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25 avril 2020

Alors, on en pense quoi du retour de Woodkid ?

par Marine Normand

Alors que tous les DJs et musiciens du monde entier bidouillent à l’iPhone des Facebook Live à ne plus savoir quoi en faire (pitié, pas encore une reprise de Bon Iver à la guitare acoustique), Woodkid prend le contre-pied et sort d’un silence de sept ans en plein confinement avec l’ultra-léché « Goliath ». Le clip était diffusé sur YouTube en avant-première hier à 18h.

Le pari est grand avec cette sortie tonitruante de « Goliath » : tenter de créer encore l’événement autour d’un clip, support qui ne fait plus autant frémir qu’à l’époque des belles années MTV (ah, ce Making the Video pour “My Love Don’t Cost A Thing” de Jennifer Lopez <3). Et pourtant le clip c’est le point fort de Woodkid, aka Yoann Lemoine, qui au début des années 2010 (il y a 9876 ans en ressenti), avait notamment réalisé des vidéos pour Lana Del Rey, The Shoes et surtout pour lui-même avec le mémorable « Iron » (à 81 millions de vues, quand même).

Les années ont passées dans un silence relatif et le modèle Woodkid 2020 se décline ce vendredi 24 avril de la même façon (le premier single était dispo dès le matin) : une production sonore cinq étoiles peaufinée jusqu’à l’extrême, avec ce qu’il faut de violons et de sons venus d’on ne sait où pour donner l’impression d’une musique classique venue du futur. Tout ce qu’imagine Woodkid est sombre, luxueux et aussi soigné qu’une coupe de cheveux d’influenceur avant confinement. Il englobe le tout de sa voix chaude, grave et mélancolique qui porte ses singles, tous aussi tristes que le message “regardez-vous encore Netflix” qui s’affiche après six heures de visionnage de Community (fallait pas mettre toutes les saisons d’un coup).

À 18 heures, et parce que je n’avais rien d’autre à faire de mieux, petite privilégiée confinée avec son travail non essentiel que je suis, rendez-vous sur YouTube pour assister à la première de « Goliath », où le chat rempli de fans de l’artiste (comme à la belle époque de MSN) trépignait d’impatience. Après un décompte, le clip se dévoile et choisit comme personnage principal un mineur (dans le sens qui travaille dans les mines) qui se rend littéralement au charbon, dans un immense camion parcourant le désert à la Mad Max. Comme d’habitude, les images accompagnent comme un gant le single, où les vibrations sonores sont habillées par le frémissement du charbon dans la mine et les plans larges, parfois réalisés en images de synthèse, accompagnent les envolées lyriques de ce Goliath impressionnant.

Dans ce décor très post-apocalyptique (so 2020, mais qui rappelle aussi étrangement « Work » de Ciara pour ceux qui savent), Woodkid confronte l’infiniment grand, les machines, l’industriel, le froid, l’énergie même, représentée par ce charbon qui salit tout. Il l’oppose au petit, l’humain, fort mais potentiellement fasciné, risquant de se faire happer par la lave (qui devient un monstre informe) comme Frodon par les abysses d’Orodruin. Sauf s’il trouve le courage. David contre Goliath, les dominés contre la machine : un sujet d’actualité en attendant le monde d’après. Le clip de « Goliath » s’arrête dans un plan noir brutal : on a vérifié l’espace de quelques secondes notre connexion, histoire de voir si on avait pas bouffé toute la fibre à cause des fichus lives trop bien de Bob Sinclar. « Goliath » s’arrête là, conclusion abrupte qu’a choisi Woodkid et qui laisse penser à une suite ou plusieurs épisodes, grande spécialité du musicien. Rendez-vous à la sortie du deuxième single, en croisant les doigts pour ne plus être encastré dans son canapé à s’enfiler des Dinosaurus.

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