Chronique : Julianna Barwick — Nepenthe

Une jeune femme bla­farde aux cheveux raides inter­minables qui porte des robes médié­vales et s’entraîne à longueur de journées les yeux per­dus dans son fond d’écran licorne à imiter le chant des sirènes. C’est un peu comme ça qu’on imag­ine Julian­na Bar­wick et si ça peut prêter au ricane­ment c’est sans compter sur la magie sere­ine qui émane de ses enregistrements.

Son troisième album, Nepenthe, n’est pas une révo­lu­tion par rap­port aux deux précé­dents, Bar­wick donne tou­jours dans un genre d’ambient vocal élé­giaque, empile des couch­es de voix évanes­centes et ultra-réverbées, ne trou­blant cette quié­tude que de quelques notes de pianos épars­es ou d’autres instru­ments joués par ses nou­veaux amis islandais de la bande à Sig­ur Rós (chez qui elle a enreg­istré cette nou­velle odyssée). Le nepenthès désig­nait chez Homère la bois­son don­née à Hélène après son enlève­ment pour lui faire oubli­er son pays natal. C’est tout l’effet de Julian­na Bar­wick : elle nous fait oubli­er d’où l’on vient. Avec elle nos pieds décol­lent et on plonge sans s’en ren­dre compte dans un état de semi-conscience léthargique. On se demande même si en ressor­tant de ce cocon coton­neux la vie n’est pas un peu plus douce.

Nepenthe (Dead Oceans/Pias)