©Lou Chaussalet

🤝 Jean-Yves Leloup : L’ambient, “une musique sereine pour des temps troublés”

par Tsugi

Spé­cial­iste de la musique Ă©lec­tron­ique, jour­nal­iste et com­mis­saire d’exposition, Jean-Yves Leloup vient de con­sacr­er un livre pas­sion­nant Ă  l’ambient. Il rĂ©pond aux ques­tions de Tsu­gi sur l’histoire com­plexe de ce style musical. 

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L’ambient, qu’est-ce que c’est ?

C’est avant tout un terme inven­tĂ© par Bri­an Eno, qui en donne une pre­mière dĂ©f­i­ni­tion lors de la sor­tie de son album Dis­creet Music en 1975. Il retrace dans un man­i­feste com­ment cette notion lui est apparue. Dès cet instant, il dĂ©cide de dĂ©di­er une par­tie de sa car­rière Ă  l’exploration de ces musiques dites “envi­ron­nemen­tales”, ce qui sera très mal accep­tĂ© par la presse et le pub­lic rock qui le vĂ©nèrent pour son rĂ´le au sein de Roxy Music. Ă€ ma con­nais­sance, l’ambient est le seul style musi­cal de la pop cul­ture qui pos­sède une vĂ©ri­ta­ble dĂ©finition. Jean-Yves Leloup

“En tran­sit Ă  l’aĂ©roport de DĂĽs­sel­dorf, Eno, qui a très peur de l’avion, imag­ine une musique qui, dit-il, “vous pré­pare Ă  flot­ter et secrète­ment flirter avec la mort””. 

Com­ment naĂ®t la con­cep­tu­al­i­sa­tion de l’ambient par Eno ?

Ren­ver­sĂ© par une voiture, Eno est alitĂ© et lors d’une vis­ite, une amie lui offre un disque de harpe du Moyen Ă‚ge. L’électrophone est près de son lit. Elle lui met le disque en par­tant. Il pleut dehors, le disque n’est pas assez fort. Eno règle alors le vol­ume pour qu’il y ait un Ă©quili­bre entre le son de la harpe et le son de la pluie. Dans l’état de faib­lesse dans lequel il se trou­ve, ces quelques notes de harpe dif­fusĂ©es Ă  faible niveau, qui se mĂŞlent au bruit de la pluie qui tombe, lui font l’effet d’une rĂ©vĂ©la­tion. Quelque temps plus tard, en tran­sit Ă  l’aĂ©roport de DĂĽs­sel­dorf, Eno, qui a très peur de l’avion, imag­ine une musique qui, dit-il, “vous pré­pare Ă  flot­ter et secrète­ment flirter avec la mort”. Une musique très calme qui se mĂŞle naturelle­ment avec les sons envi­ron­nants. L’album Ambi­ent 1: Music For Air­ports qui va naĂ®tre de cette expĂ©ri­ence est une propo­si­tion artis­tique et poé­tique. Avec le temps, cela devien­dra le plus grand suc­cès com­mer­cial de Eno, mais Ă  l’époque le disque est mal accueil­li. Offi­cielle­ment, le terme “ambi­ent” est util­isĂ© pour la pre­mière fois par Eno en 1978 pour cet album.

 

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L’ambient existait-il avant Eno ?

Eno a une grande cul­ture et beau­coup d’intuition. Il est très doué pour con­cep­tu­alis­er une idée et la ven­dre. En 1975, il syn­thé­tise un courant qui existe déjà à l’état latent dans la musique dite d’avant-garde. Depuis la fin des années 1960, il existe des recherch­es autour d’une musique qui diluerait la per­cep­tion du temps, qui épouserait les formes de l’éternité. Une musique intro­spec­tive qui fait aus­si écho à des pra­tiques par­fois spir­ituelles. Mais Eno s’inspire égale­ment de ce qu’on appelle la muzak (la musique d’ambiance dif­fusée dans les ascenseurs ou les galeries marchan­des, qui existe depuis les années 1930, ndlr) ou la musique “cos­mique” alle­mande des années 1970 et de tous les musi­ciens qui ont fait éclater le for­mat de la chan­son pop/rock pour explor­er d’autres dimen­sions, plus spir­ituelles pour les uns ou plus lysergiques pour les autres.

“Une musique de fond aus­si bien qu’une musique qui per­me­tte de se con­cen­tr­er et dans laque­lle on peut s’immerger.”

Quelle est la dĂ©f­i­ni­tion de l’ambient par Eno ?

Elle est sim­ple, poé­tique et très touchante. Il dĂ©crit les choses sans emphase intel­lectuelle. Il imag­ine une musique qui puisse col­or­er l’atmosphère, comme une nuance. Une musique, dit-il encore, “aus­si intĂ©res­sante que facile Ă  ignor­er”. Une musique de fond aus­si bien qu’une musique qui per­me­tte de se con­cen­tr­er et dans laque­lle on peut s’immerger. 

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