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© Benoït Carretier
16 juin 2023

On y était : quand les Pet Shop Boys enflamment l’Olympia

par Tsugi

Vous en connaissez beaucoup de concerts qui réunissent à peu près toutes les générations, mènent le public à l’euphorie et s’achèvent dans une ambiance de boum survoltée (et accessoirement font trembler les murs de la salle) ? On était à l’Olympia 15 juin 2023, pour le concert de Pet Shop Boys, on vous raconte.

La joie communicative n’étant pas la valeur la plus partagée ces derniers mois, il faut savoir savourer la semaine qui vient de s’écouler. Mercredi soir, les Sparks retournaient le Grand Rex avec leur irrésistible pop arty. À 70 ans bien passés, les frères Mael en remontraient à bien des jeunes groupes en termes de présence scénique et d’énergie. Le lendemain, c’était un autre duo, anglais cette fois et un peu plus jeune (à peine la soixantaine), qui s’emparait de l’Olympia. À l’inverse des Sparks, les Pet Shop Boys n’ont jamais connu de retour de hype, ni même connu un succès public en France à la hauteur de leur géniale folie. Trop british pour les Français, trop gay pour les hétéro, trop de synthés pour les poppeux, trop malins pour les radios généralistes. Et pourtant, le duo composé de l’homme-machine Chris Lowe (celui qui fait la gueule tout le temps) et du chanteur Neil Tennant, l’un des plus brillants paroliers de l’histoire de la pop anglaise, draine en France depuis ses premiers pas en 1984, un public fidèle qui ne raterait ses concerts sous aucun prétexte.

Mais l’attente a été longue. La dernière fois que les Pet Shop Boys avaient voulu jouer à l’Olympia, à l’occasion de l’album Super sorti en 2016, alors que le public était déjà installé, le concert avait été annulé pour non-respect de la législation française sur l’utilisation des lasers en intérieur. Ayant changé de promoteur depuis, le concert de ce jeudi soir, sans laser, mais avec un imposant drapeau ukrainien accueillant la foule pour un show spectaculaire, dans le genre comédie musicale de Broadway version hi-tech venait combler une absence parisienne de dix ans.

 

 

Tableau en trois actes, cette étape de la tournée Dreamworld débute dans le minimalisme le plus complet. Les deux hommes, tout de blanc vêtus, trônent devant un écran LED où défilent motifs géométriques et extraits de clips, les claviers de Chris Lowe et deux lampadaires pour seul décor. D’entrée de jeu, le public (extrêmement mélangé et étonnamment familial, composé de garçons bodybuildés en polos trop serrés, de quadragénaires venus avec leurs enfants et de fans généralement au bord de l’apoplexie – mention spéciale à cette femme venue avec sa maman octogénaire, qui a apprécié le show du premier au dernier beat) est rassuré : les murs d’écrans LED coulissants ne vont pas empêcher une débauche de costumes improbables, notamment les deux masques de super héros argentés en forme de H, emblème de cette tournée, que Neil Tenant et Chris Lowe arborent sans crainte du ridicule lors du premier acte. Après sept titres « d’échauffement » (et quels titres, du « Suburbia » d’ouverture à la reprise du « Where The Streets Have No Name » de U2 version hi-NRG en passant par l’inusable « Rent »), le but est atteint : l’Olympia est une cocotte-minute. En un quart d’heure, les personnes assises sont prises de convulsions et se mettent à danser frénétiquement et la fosse s’enflamme. L’écran LED se lève, dévoilant le véritable décor et le trio de musiciens accompagnant les Boys et le concert, qui accompagne Smash, compilation ultime regroupant l’intégralité des singles publiés depuis 1985, prend tout son sens.

Si cette tournée mondiale n’a manifestement pas d’autre but que de se laisser aller au plaisir de la nostalgie, tout en relevant gentiment les compteurs, impossible de bouder son plaisir (si on fait abstraction d’un mix parfois un peu brouillon, dont la voix de Neil Tennant, pas toujours au rendez-vous sur scène, avait du mal à s’extraire). Et le public le sait. Seuls sont joués les singles lors de ce show parfaitement jouissif, et chacun a sa madeleine de Proust. Pour certains, ce sera « What Have I Done To Deserve This« , originellement un duo avec l’immense Dusty Springfield, avantageusement remplacée par une vocaliste au coffre impressionnant. Pour d’autres, ce sera « It’s Alright », reprise du tube plein d’espoir du Chicagoan Sterling Void, la batucada de « Single/Bilingual », la disco-house filtrée de « New York City Boy » ou, en clôture avec « Being Boring » dans le décor minimaliste de la première partie du show, l’indispensable « West End Girls » (dans une version calquée sur le mastermix de Shep Pettibone de 1985, les anciens ont dû apprécier). Mais ce sera souvent tous les titres à la fois pour un public en trance permanente, aussi réactif qu’une préado au premier rang d’un show des BTS. Le spectacle est tout autant dans la salle, qui transpire la joie et le bonheur. On ne citera d’ailleurs pas de noms, mais on a vu plusieurs représentants du petit monde de la musique chanter à pleins poumons, et parfois se lancer dans des chorégraphies hasardeuses à base de moulinets indécents avec leur bras, en particulier sur le très camp « Go West« . Alors bien sûr impossible de jouer la totalité de la cinquantaine de singles du duo dans les deux heures imparties au concert et on regrettera la douloureuse absence de « The Pop Kids« , qui reste pour beaucoup le dernier très grand single du duo. Mais quel concert !

Alexis Bernier et Benoît Carretier

 

pet shop boys

© Benoît Carretier

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