Her en couverture de Tsugi 110, en kiosque le 8 mars

Les temps ont heureuse­ment bien changé. Il y a, allez quoi, 25 ans, l’espoir pour les jeunes artistes français de se faire enten­dre dans le monde anglosax­on était qua­si­ment inex­is­tant. Puis la french touch est arrivée pour bous­culer tout ça, mais avec une musique large­ment instru­men­tale, ce qui écar­tait l’éternel prob­lème de la langue. Mais lorsqu’il y a dix ans, la pop baroque chan­tée en anglais de Phoenix s’est mise à exciter des salles de plus en plus grandes, de la Cal­i­fornie au Texas, en pas­sant par New York, on s’est dit que le rêve améri­cain n’était peut-être pas for­cé­ment réservé aux arti­ficiers tri­col­ores de l’électronique. La démon­stra­tion est encore faite avec Her, acclamé outre-Atlantique dès 2015 et son pre­mier track “Quite Like” posté sur Sound­Cloud. Magie des inter­nets, qui voit le morceau partagé par Phar­rell Williams et The Week­nd. Pas mal comme coup de pouce. Et comme nous le racon­te amusé Vic­tor Solf, seul maître à bord depuis le décès l’été dernier de son ami et frère de son Simon Car­pen­tier, le mys­tère voulu par le duo autour des orig­ines de Her les a même fait pass­er à leurs débuts pour un groupe venu de New York ou Lon­dres. Au point que leur future mai­son de dis­ques Bar­clay n’y a à l’époque vu que du feu. Trois ans plus tard, la con­fu­sion n’est plus de mise. La planète entière est dev­enue le roy­aume de Her. Ou plutôt de “eux”.

Vous retrou­vez égale­ment dans ce mag­a­zine un CD mixé par The Black Madon­na, Eddy de Pret­to jouant au blind­test, un long por­trait de Roméo Elvis, une ren­con­tre avec The Mover (aka Marc Acardi­pane), Jean-Benoît Dunck­el (la moitié de Air) qui se dévoile en images, une plongée dans la contre-culture élec­tron­ique espag­nole post-franquiste ou Mai Lan racon­tant une folle nuit de psy­chédélisme. Et comme d’habi­tude, votre fournée men­su­elle d’in­ter­views, chroniques, bons plans sor­ties, comptes-rendus de fes­ti­vals… A retrou­ver en kiosque ou à la com­mande ici à par­tir du 8 mars ! En atten­dant, vu qu’on est sym­pa, voilà le début de notre inter­view de Vic­tor Solf (alias Her) par Vio­laine Schutz. 

Peu de groupes français ont réus­si le pari : être prophètes en dehors de leur pays. À l’image des héros french touch, le duo ren­nais sur­doué Her a élec­trisé l’étranger avec son électro-soul ambitieuse et char­nelle. Après la dis­pari­tion de son com­plice et moitié du duo, Simon Car­pen­tier, Vic­tor Solf con­tin­ue l’aventure seul pour défendre un pre­mier album aus­si boulever­sant que vivifiant.

Douze cen­timètres de neige. Un événe­ment météorologique rare à Paris qui provoque l’émerveillement des locaux, des touristes et même de la presse étrangère qui titre “La cap­i­tale française n’a jamais été aus­si belle”. Même si un cer­tain chaos règne, le décor immac­ulé nous plonge au choix dans la féerie d’un con­te de Noël, du Edward aux mains d’argent de Tim Bur­ton ou des sports d’hiver de l’enfance. L’écrin idéal pour aller retrou­ver Vic­tor Solf, chanteur et clavier de Her, un duo qui a fait preuve d’une élé­gance aus­si fasci­nante que l’épais man­teau blanc dont s’est vêtue la ville lumière. En deux longs EP’s et un tube irré­sistible, “Five Min­utes”, Her s’est imposé comme l’un des groupes français les plus tal­entueux et flam­boy­ants de sa généra­tion. Le cadre intem­porel du rendez-vous a égale­ment du sens. On rejoint ce dandy aux faux airs de Chet Bak­er dans un hôtel des beaux quartiers après un essayage de cos­tumes chez son tailleur sur mesure (Mai­son Rives). On le sent très ému, sa voix veloutée s’embrumant par­fois, tan­dis que le regard timide mais pro­fond se baisse. Pour­tant jamais Vic­tor ne flanchera, esquis­sant même quelques sourires. La tâche n’est pour­tant pas aisée. Le jeune homme de 27 ans doit défendre pour la pre­mière fois seul en inter­view ce qu’il a enfan­té avec Simon Car­pen­tier (chanteur et gui­tariste), ami d’enfance et alter ego dans Her, dis­paru pré­maturé­ment d’un can­cer en août dernier, à seule­ment 27 ans. Leur pre­mier album de néo-soul lux­u­ri­ante, moite et aven­tureuse, enreg­istré entre Dinard, Rennes et Paris, a beau être présen­té comme un “tes­ta­ment du grand l’artiste que Simon était”, il exalte des pul­sions de vie. “Je pense à Simon, explique Vic­tor, au fait qu’il ne s’est jamais plaint, c’est ce qui me donne de la force. Il n’a annulé aucun con­cert. Il avait réal­isé très tôt le sens de la vie, sa fragilité. Alors il prof­i­tait de chaque instant. Et puis, je lui avais fait la promesse de con­tin­uer. Quand on a for­mé Her, c’était quand notre ancien groupe ne mar­chait plus du tout. C’est sou­vent quand tu perds quelque chose que tu testes tes con­vic­tions. On avait 19 ans, plus d’intermittence ni de tourneur. On a réal­isé que vivre de la musique était une vraie chance et on a décidé de ne rien faire d’autre et de ne jamais s’arrêter.”

La suite le 8 mars !

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