C’est l’album du mois du Tsugi 160 (mai 2023) : Teenagers de French 79 !

Chronique issue du Tsugi 160 : Kid Francescoli / French 79, Marseille trop puissant, est dispo à la commande en ligne et dans tous les kiosques !

Creuser un sillon ou suivre un filon. La différence est parfois ténue, et d’ailleurs, l’un n’empêche pas l’autre. Les deux formules pourraient s’appliquer à Simon Henner, qui depuis son premier album en 2016 sous le nom de French 79, et son hit « Diamond Veins« , semble avoir trouvé la combinaison gagnante. Une association à base d’arpèges synthétiques, de nappes enveloppantes et de mélodies limpides, assez reconnaissable, tout en s’inscrivant dans une tradition space-disco-pop à la française, à laquelle on pourra rattacher Jean-Michel Jarre et le Discovery de Daft Punk, le Moon Safari de Air ou encore Space, évidemment. Elle lui a permis, en plus de décrocher quelques lucratives synchros publicitaires, de devenir l’un des artistes français qui tournent le plus à l’étranger. Alors pourquoi changer ? On se répète lorsqu’on fait moins bien. On progresse lorsqu’on fait mieux, ce qui semble être le cas du producteur marseillais, dont le troisième album, qui arrive cinq ans après Joshua, est sans doute son plus réussi, son plus abouti, quintessence de son style rétrofuturiste sensible, tirant vers une électro-pop légèrement planante, mais souvent portée par un pied entraînant, ou vers ce qui pourrait ressembler à de la musique cinématographique puisant ses influences chez des compositeurs comme Giorgio Moroder ou François de Roubaix. Dans les deux cas, la motivation semble la même : transmettre des émotions.

Finalité essentielle pour l’ancien guitariste de Nasser. Et sans doute l’une des clés de son succès. Sur ce nouvel album, comme suggéré par son titre, il est question d’émotions relatives à l’adolescence, ou plutôt à celles de quelqu’un qui s’en est éloigné et regarde avec mélancolie cette période encore palpable mais perdue, où les rêves sont aussi intenses que la vie. Une thématique qui a été maintes fois abordée en musique, certes, mais que le producteur sait retranscrire de façon touchante, avec une certaine finesse, mais également un peu de candeur. Il en faut quand on touche à l’intime. Car derrière les couches de synthés, le côté superproduction électronique (l’album a été conçu en partie entre les studios de Jean-Michel Jarre et celui de Miraval, propriété de Brad Pitt), il y a un adulte qui n’a pas oublié qui il était il n’y a pas si longtemps et qui sait traduire ce sentiment en quelques accords. C’est parfois une simple mélodie, comme en témoigne le poignant « Life Is Like », peut-être le tube de l’album, qui laisse imaginer ce que Fischerspooner aurait pu faire si le duo s’en était tenu à des morceaux comme « The 15th », son épatante reprise de Wire de 2001. L’avenir de French 79 semble plus radieux que celui du duo américain, totalement disparu des radars. Alors peut-être qu’il devra se réinventer par la suite, que ses arpèges finiront par nous épuiser, qu’il se perdra, mais pour l’heure, savourons son album d’éternel adolescent.

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