Dans un atelier ‘initiation au mix’ avec Les Femmes s’engagent
« Les femmes s’engagent », dispositif pour plus d’égalité dans les musiques actuelles, propose depuis l’année dernière des ateliers d’initiation au mix en mixité choisie (pour les femmes, personnes trans et non-binaires) à la Machine du Moulin Rouge. L’occasion de devenir des pros du DJing ! On y était, on raconte.
Par Oumeyma Aouzal et Lisa Giroldini
« Les femmes s’en mêlent » a été créé en 1997, pour une meilleure représentation des femmes dans le monde de la musique. Une initiative née d’une volonté d’augmenter la présence des femmes et des artistes LGBTQIA+ sur les scènes de musique actuelle. Avec plus de 500 musiciennes et compositrices programmées depuis 27 ans, le dispositif a permis de découvrir des figures majeures comme Christine & The Queens, Jeanne Added, Emilie Simon, Yelle, Regina Spector, Nouvelle Vague, Courtney Barnett ou encore Irène Drésel.
Voir cette publication sur Instagram
Il est 16 heures ce mercredi 27 novembre, quartier Pigalle. On est accueillies par Adriana Rausseo, co-programmatrice du festival. Elle nous explique le concept des Femmes s’engagent : « C’est une espèce de boîte à outils collaborative au sein des Femmes s’en mêlent, dont l’objectif est de proposer des actions gratuites pour les femmes et les personnes minorisées dans la musique : pour mieux les inclure. En gros, on travaille pour la visibilité des artistes femmes et LGBTQIA+. L’objectif, c’est qu’il y ait sur scène plus de personnes qui représentent vraiment la diversité de la société, et sa richesse. »
Une dizaine de participant.es entrent dans La Machine, échangent sur leurs vécus respectifs et évoquent leur lien au DJing. Une proximité se met en place rapidement, favorisée par l’excitation ambiante et l’impatience de commencer. Ces ateliers ont débuté l’année dernière, en partenariat avec Petit Bain et le collectif Moove Ur Gambettes. Adriana Rausseo se souvient : « On avait proposé des ateliers en initiation et perfectionnement et ça a été un carton. Il y avait plein de monde, très tôt le matin en plus ! Là on a compris qu’on répondait à un besoin. »
Une fois entré.es dans la Machine, lieu de fête étrangement vide contrairement à l’effervescence à laquelle on est habituées en soirée, il faut encore descendre quelques marches pour rejoindre la Chaufferie où se tient l’atelier.
« Les femmes s’engagent » avec Address Hymen
Dans la Chaufferie, on est accueillies par Amandine et Violette du duo de DJ Address Hymen, en charge de l’atelier. Depuis huit ans, elles mixent un mélange de UK bass, de ghetto house et d’afrobeat. Habituées aux initiations au mix avec leur atelier « Monte ton DJ set », elles ont été repérées sur les réseaux sociaux par Adriana Rausseo.
Débute alors une présentation individuelle, plus ou moins assurée selon la timidité de chacun.e à oser dire son manque d’expérience. « Au début, il y a quelques questions pour les participant.es, pour savoir ce qui les a amenées ici. Et mine de rien ce qu’on constate, c’est que c’est parfois le moment où elles disent ‘Moi j’ai mixé qu’avec des gars, du coup j’ai connu telle ou telle galère' » explique Adriana Rausseo. « La mixité choisie, c’est plus qu’un cours pratique ou théorique. C’est aussi un espace qui ouvre des possibilités d’expressions autres que juste artistiques ».
Amandine commence par décrire le déroulement de ces trois prochaines heures à passer ensemble : « On va commencer par de la théorie, afin de bien comprendre comment fonctionne le DJing et les platines, en détaillant la fonctionnalité de chaque bouton. Puis place à la pratique où chacun.e d’entre vous aura l’occasion de mixer par binômes. »
Une fois tout le monde installé studieusement sur des tabourets de bar, le cours commence. Une leçon dense, au cours de laquelle elles décrivent d’abord le logiciel rekordbox nécessaire au mix, avant de présenter plus directement les machines. Les conseils affluent : comment choisir l’amplitude du bpm, comment caler correctement le deuxième platine sur la première, comment danser sur la musique et taper du pied pour s’aider rythmiquement… Ou encore comment « faire de la place » sur un track pour en fondre un autre de manière fluide.
Les DJ expliquent aussi le rôle des potards pour jouer sur les aigus ou les basses, la praticité du « cue » pour répéter rapidement une séquence de son, ou encore l’importance d’avoir son casque sur une seule oreille pour entendre également le son « façade » projeté au public.
Le grand saut pour DJs en herbe
Place à la pratique. « Alors, qui veut appuyer sur play ? » Silence, tout le monde recule d’un pas. On mettra ça sur le compte de la politesse. Elles éclatent de rire, et enfin l’une d’elles se lance. « Là vous voyez, le son ne sort pas. Pourquoi à votre avis ? » questionne la DJ avec pédagogie. Les participant.es cherchent ensemble la solution, tentent de dompter les platines. Après des débuts un peu chaotiques, tout le monde trouve finalement ses repères et s’amuse. « C’est en s’entraînant encore et encore qu’on se fait les dents! » plaisante Amandine. Et alors qu’une participante s’excuse de ses maladresses aux platines, une autre répond du tac au tac : « On est là pour ça, c’est le principe d’une initiation ! (rires) »
« Violette et moi, à nos débuts on aurait adoré que quelqu’un vienne nous donner des conseils, nous aide à prendre confiance en nous et nous apprenne à réaliser des DJ sets »
« Comme le DJing touche au matériel informatique, c’est souvent associé à une pratique d’hommes. Mais bien au contraire, nous, avec ces ateliers, on veut permettre à toutes d’oser, d’être à l’aise et de prendre confiance. » explique Amandine.
Derrière ces ateliers, l’idée de transmission est la valeur première pour ces femmes. Elles répondent aussi à une question de classe : qui peut s’acheter des platines pour pratiquer chez soi ? Entre manque de moyens et réflexe de se sous-estimer, les participant.es peuvent ici trouver un espace où découvrir la pratique et s’entraîner sans jugement.
La séance se termine, les remerciements pleuvent. En se séparant, certain.es créent des groupes WhatsApp pour rester en contact… et pourquoi pas un jour mixer ensemble ?
À lire aussi sur Tsugi.fr : Le ministère de la Culture lance le label ‘Club Culture’
Par Oumeyma Aouzal et Lisa Giroldini