Cabaret Vert, 4 jours in the Gangsta’s Paradise | LIVE REPORT
Pour cette année 2024, le Cabaret Vert a accueilli 107 000 festivaliers, record pour une édition de quatre jours. Une nouvelle fois, la programmation musicale était particulièrement aboutie. Et ça devient une habitude, l’écrin électronique qu’est le Greenfloor a accueilli une line-up faite de grandes têtes d’affiches comme Paula Temple, Olympe 4000, Rouhnaa… Pour notre plus grand bonheur.
Avant de parler musique, plantons le décor. Le Cabaret Vert se déploie à Charleville-Mézières, au beau milieu des Ardennes, autour d’un site industriel désaffecté : la Macérienne. Des vestiges de cette époque demeurent les usines – inscrites aux monuments historiques – qui ont pour projet d’être réhabilitées dans les années à venir, afin de redynamiser l’économie locale. Pour le moment, un des bâtiments était dédié aux 2 500 bénévoles présents lors du festival. La Meuse traverse et divise le spot en deux parties. D’un côté, quatre scènes dont la Zanzibar alias la scène principale, puis une fois une passerelle passée, on accède au Greenfloor où se mêlent rappeurs le jour, et artistes électroniques la nuit venue.
Comme vous vous en doutez, c’est ici que nous avons le plus passé de temps, en raison de sa line-up, mais aussi pour son atmosphère assez unique. En bordure de fleuve, la scène est jonchée par des arbres. On s’est sentis petits. On n’était pas seuls dans cette aventure, puisque Tsugi Radio a planté sa tente, près du Greenfloor et a notamment eu l’occasion d’échanger avec Ippon, Molecule et Olympe 4000. Vous pouvez retrouver leurs interviews et leurs lives dans une playlist (disponible sur Soundcloud et sur toutes les autres plateformes de podcast).
Lors de la première journée, on s’est frayé une place pour voir Blondshell. Il semblerait qu’elle ait ramené avec elle le soleil californien, ainsi qu’un bagage rempli d’anecdotes amoureuses. Peu après son concert, le soleil tombait déjà. Coïncidence ? Non assurément. Les arbres – illuminés par des spots – arboraient tantôt des teintes violettes, tantôt bleutées. À rebours de cette palette, PJ Harvey avait opté pour une longue robe blanche, pour une prestation des plus charismatiques. On l’admet, on a eu les frissons sur ‘To Bring You My Love‘.
Il était enfin temps de se rendre au Greenfloor pour le set de Tatyana Jane. On a tapé du pied sur des tracks aussi éclectiques que jouissifs. Elle a même joué son dernier remix de ‘She Got That Gooey‘. Et que dire de cet edit maboule de ‘Murder on the dancefloor’? Phénoménal.
Derrière nous, un groupe d’amies rigole : ‘Madame, madame !’ crie l’une d’elle. En face, leur ancienne professeur de lycée, une cigarette roulée à la main : ‘C’est du CBD les filles, promis !’ rétorque-t-elle. ‘Alors c’est quoi votre programme madame ?’ ‘Je vais écouter Fontaines D.C. et après j’attends Paula Temple !’ Bon planning, même si une escale vers le set d’Olympe 4000 s’impose. Et quel set. Les BPM se sont très vite emballés pour former une déferlente uk garage, break agrémenté de basses (très) sombres. On se souvient encore de ce remix du ‘Gangsta’s Paradise’ de Coolio.
Si on avait émis des réserves sur le concert des Fontaines D.C. au Sziget Festival, le trio irlandais s’est plus que rattrapé ce soir au Cabaret Vert avec un concert où il a réussi à créer une belle émulation collective grâce notamment à ses derniers titres ‘Here’s the Thing‘ et ‘Starbuster‘ avant d’enchainer sur leur classique ‘I Love You‘. On a clôturé cette première nuit au Cabaret Vert sur un set un peu (beaucoup trop ?) énervé de Paula Temple.
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Le deuxième jour offrait une prog’ plus qu’intéressante, et majoritairement féminine. À 19h, VANILLE nous a donné l’impression qu’il était déjà 5h du matin, avec sa techno hypnotique. On a migré vers la Zanzibar pour voir Shay. ‘Pendant soixante minutes, vous êtes à moi’. Nous l’avons pris au mot et sommes restés scotchés par sa performance et celle de ses danseuses. Elles ont enchainé les chorégraphies sur un rythme effréné autour d’une scénographie rappelant un échafaudage, tout était millimétré et réalisé à la perfection.
On a retraversé la Meuse pour écouter COUCOU CHLOE. Durant son live, COBRAH l’a rejointe pour interpréter un de ses titres phares, ‘WIZZ’. L’artiste suédoise a livré quelques heures après, un show dantesque où l’on a pu crier les morceaux, entre beaucoup d’autres ‘Brand New Bitch’ et ‘Good Puss’.
Après une brève pause dinatoire, il était temps d’écouter le trio irlandais Chalk. Le moins que l’on puisse dire c’est qu’il manie admirablement prods technos et rock. Si bien qu’on ne savait plus si on avait atterri à Berlin ou dans les Ardennes. Le jour-même, le groupe était nommé dans la catégorie ‘Best performer live’ (Meilleur interprète en live) aux Aim Awards (Association des Musiques Indépendantes est un label) et on comprend pourquoi. On pourrait également longuement discuter du live de LSDXOXO, on a été transporté par son énergie et par ses morceaux aux sonorités ‘club’ et ghetto house.
On a terminé avec ADIEL, basée à Rome, qui a largué bombe sur bombe avec une techno ultra énergique. Bien sûr, nous n’allions pas passer à côté de SCH. Difficile d’ailleurs de quitter le concert, tant l’ambiance était survoltée. Mais on ne pouvait pas rater Irène Drésel, et on n’a rien regretté : au-delà d’une foule complètement conquise par ses titres captivants, teintés de percussions et d’une belle progression vers la fête, on a (bien évidemment) aperçu une myriade de fleurs.
Cabaret Vert et gadoue, grande histoire
Ce samedi, tout le monde avait accordé ses tenues. Ponchos, supplément bottes en caoutchouc pour les plus prévoyants. Oui, la météo s’est sacrément corsée. L’été incertain (et surtout du Nord de la France) est revenu avec la pluie. Mais ça n’a pas entaché le moral des festivaliers, qui ont pris tout ça avec philosophie. ‘Oh, j’ai de la boue partout sur le visage’ montre un jeune homme à son amie qui lui répond sobrement ‘Tranquille, ça te fait un masque gratuit’. De retour au Cabaret Vert, les pas de certains étaient hésitants, les chutes inévitables pour d’autres.
On a assisté à des sets et des concerts qui ont su nous rebooster. Yamê a su créer une connexion assez folle avec son public, comme d’hab finalement. Rounhaa nous a mis une bonne tarte, et on a eu gros coup de coeur (encore) pour la DJ-productrice parisienne Urumi. Elle nous a fait oublier la pluie diluvienne à renforts de hardtechno et de pointes de hip-hop grâce notamment aux remixes de ‘XO Tour Llif3‘ de Lil Uzi Vert et attention – roulement de tambour – de ‘Gangsta’s Paradise‘ (trois remixes différents dans le week-end, autre record au compteur du Cabaret Vert).
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Petite excursion – loin d’être reposante – vers la scène Razorback pour voir (de loin) Red Fang. La formation stoner a réussi sans grand souci à amasser une foule compacte chauffée à blanc, dès les premières notes de ‘Wires‘, puis on est retournés illico au Greenfloor pour le duo de DJs français surexcité Jersey, avant d’enchainer sur une soirée d’anthologie. Le duo Justice (notre hors-série est toujours dispo ici), a fait son entrée sur les coups de minuit. La scénographie et le travail des lumières était captivant. On a hurlé (littéralement) les titres ‘Neverender‘ et ‘One Night/All Night‘ issus de leur dernier album Hyperdrama. L’heure défile, on se dépêche d’aller écouter Gabber Eleganza – connu notamment pour son Hakke Show – et son set endiablé où on s’est tous enlisé dans la boue en tentant de danser le hakken pour finir avec FJAAK, duo allemand incontournable dans la techno berlinoise. Sacré programme.
Dernier jour au Cabaret Vert, et le soleil a marqué son retour (même si la boue n’avait pas dit son dernier mot). Le temps idéal pour retrouver NEIL FRANCES. Connu pour ses reprises, le duo a sorti son premier album intitulé There is no Neil Frances et dessine un univers électro-popgavé de groove transpirant l’ouest américain. On a poursuivi avec le collectif Nana Benz du Togo, qui nous a complètement électrisé. Puis le Français Molecule a pris le contrôle de la foret et a démontré toute sa versatilité en alternant des morceaux house, progressive et techno. La productrice et le rappeur Mina & Bryte ne se sont pas fait prier pour dynamiter la scène à base tracks dancehall, UK funk et afrobeat.
Et on a fini en beauté sur un concert de Korn, devant la pleine lune… C’était fou, plus encore que l’ensemble à paillettes de Jonathan Davis.
Meilleur moment : Les sets d’Olympe 4000 et d’Urumi
Pire moment : la tristesse de n’avoir pas vu Meryl, qui a dû annuler sa venue en raison du passage du cyclone Ernesto dans les Caraïbes