La productrice française Romane Santarelli revient avec un deuxième album, OK:KO, plus ouvertement dancefloor. L’occasion de s’entretenir avec une artiste qui n’a de cesse de se remettre en question. (La chronique de ce nouvel album est à retrouver plus bas dans cet article)
Lorsqu’il est paru à l’été 2022, Cosmo Safari, le premier album de Romane Santarelli, a rapidement connu un joli succès d’estime. Il faut dire que cette techno légèrement volatile, ces incursions vers la grande famille de l’électronica et un certain sens de la beauté laissent difficilement indifférents ceux qui chérissent les disques soyeux et denses.
Alors, au moment de sortir son second effort, la productrice auvergnate ne le cache pas : «C’est assez vertigineux. Le premier album, tu le prépares sans le savoir depuis tes tout débuts. Il y a des morceaux présents sur Cosmo Safari dont les esquisses sont nées quand j’avais 18 ans. » Pour le deuxième, il faut repartir à zéro.
Attablée à une terrasse de café donnant sur la place parisienne de la Bastille, Romane Santarelli parle pour la première fois de son nouveau bébé, un exercice introspectif toujours un peu ardu, puisqu’il s’agit de mettre des mots sur une démarche artistique personnelle et des mois de travail. Un bandana vert enveloppant ses cheveux blond blé, des yeux d’un bleu perçant, et avec une grande décontraction, Romane Santarelli affronte avec lucidité la période qui précède la publication d’un projet, où l’excitation côtoie l’appréhension, et où la peur de décevoir hante parfois les artistes.
Qu’elle se rassure : OK:KO, c’est son titre, est une réussite. […]
La suite de cet article à retrouver dans le Tsugi Magazine n°183
Romane Santarelli – OK:KO (YOTANKA)
Au XVIIe siècle, le philosophe néerlando-portugais Baruch Spinoza définissait la notion de joie par l’augmentation de la puissance d’agir comme un état permettant à l’humain de passer d’une moindre perfection à une plus grande. Il y a de la joie, au sens spinozien du terme, dans le deuxième album de Romane Santarelli, intitulé OK:KO.
Un optimisme audible dès les premières notes de synthétiseurs, dès les premières nappes, annonciatrices d’un disque dans lequel la productrice française s’adonne à une petite célébration sonore. Foncièrement électronique, ce second effort tranche avec les belles errances de son prédécesseur, Cosmo Safari, qui avait placé son autrice sur la carte des musiques assistées par machines et l’avait vue tourner dans un paquet de salles et de festivals depuis 2022.
On retrouve bien ici ce goût des textures et de l’assemblage pointilleux, à pas mal de différences près, puisque OK:KO est, entre bien d’autres, né de la guérison de son autrice par la danse. Oui, ici, les rythmes s’accompagnent de pas, et peuvent tout à fait s’inviter dans la pénombre et la frénésie des clubs. Même dans ses instants les plus tendus, cet album n’est pas précipité dans la noirceur.
Les couleurs musicales les plus ternes sont au contraire mobilisées avec une touche de gaité, avec cette joie, encore elle, aussi traduite par des titres de morceaux faits de jeux de mots. Romane Santarelli s’amuse tout en proposant un disque dense et sinueux, bourré de références implicites aux musiques électroniques anglaises, de tracks breakés rappelant parfois les bandes originales de la franchise de jeux vidéo wipEout.
Elle chante aussi. Sur le titre «Physio», la productrice change de casquette artistique pour conter textuellement d’autres sentiments, sensuels en l’occurrence. Il y a cette sensation qu’elle ne se prend jamais totalement au sérieux, se fait adolescente sur le morceau «Te Quiero Verde», sans pour autant masquer ses aspirations, dont la plus évidente est, certainement, de proposer un très bel album. Validé par Spinoza.
Par Brice Miclet