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22 juillet 2014

Micropoint : « on est heureux d’avoir laissé une empreinte »

par rédaction Tsugi

Vous avez eu du mal à vous remettre de ces 20 ans d’Astropolis ? Nous aussi, on vous rassure. Et même si les plus valeureux d’entre nous vous ont tout raconté au jour le jour (ici et , voire même ), il eut été dommage de ne pas repartir sans un petit mot lâché côté artistes, même si du temps a été nécessaire pour remettre tout ça en ordre. Voilà qui est fait.

Avec Micropoint, tout est un peu sur le fil. 20 berges que Radium et Al Core font tourner la baratte à 180 à l’heure, rabotant au passage le conduit auditif de la jeunesse française (pas celle-ci, l’autre). Logique donc qu’il y ait un peu de relâchement côté coulisses quand la boîte à rythmes n’est pas en surchauffe. L’interview se fera une bonne heure après le timing prévu, mais qu’importe, on a écouté Alex Paterson de The Orb nous raconter ses conquêtes montpelliéraines des 90’s dans l’attente (“aaah, french girls”). On retrouve Denis Cohen-Scali, alias Al Core, en tenue de chantier, seul, Radium n’étant apparemment pas fan de ce genre d’exercice. Pas grave, notre interlocuteur gère la conversation pour deux, et a les idées fixes.

Tsugi : Vous vous souvenez de votre premier Astropolis ?

Al Core (Micropoint) : Ouais, super teuf. Sous la pluie, je me rappelle qu’on devait jouer sous des tonnelles, il y avait de la pluie qui coulait sur les platines, c’était rigolo. Je crois que c’était en 2001, mais ma mémoire peut me jouer des tours. Depuis, c’est toujours impeccable, on est bien accueilli, on a l’impression d’être comme à la maison, c’est l’avantage de jouer chez des potes… Gros souvenir du set de 10h de Laurent Garnier en 2004, de la déco de la scène Mekanik par Benalo, et le public brestois quoi…

On joue différemment quand on vient ici ?

Bah ouais. On a prévu un live avec des vieux tracks, tirés de nos deux premiers albums Neurophonie et Anesthésie International. On a rebossé tout le son, c’est beaucoup plus clair, plus clean, et plus fort aussi. Par contre, c’est les mêmes morceaux qu’à l’époque, c’est un live Micropoint des années 90.

Pour un projet hardcore comme le vôtre, ça représente quoi un festival comme celui-là ? C’est le seul festival électro qui propose encore une scène hardcore à l’heure actuelle…

Astro a toujours réussi à conserver ce côté underground, même si ce mot a largement été galvaudé depuis le temps qu’on l’utilise. C’est Manu Le Malin qui fait le directeur artistique de cette scène hardcore, ils lui font entièrement confiance là-dessus et ils ont bien raison vu le boulot qu’il envoie. On tient donc l’un des évenements qui fait encore place aux sons extrêmes, et ils sont rarissimes aujourd’hui. On est en France, ne l’oublions pas, les chansons d’abord.

Vous voyez comment ce revival techno généralisé depuis quelques années ?

C’est du recyclage, ça fait 20 ans que la techno s’auto-digère et se renouvelle, et c’est normal qu’il y ait une nouvelle vague techno aujourd’hui en sachant que c’est le seul sous-genre qui arrive à rester un peu innovant aujourd’hui. Le public s’est énormément renouvelé aussi, aujourd’hui les gens sont moins friands de trucs industriels et extrêmes, et se dirigent davantage vers des sons plus accessibles, à la mode… On est face à une institutionalisation du genre. L’électro est devenue une marque.

Vous le ressentez dans les dates que vous effectuez ?

On a juste l’impression de ressentir une recrudescence de gens qui veulent faire le même son que nous. J’ai du mal à comprendre ça, c’est du french chore copié-collé, pas mieux. Sauf qu’aujourd’hui, ça tourne sur Ableton Live, sans forcer. Remarque, c’est un genre de reconnaissance, mais aussi un signe de baisse de la qualité, qui coincide exactement avec l’augmentation de la quantité de musique produite. Et les gros labels qui produisent de la techno suivent le mouvement. Résultat, tout s’aplanit, pour le meilleur et pour le pire : davantage de public, mais une uniformisation générale. Et dans tout ça, l’underground est un peu en mal d’exister.

La relève hardcore française existe-elle tout de même, ou c’est cuit ?

On reste au niveau de la copie, il n’y a rien d’original. Ça me fait marrer quand on vient nous voir et qu’on nous dit “vous n’êtes pas originaux”. On n’a pas besoin de l’être, nous sommes les originaux. Ces gens-là, j’ai envie de leur dire d’arrêter de nous repomper pour commencer, et d’arrêter de faire du crossover dubstep – frenchore tout le temps. Tenter de mettre du rap dans le mélange, je trouve ça intéressant, voire du chant-guitare. Mais faut arrêter la photocopieuse.

Vous écoutez quoi chez vous le dimanche à 15h ?

Radio Meuh, du Mozart, du speedcore, du jazz, de l’indus, Bashung et deux ou trois chanteurs alcoolos, mais surtout pas de nouvelle chanson française.

Vous avez conscience de l’aspect culte de vos premiers disques ?

Si nous avons pu laisser une grosse trace (et on parle bien de musique) avec ces deux albums, c’est parfait. C’est ce qu’on espérait à la base, même si je joue un peu les vieux cons à râler sur ce qui se passe maintenant je suis tout de même heureux d’avoir laissé une empreinte, qu’on puisse se dire aujourd’hui qu’il existe un “son Micropoint”. Il vaut mieux se faire sucer qu’être le suceur.

Vous avez prévu de faire un side project un peu lounge un jour ?

J’ai des petits projets qui ont du mal à trouver preneur parce que les gens ont du mal à me faire confiance quand je fais un truc en dessous de 160 BPM. On est totalement étiquetés. Mais ça ne m’empêche pas de mener ma barque, je sors dans pas longtemps un truc à 128 BPM, ce qui est quand même archi-lent.

Le sample du vol de mouches dans le morceau “No Choice, Just Suck, Part 3”, c’est bien tiré des mouches qui virevoltent autour des cadavres des ennemis qu’on vient de tuer dans Quake 2 ?

Putain, ouais, c’est exactement ça. Après, j’ai plein d’autres bruits de mouches en magasin, mais celles-là viennent effectivement de Quake 2. J’ai jamais été un gros gamer, je jouais un peu avant que le jeu vidéo ne prenne l’ampleur qu’il a aujourd’hui. Je suis incapable de jouer longtemps, au bout de deux heures maximum je décroche, tous les jeux hyper-scénarisés d’aujourd’hui ne me parlent pas trop. Quake 2, c’est bien, tu pètes tout, y’a pas de scénar. Je suis pas super Zelda, du coup.

Sinon, vous faites quoi dans la vie ?

Producteurs indépendants. Faiseurs de bruit.

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