La bouse du mois : Goldfrapp – Silver Eye
Article extrait du numéro 101 de Tsugi (avril 2017) disponible en kiosque ou à la commande ici.
Avouons-le d’entrée, nous avons arrêté de suivre la trajectoire de l’étoile filante Goldfrapp depuis tellement longtemps qu’il faudrait probablement entamer cette longue sentence accablante par préciser aux quelques irréductibles fans des Londoniens que la couche de mauvaise foi de cette “bouse” pourra leur sembler double ce mois-ci. Les productions du groupe nous ont tellement irrités qu’on en a presque oublié des débuts prometteurs qui donnaient quelques lettres de noblesse à l’étiquette “électro- pop”. On se souvient de singles infectieux comme l’inoubliable “Strict Machine” ou même d’un album de remixes au casting hallucinant (Ewan Pearson, DFA, Múm…), We Are Glitter. Puis le groupe nous a perdu dans ses allers-retours incessants entre tubes discoïdes ultra-glam et ballades atmosphériques glacées. Et c’est tout l’éventail de ce qu’il a pu faire par le passé que le duo formé par Alison Goldfrapp et Will Gregory cherche à compiler sur ce septième album qui aligne des resucées sans inspiration ni panache de morceaux passés. Sur l’ouverture, “Anymore”, qui sert aussi de premier single, ringard mais efficace, on se demande si Goldfrapp n’a pas piqué quelques mélodies à Texas. La suite alterne morceaux aériens et tentatives de tubes sans jamais réussir à mettre dans le mille, avec la manie, en plus, de vouloir pousser chaque morceau au-delà de quatre minutes alors qu’un bon titre pop ne devrait pas avoir honte de s’arrêter à 3’30. Pénible déjection disco (“Everything Is Never Enough”) ou pâle copie de Mylène Farmer (“Faux Suede Drifter”), tout y passe sur cet épuisant Silver Eye. La clôture de l’album, “Ocean”, réserve tout de même une petite surprise, avec – à défaut d’une chanson épatante – une production surpuissante et noire, portée par le talentueux invité The Haxan Cloak. Mais cela ne suffit pas à nous donner envie d’entendre ce que fera Goldfrapp sur son prochain album.
Silver Eye (Mute/Pias), sorti le 31 mars.