Skip to main content
9 mai 2025

TVOD, MCR-T, Kali Uchis… Les sorties de la semaine

par Oumeyma Aouzal

Sous un soleil de mai qui donne des envies de nouveautés, voilà une virée dans les dernières sorties qui font vibrer nos oreilles. Au programme cette semaine : TVOD, MCR-T, Kali Uchis, Thom Yorke, Mark Pritchard, QUINQUIS, Erika de Casier, Ciel, Submerse, Samurai Breaks, Fixate & Tim Reaper.

 

Mark Pritchard et Thom Yorke – Tall Tales

Et bah, c’est pas trop tôt ! Neuf ans que les fruits de l’alléchante collaboration entre Thom Yorke et Mark Pritchard se font attendre, neuf que leur premier premier titre commun, « Beautiful People » a été publié et que l’on se languit de plus de musique, de plus de magie. Alors certes, les deux musiciens n’ont que faire de nos trémoussement adolescent et notre impatience pourrie gâtée. À leur rythme, ils ont enfin accouché d’un disque magnifique, Tall Tales, exploration des mystères musicaux, où la simplicité se métamorphose en solennité et, au final, comme presque toujours avec ces deux bonshommes, en beauté.

C’est un album long, très long, et pourquoi s’en plaindre puisque nous voici rassasiés ? Il faut alors s’y plonger sans agenda et, surtout, étirer le temps. Un moindre mal compte tenu de la démarche ici déployée, celle de faire durer et durer les intentions artistiques, les paradigmes de base pour les moduler, les briser, les sublimer. D’un côté, donc, Mark Pritchard, grand musicien électronique australien tendance ambient et dubstep, pour faire court. De l’autre, le chanteur de Radiohead à la discographie solo fascinante et à la voix enchanteresse. Tous deux ont un goût prononcé pour le minimalisme, cette manie obsédante de ne jamais exploser par facilité.

Chronique par Brice Miclet, extraite du Tsugi 180

 

QUINQUIS – eor

Chanter en breton, une manière de se démarquer, mais aussi de se comporter de la façon la plus naturelle qui soit lorsqu’il s’agit d’une langue que l’on parle au quotidien. C’est le choix qu’a fait Émilie Quinquis à l’aube des années 2020, après une première carrière sous le nom de Tiny Feet à fredonner en anglais. Pas un virage folklorique pour autant. Son premier album en breton, sorti il y a trois ans, laissait ainsi entendre une pop électronique mélancolique et contemplative qui avait finalement plus à voir avec d’autres productions du label Mute, sur lequel elle avait signé, qu’avec les musiques de sa région.

Même si on pouvait facilement imaginer à travers ses morceaux éthérés l’influence d’Ouessant, île isolée à la pointe du Finistère, balayée par le vent, où vit la chanteuse et musicienne. Une atmosphère que l’on retrouve sur ce second album, pour lequel elle a une nouvelle fois collaboré avec Gareth Jones, producteur anglais réputé, de Depeche Mode et Wire notamment. Le chant est délicat, les arpèges élégiaques et les nappes synthétiques, froides et vaporeuses, glissent vers l’horizon. Et quand le rythme s’emballe, sur « Dec’h » ou « Morwreg« , cela donne un peu plus de relief à ce disque très réussi qui mérite clairement de ne pas s’arrêter à la barrière de la langue.

Chronique par Gérome Darmendrail, extraite du Tsugi 180

 

Slam – Dark Channel 

Qui a dit qu’on ne pouvait pas durer dans la techno ? Sûrement pas Stuart McMillan et Orde Meikle, alias Slam, en activité depuis 1991. Producteurs, DJ, promoteurs, patrons de label (Soma Quality Recordings, bientôt 700 références au compteur), les deux compères savent tout faire et n’ont jamais rien perdu de leur art de retourner les hangars. Leur huitième album, Dark Channel, effectue un impressionnant retour à une techno de béton au potentiel de dévastation assuré. On ressort lessivés de l’écoute de ces dix titres, fourbus mais contents. Ah, la techno écossaise !

Chronique par Tsugi, extraite du Tsugi 180

 

MCR-T – NOT THE SAME ≠ (Deluxe)

En décembre dernier, MCR-T sortait NOT THE SAME ≠, plaçant définitivement Berlin sur la carte de la ghetto tech. Rebondissant, cru, électrisant, il y associe à la funk accélérée de la ghetto house, le bounce de la Miami bass. Plus étonnant, le MC à la voix rauque se livre sur son ascension fulgurante et ses vices : hospitalisation, divorce, limite du burn-out.
NOT THE SAME est donc plus qu’un album enchaînant les « shake your booty » : la sensibilité propre à la ghetto tech semble séduire.

Dans les crédits de l’album, on retrouve au mix et au mastering Krampf, pontife de Casual Gabberz et membre de Live From Earth. Aujourd’hui, sur la version Deluxe de l’album, ce sont les incontournables de la scène électronique qui viennent lui prêter main-forte : DJ MELL G, DJ Gigola, Adrian Mills, MALUGI et CRRDR. Trois nouveaux tracks se cachent dans ce nouveau disque, dont un remix jouissif de George Michael. On vous laisse le retrouver dans cette très belle version Deluxe de NOT THE SAME ≠.

 

 

TVOD – Party Time 

TVOD (pour Television Overdose) est un groupe post-punk originaire de Brooklyn, emmené par Tyler Wright. Formé en 2019 dans l’esprit pur du D.I.Y., le sextet s’est fait connaître par une série d’EPs autoproduits. Aujourd’hui signé chez le label montréalais Mothland, TVOD sort son premier album officiel, véritable concentré de colère, d’autodérision et de fun.

Le groupe new-yorkais livre une série de morceaux tendus et fougueux, entre punk râpeux et post-punk dissonant, porté par des riffs nerveux, synthés tordus et une section rythmique implacable. Enregistré dans l’esprit DIY qui caractérise TVOD depuis ses débuts, cet album reflète toute la tension, l’ironie et la vitalité de la jeunesse.

 

Ciel – Place: Toronto curated by Ciel

Air Texture publie une nouvelle compilation pour célébrer un autre bastion de la teuf : Toronto. Une occasion idéal pour faire appel au service de Ciel, DJ et productrice autant applaudie par !K7 que par Nowdays, le Berghaim, le MUTEK ou Rinse. Dans Place: Toronto curated by Ciel, elle joue les archivistes du présent, exhume des sons qui respirent l’underground et qui font vibrer Toronto.

On passe d’un dub mutant (Gremlinz & Jesta) à une house tapie (Kaspr, Ana Luisa & Geezr), de sonorités électronique savoureusement crado (Ficilio, Cal C) à une techno SM – mais introspective (Measure Divide, Heavymetal). Des titres comme « Green Clementine » ou « Latext and Rose Water » sentent le DIY moite et le studio bricolé. Un disque comme un after interminable, où les émotions sont là, sales et belles à la fois.

 

Arcade Fire – Pink Elephant 

Certains se souviennent certainement de la tourmente qui a entouré le groupe il y a trois ans. Après les accusations de comportements déplacés du chanteur Win Butler, personne n’aurait cru revoir un disque d’Arcade Fire. C’était sans compter l’arrivée du producteur Daniel Lanois dans la carrière du groupe canadien.

Ce complice de Brian Eno met les choses à plat, dynamique salvatrice pour le groupe. Rien ne sert de faire semblant. Un conseil sagement écouté pour cet album Pink ElephantLe rock lancinant rencontre ici des sonorités plus douces, avec toujours et jamais trop loin, une énergie punk et foutraque, mais aussi une énergie de fête triste. Les riffs sont prenants, les voix déchirées. Il ne reste qu’à chacun de juger si Pink Elephant fera office de repentance. Presque un grand disque qu’on a, pour l’heure, un peu de mal à cerner.

 

The Vernon Spring –Under a Familiar Sun

Avec Under a Familiar Sun, Sam Beste alias The Vernon Spring, continue de tracer un sillon singulier dans le paysage du jazz contemporain. Compositeur, producteur et pianiste londonien passé par les collaborations avec Amy Winehouse ou Kano, l’artiste s’éloigne ici des structures classiques pour laisser place à des compositions impressionnistes, mi-organisées, mi-instinctives. Cet album est une suite d’instantanés sonores où se croisent spoken word, field recordings, nappes de violoncelle et touches électroniques, comme des souvenirs flous attrapés au vol.

Certains morceaux offrent un ancrage mélodique plus marqué – notamment ceux avec la voix d’aden dans « Other Tongues »  mais l’ensemble reste insaisissable, aussi évanescent que captivant. Plus accessible que ses travaux précédents sans jamais céder à la facilité, cet album condense en moins de 30 minutes, un univers dense et rêveur. Tendresse et paysages musicaux sans carte ni boussole.

 

Kali Uchis – Sincerely

Avec Sincerely, Kali Uchis signe le dernier volet d’un triptyque intime, conçu en marge de la frénésie pop, au rythme feutré d’une grossesse et d’une métamorphose personnelle. Loin du clinquant d’Orquídeas, elle revient à une soul moelleuse, presque murmurée, qui s’adresse moins aux corps qu’aux âmes. C’est un disque de replis gracieux, où chaque titre semble écrit en italique, au stylo plume. Sans featuring ni fioriture, Kali Uchis taille dans le silence pour en faire du velours. On pense à Aaliyah, à Sault et on en garde une caresse sonore à écouter seul, au crépuscule.

 

À lire également sur Tsugi.fr : Djrum, fou de vinyles | PORTRAIT

 

Visited 135 times, 12 visit(s) today