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Crédits Photos : Vincent Brunner, Judas Companion
30 octobre 2018

Neneh Cherry et Deena Abdelwahed en couv’ de Tsugi 117, en kiosque mardi 6 novembre

par Corentin Fraisse

Surprise. C’est quasiment une première dans l’histoire de ce magazine. Pour ce numéro de Tsugi, vous aurez le choix entre deux couvertures, dressant un pont entre deux femmes de générations différentes, Neneh Cherry et Deena Abdelwahed, dont l’engagement social et politique est au cœur de leur métier. La première, tout au long du bien nommé Broken Politics, évoque les tares de notre société : fascisme, ultralibéralisme, racisme et sexisme. La seconde, avec son rageur premier album Khonnar à la tension palpable, exprime le cri d’une productrice qui a dû attendre ses 18 ans pour se libérer de la chape de plomb familiale, et qui aujourd’hui encore doit lutter pied à pied pour affirmer sa condition de femme, homosexuelle et arabe. À ces deux interviews passionnantes, on peut également en associer une troisième. Celle de Caroline Hervé, alias Kittin. Soutien de la première heure de Tsugi (elle posait en couverture du numéro 1 avec son partenaire de toujours The Hacker), la DJ et productrice se livre comme jamais au micro de Violaine Schutz : crise de la quarantaine, position des femmes dans la musique électronique à l’heure de #metoo, questionnement spirituel. Là encore, une interview importante, qui remet la parole de l’artiste au cœur de notre travail de journaliste, comme le mois dernier avec Autechre ou cet été avec Manu Le Malin. Du sérieux. qui ne nous empêche surtout pas de faire la fête. Rendez-vous le 7 décembre dans notre fief du Trabendo. Nous accueillerons un Tsugi Superclub à tendance drum’n’bass, où le roi Roni Size, dont le dernier passage à Paris remonte déjà à de trop nombreuses années, et la reine Elisa Do Brasil seront accompagnés par les talentueuses Myako et Roman Delore dans un style plus techno breakée. À ne pas rater bien entendu.

Vous retrouverez également dans ce numéro un CD mixé par Deena Abdelwahed, la chronique de notre album du mois signé Shlømo, Dominique Dalcan au blindtest, des portraits d’Antigone, Rendez-vous, Magnetic Ensemble, Kwamie Liv, Chloé qui nous raconte sa passion pour la montagne, un focus sur le retour de la house vocale, une nuit avec Physis Et comme d’habitude votre lot de chroniques, compte‐rendus de festivals, bons plans, tests de matériel et autres rencontres… Retrouvez votre Tsugi, 117ème du nom, en kiosque ou sur notre boutique en ligne à partir du mardi 6 novembre. En attendant, vu qu’on est sympa, voilà le début des interviews de Neneh Cherry par Vincent Brunner :

Neneh Cherry, la force tranquille. Elle a été punk à l’adolescence, membre du groupe de post-punk jazz Rip Rig + Panic, ambassadrice de l’électro-hip-hop européen, égérie trip-hop… Cela ne se voit pas au premier coup d’œil, mais Neneh Cherry incarne à elle seule des décennies de musique. La Suédoise, fille de la peintre Monica Karlsson et du musicien Ahmadu Jah, a pris le nom de son beau-père, le trompettiste de jazz Don Cherry. La musique coule littéralement dans le sang d’une artiste qui refuse le jeunisme et revient avec un album de soul définitivement engagé.

Après avoir mis en parenthèse ta carrière solo depuis le milieu des années 90, tu reviens avec deux albums en quatre ans, Blank Project en 2014 et maintenant Broken Politics

Je deviens plus rapide en vieillissant ! Bon, ce n’est pas comme si je n’avais rien fait entre-temps, il y a eu le groupe CirKus, des collaborations (The Cherry Thing). J’ai toujours vu le processus créatif comme un voyage, plus celui-ci dure longtemps, plus tu collectes de choses. Pour moi, il importait surtout de trouver un endroit – mon espace de liberté donc – où je puisse atteindre une certaine honnêteté. Sinon, ça t’empêche d’accéder aux choses créatives qui sont intéressantes. Après mon troisième album (Man en 1996), je me suis sentie complexée, je réfléchissais trop, j’analysais trop. Quand j’écrivais, je me sentais limitée, prisonnière. Même si avoir du succès est fantastique, c’est toujours à double tranchant. Je commençais à penser à des choses auxquelles normalement je ne réfléchissais pas comme les ventes de disques. “Cet album va-t-il vendre plus, qu’est-ce que les gens attendent de moi ?” Les collaborations m’ont appris à être plus ouverte, elles m’ont aidée à trouver plus facilement l’inspiration et mon stylo.

… La suite à découvrir en kiosque ou sur notre boutique en ligne à partir du mardi 6 novembre ! Et exceptionnellement, le début de l’interview de Deena Abdelwahed par Patrice Bardot : 

Deena Abdelwahed, l’insurrection qui vient

La musique électronique n’a pas pour seul but de faire danser les gens. Avec son premier album Khonnar, la Tunisienne installée en France Deena Abdelwahed révèle des compositions exigeantes, emportées par une rage sourde et la volonté farouche de bousculer l’ordre établi. Et pas uniquement en TunisieIl y a un an (ou presque), à l’occasion de notre numéro hors série d’hiver, nous avions convié Deena Abdelwahed à notre traditionnelle table ronde de fin d’année. En compagnie de Lomepal, Madben et Marie Sabot, la directrice du festival We Love Green, la productrice et DJ tunisienne, désormais toulousaine, apparaissait à la fois sûre de sa force, mais également intimidée. Pas tout à fait certaine d’avoir encore trouvé ses marques dans le grand cirque de la musique d’aujourd’hui. “Oh, il s’en est passé des choses depuis”, nous lance-t-elle en riant quand on la retrouve par une belle matinée d’octobre pour cette interview dans un hôtel de Pigalle, perturbée par un tenace torticolis qui ne vient pourtant pas troubler sa nouvelle assurance. Oui, il s’en est passé des choses depuis… Une résidence à Concrete, des prestations remarquées à Sónar ou à We Love Green (tiens, tiens) et surtout un formidable premier album Khonnar (voir chronique) à l’allure de manifeste personnel. Le cri intense de l’engagement d’une femme qui jusqu’à ses 18 ans a vécu sous le poids d’une écrasante chape de plomb familiale.

Crédit Photo : Judas Companion

La tension palpable qui traverse ton album prend-elle sa source dans ta condition de femme, homosexuelle, productrice électronique et tunisienne ?

C’est un disque rempli de charge émotionnelle, une sorte d’exorcisme. Il fallait que ça sorte pour que je puisse avancer. Ce n’est pas une musique d’ambiance, malheureusement. Je dis “malheureusement” parce que j’aimerai bien à l’avenir produire quelque chose de plus léger. Mais cette musique est aussi la traduction de ce qu’il se passe dans le monde entier, pas seulement de ce que je porte en moi. Il faut que les gens se réveillent un peu. Donc oui, c’est lourd, mais c’est lourd pour tout le monde. Ce n’est pas un hasard si la musique électronique ou le hip-hop sont de plus en plus sombres et de plus en plus engagés, parce qu’il se passe des choses alarmantes autour de nous.

… La suite à découvrir en kiosque ou sur notre boutique en ligne à partir du mardi 6 novembre !

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