver une inspiÂraÂtion qui va me poussÂer Ă faire de la musique. Par exemÂple je me suis remis au sport il y a un petit moment, jâai fait un morceau un peu ghetÂto et jâai vrilÂlĂ© (rires). Jâai enregÂistrĂ© un vocal en me metÂtant dans la peau dâun mec accro Ă la salle, qui prend beauÂcoup de proÂtĂ©ines⊠Jâai pas mal dâidĂ©es torÂdues qui me vienÂnent. Je vois telleÂment de potes qui galĂšrent, qui essayent de forcer leur crĂ©aÂtivÂitĂ©, et ça les frusÂtre de ne pas rĂ©usÂsir Ă proÂduire. Je nâai pas envie de renÂtrÂer dans ce cerÂcle vicieux, surtout aprĂšs mon preÂmier album. Donc je reste dans ma sponÂtanĂ©itĂ©.
Il paraĂźt que câest ta voix sur tous les tracks de Hard Work Always Pays Off ?
Oui, je les enregÂistre avec mon tĂ©lĂ©Âphone sous un plaid (rires) ! Ăa renÂtre dans mon procesÂsus crĂ©atif sponÂtanĂ©, jâĂ©cris et jâenregistre beauÂcoup de trucs sur le coup. Et jâai touÂjours trouÂvĂ© quâil nây avait pas assez de voix dans la techno.
Hard Work Always Pays Off est un conÂcenÂtrĂ© de toutes tes influÂences musiÂcales. Dans tes prochains proÂjets, tu comptes te conÂcenÂtrÂer sur une dâelles en particulier ?
Bien sĂ»r. Câest ce qui est en train de se faire. En ce moment, je fais de la musique en colÂlabÂoÂraÂtion avec des artistes qui ne font pas parÂtie de ma scĂšne. Ăa peut ĂȘtre de lâItalo Body Music ou bien de la house, justeÂment. Jâai envie de faire pas mal de ghetÂto dans la veine de âI wanÂna see u moveâ, car ça me fait kifÂfer. Câest ce que je recherche en ce moment. Mais jâai ausÂsi un EP qui devrait sorÂtir sur le label de François X, XX LAB, âenfin il faut que je le finisse (rires)- avec des tracks plus psyÂchĂ© et pureÂment club.

© MarÂiÂon Sammarcelli
CerÂtains puristes criÂtiquent beauÂcoup les morceaux qui vont Ă plus de 150 bpm : quâaimerais-tu leur rĂ©ponÂdre ?
Et pourÂtant jâai ralenÂti (rires) ! En soi, je nâai rien Ă leur rĂ©ponÂdre : câest comme si tu engueuÂlais ton pote parce quâil met une cuilÂlĂšre dâhuile en trop dans sa vinaiÂgrette. Plus sĂ©rieuseÂment, câest juste un chiffre. LĂ on parÂle de musique, de ressenÂti et pas de chiffre. Je trouÂve que rapÂporter lâartistique Ă un cĂŽtĂ© factuel, câest domÂmage. Je ne me ferme la porte Ă aucun genre de musique, et je ne suis perÂsonÂne pour dire ce qui est bien ou mauÂvais. Jâestime mĂȘme que perÂsonÂne nâest lĂ©gitime de le dire. On est tous des humains, on a des goĂ»ts difÂfĂ©rents, on voit tous les choses difÂfĂ©remÂment. Et puis francheÂment, si tu te canÂtonnes Ă suivÂre un bpm, tu vas louper beauÂcoup de musique dans ta vie.
Tu fais pas mal de all night long, quel est ton secret pour rĂ©usÂsir Ă mixÂer penÂdant sept heures ?
Ce qui me fait tenir câest : une bonne hygiĂšne de vie, une bonne bande de potes (rires), des sons qui me transÂportent, et lâadrĂ©naline qui est touÂjours prĂ©sente. Par conÂtre si tout ça est Ă©clatĂ©, ça doit ĂȘtre difÂfiÂcile de tenir sept heures (rires). Il faut surtout Ă©viter de boire de lâalcool, câest Ă fuir. Ăa te met bien penÂdant deux heures et aprĂšs, soit tu es bourÂrĂ©, soit tâas la gueule de bois qui arrive. Donc je privÂilĂ©gie les jus, les fruits, les vitÂaÂmines : ça fait un bon effet placĂ©bo.
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Quand tu joues penÂdant sept heures, est-ce que tu prĂ©Âpares ton set Ă lâavance ?
Je prĂ©Âpare mes playlists bien sĂ»r. Une semaine avant le RSO, Ă Berlin, je metÂtais de la musique non-stop Ă lâappartement. Et je demandais Ă mon entourage de mâenvoyer des sons. Il faut ausÂsi organÂisÂer ses playlists par humeur ou style de musique : trance, fast, weapons groove, menÂtal, house⊠Il faut bien strucÂturÂer. Et ensuite je me balade entre les dossiers. Je suis un DJ qui fait attenÂtion au danceÂfloor, jâessaye de suivÂre lâhumeur du pubÂlic ! Donc je ne peux pas prĂ©voir mon set Ă lâavance. Puis il y a beauÂcoup de facÂteurs qui entrent en jeu : le lieu, les lumiĂšres, les gens, la ville⊠Il faut ausÂsi jouer en foncÂtion de tout ça.
Quâest-ce que la nouÂvelle scĂšne techÂno française dont tu fais parÂtie amĂšne dans le paysage de la musique Ă©lecÂtronÂique quâon conÂnaĂźt ? Au niveau des Ă©nerÂgies, influencesâŠ
Je trouÂve quâil y a une bonne dynamique au sein de cette scĂšne, on est assez soudĂ©s ausÂsi avec LacÂchÂesi, Kuss, Vel, François X⊠Cette scĂšne est ausÂsi forte de propoÂsiÂtions. Les gens vont dire quâaujourdâhui, il y a âbeauÂcoup de musique de merdeâ mais il nây a jamais eu autant de sorÂties ! Tous les jours. Et puis une basÂcule est en train de se faire : on nous laisse de plus en plus nous exprimer, dans les mĂ©dias ou dans les clubs. On se sent plus lĂ©gitimes.
ComÂment imagines-tu ton Ă©voÂluÂtion au sein de cette scĂšne ?
Quoiquâil arrive, jâaimerais rester proche des gens qui font cette scĂšne. Mon souhait serait de garder lâenÂtraide qui nous lie. Et en terme dâĂ©volution, je ne me proÂjette pas, jâesÂsaye de ne pas avoir dâatÂtentes pour ne pas ĂȘtre déçu. Car du jour au lendeÂmain tout peut sâarrĂȘter, je lâai appris avec le Covid. En vieilÂlisÂsant, je suis sĂ»r de vouloir faire ce que AWB, François X et Anetha ont fait et font avec moi : aider les artistes Ă©merÂgents. Tout seul tu vas plus vite, mais ensemÂble on va plus loin.