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9 septembre 2020

#BalanceTonRappeur : le rap français maintenant éclaboussé par des violences sexuelles

par Léonie Ruellan

Après les plaintes déposées par trois femmes contre le rappeur parisien Moha La Squale lundi dernier, une nouvelle accusation sous le hashtag #BalanceTonRappeur a mis le feu aux poudres hier, visant le rappeur belge Roméo Elvis. 

Faut-il s’attendre à un séisme de l’ampleur du mouvement « MeToo » dans le milieu du rap francophone ? Tout a commencé dimanche dernier quand plusieurs témoignages visant Moha La Squale ont été relayés sur les réseaux sociaux. Le lendemain, trois femmes âgées de 23 à 28 ans ont déposé plainte pour violences sexuelles, séquestrations, coups et menaces. De la même façon, hier, une jeune femme a accusé Roméo Elvis d’agression sexuelle via Instagram, avant de partager les messages privés échangés avec le rappeur, dans lesquels il reconnait les faits et cherche à s’excuser. Il n’y a pas eu, pour le moment, d’autres témoignages, ni de plainte déposée.

Mais la polémique en soulève une autre : celle autour de sa sœur, Angèle, qui semble attirer davantage l’attention que son frère, l’accusé, dans cette affaire. Beaucoup dénoncent l’acharnement dont est victime la chanteuse, qui apparaissait en Top Tweet hier et dont la réaction est plus attendue que celle du concerné, Roméo Elvis (qui a réagi en ce début d’après-midi).

Si ces deux accusations prennent une ampleur médiatique importante, d’autres call out plus discrets ont récemment eu lieu sur les réseaux sociaux, visant d’autres rappeurs français comme Retro X et Jorrdee.

 

De la musique électronique au rap, en passant par le rock

Ces derniers mois, plusieurs artistes dans les domaines de la musique électronique et du rock ont été évincés suite à des accusations d’agressions et d’harcèlements sexuels. Pour rappel, en mai, le collectif parisien Qui Embrouille Qui se séparait de trois de ses membres dont l’artiste incarcéré Puzupuzu ; puis début juillet, la star internationale du dubstep Bassnectar accusé d’abus sexuels sur mineures annonçait se retirer de la musique. Le 22 juillet, le label de rock garage américain Burger Records fermait définitivement, après le call out de ses artistes, parmi lesquels on retrouvait des membres de The Fright, The Growlers, The Buttertones, SWMRS, Cosmonauts ou Audacity. Début août, le label de rock indé Sub Pop faisait disparaître Avi Buffalo de son catalogue, accusé de viol par l’ancienne membre du groupe Rebecca Coleman.

 

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Mais les violences sexistes et sexuelles sévissent aussi dans d’autres domaines tels que la musique classique, comme le rappelait le manifeste du collectif anonyme #MusicToo créé en juillet, citant les témoignages que livraient Camille et Julie Berthollet (violoncelliste et violoniste) en février.

Sur les réseaux sociaux, #MusicToo a apporté son soutien aux victimes qui ont déposé plainte contre Moha La Squale, mais ne s’est pas encore exprimé à propos de Roméo Elvis. Il n’est d’ailleurs pas trop tard pour envoyer vos témoignages à #MusicToo, via ce formulaire jusqu’au 30 septembre.

 

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Soutien et merci à @romf_ qui a osé dénoncer les violences du rappeur Moha La Squale, et a reçu des DM accablants d’une vingtaine de ses ex, en ligne dans sa story permanente. L’un d’entre eux a été envoyé par Luna, qui a inspiré au rappeur la chanson « d’amour » du même nom. Elle écrit à @romf_ : « il m’a écrit Luna alors qu’il passait son temps à me hurler dessus (…) à être super violent avec moi, humiliant… « pour moi t’en as chié » c’est clairement explicite, j’en chiais chaque jour parce qu’il me frappait. Ca me tue de voir des jeunes filles chanter ça comme une chanson d’amour aujourd’hui. » J’ai grandi avec l’idée qu’aimer, c’est ce qu’y a de plus beau (monter si haut, toucher les ailes des oiseaux, être bien hétéro, tout ça). J’ai grandi avec l’idée que si un mec ne t’aime pas, en tant que meuf, tu ne vaux rien. J’ai grandi avec l’idée que pour être romantique, l’amour devait faire mal, physiquement et moralement, et que les « bad boys » étaient bien plus sexy que les « gentils garçons ». J’ai entendu dire et j’ai dit des trucs comme « j’aime bien quand ça fait un peu mal » ou « il est trop gentil, c’est chiant », parce que j’ai grandi avec l’idée que respecter les femmes était une preuve de faiblesse et que la faiblesse était la boule noire de la virilité. Je ne suis pas la seule. Toutes les femmes de toutes les générations grandissent partout dans le monde avec ce même mode d’emploi de la love tatoué dans l’inconscient : plus un mec te maltraite, plus il t’aime, et plus tu dis merci. Ce mode d’emploi nécrose l’estime de soi des femmes et encourage les hommes à les traiter comme ils n’oseraient pas traiter leurs baskets : il est temps d’en changer. Il est temps de cesser de regarder ailleurs quand les femmes parlent, de faire comme si on n’avait pas entendu, comme si on ne savait pas, comme si tout ça n’était que de l’art et qu’on pouvait effectivement dissocier l’homme de l’artiste. Lui-même ne dissocie rien puisque son art parle de l’homme qu’il est. Moha La Squale n’est pas un artiste maudit ni un bad boy sexy : c’est un pervers qui doit être tenu responsable de ses actes.

Une publication partagée par Fiona Schmidt (@thefionaschmidt) le

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