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4 octobre 2023

La Sphere de Las Vegas : une telle démesure, est-ce bien raisonnable ?

par Sasha Abgral

C’est LA nouvelle culturelle internationale. Le 29 septembre dernier, U2 a inauguré la toute nouvelle salle de divertissement sphérique dans le cadre d’un show à l’américaine absolument somptueux. Mais comme Las Vegas et démesure vont trop bien ensemble, la Sphere at The Venetian Resort n’a pas manqué de questionner.

Las Vegas est, mais ne sera probablement plus seulement, le temple américain du jeu. Venir de loin suffit déjà à apercevoir cette immense boule mystérieuse, surplombant la plus grande ville de l’État du Nevada, grâce à (ou à cause de ?) sa forte lumière « visible depuis le Strip de Las Vegas, des centaines de chambres d’hôtel, le monorail, et même le cielé d’après ses propriétaires. Reconnue sur les réseaux sociaux à travers le monde pour ses animations -notamment pour la victoire de Djokovic et de Gauff à l’US Open, ou pour l’accueil de la NBA Summer League dans la ville- la grosse boule avait déjà tout pour faire rêver, même avant l’ouverture officielle. Mais ce que tous les principaux concernés attendaient, c’était bien l’inauguration du lieu avec la résidence du groupe irlandais U2.

Le premier show dans la Sphere, le 29 septembre, aura ébahi autant qu’il aura fait réagir. Dans cet espace haut de 112 mètres et large de 157 mètres (ce qui fait de lui le plus grand bâtiment sphérique du monde), ce sont pas moins de 18.000 personnes qui ont pu assister à un spectacle unique de chez unique. Ce dernier chiffre peut paraitre dérisoire, considérant les arènes et autres stades présents sur le continent, mais ce n’est pas tant ce qui marque.

Énergie, quand tu nous tiens

Si vous manquiez d’un peu d’Amérique dans votre esprit, accrochez-vous : car il est important de savoir que son modèle est loin d’avoir atteint ses limites. En plus d’un coût de 2,3 milliards de dollars selon le Las Vegas Review-Journal, ce sont ses écrans qui font parler… Logique. Celui de l’extérieur, d’ailleurs composé de 1,2 million de petits palets de LED, mesure 53 000 m2 ; contre 15 000 m2 pour celui de l’intérieur. Rien que ça ! Et ce n’est pas fini. Les 16K (vous qui pensiez que le 4K, c’était le must) de définition ont beau être spectaculaires pour ainsi dire, c’est plutôt leur consommation qui crée le débat. C’était prévisible, mais voici la dure réalité : un article du cabinet S&P Global cité par Franceinfo indique une consommation de « environ 95 779 MWh par an ». Cela « représente approximativement la consommation annuelle de 20 500 ménages français, soit l’équivalent d’une ville comme Valenciennes (Nord) ».

Toujours selon nos confrères français, qui citent USA Today, l’empreinte environnementale de ce mastodonte serait allégée grâce à une provision d’électricité solaire à hauteur de 70%… à terme. En effet, cet objectif est seulement à remplir d’ici 25 ans, dans le cadre d’un contrat avec NV Energy, le fournisseur d’électricité. Une catastrophe pour les écologistes donc, mais une véritable aubaine pour les diffuseurs de publicité. L’exemple de la NBA Summer League suffit pour se rendre compte de l’ampleur phénoménale que cette sphère apporte non seulement localement, mais aussi et surtout, internationalement. Ne comptez pas moins de 370 dollars pour en être spectateur.ice. Et si vous comptiez venir à Las Vegas en mode business, afin de propager votre petit commerce indépendant, vous pouvez déjà faire demi-tour car la facture sera salée : 450 000 dollars pour une journée de publicité, et 650 000 pour la semaine -comme l’a rapporté PitchDeckGuy, un utilisateur X spécialisé dans les analyses financières.

 

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Las Vegas repart

En terme de résidence, Las Vegas n’attirait plus. L’attrait que des personnalités en plein déclin comme Elvis Presley ou Frank Sinatra témoignaient, était plutôt sinistre comparé au type plus régulier de la tournée classique. Entre le roi du Rock and Roll piégé par la vie de star, et le jazzman en fin de carrière, cette pratique n’avait plus bonne réputation. La relance s’est trouvée dans la voix de Céline Dion, qui pendant seize ans s’y sera produite plus de mille fois. Dernièrement dans la ville, on y a vu des têtes d’affiche comme Adele, Lady Gaga et Travis Scott. La Sphere est donc désormais érigée en tant que sauveuse de la résidence. Elle compte révolutionner d’autres marchés comme le cinéma, ou le basket. Pour l’instant, c’est U2 qui s’occupe de faire tourner la machine, pour une série de 25 shows, baptisée Achtung Baby Live at Sphere. Étonnant, nous qui avons déjà pu voir Bono être plus sensible vis-à-vis des enjeux écologiques dans le passé. Visiblement, ce n’est pas le bon moment.

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