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28 novembre 2024

Endless Dive : « S’écouter et aller là où la musique nous mène » | INTERVIEW

par Oumeyma Aouzal

Endless Dive, c’est un groupe belge oscillant entre post-rock et musique électronique. Et il revient en force : après trois albums et des dizaines de concerts en Europe, Pierre Van Vlaenderen et Nathan Mondez nous ont parlé de Souvenances, leur nouvel album prévu en février 2025. Au programme ? Sons nostalgiques issus de vieilles VHS, un duo à fond derrière les ordis, et une énergie intacte pour des shows live à quatre. Rencontre avec deux passionnés qui ne lâchent rien.

Endless Dive, c’est l’histoire d’un groupe belge qui a su se faire un nom dans la scène indépendante. Fondé en 2015, le groupe mélange les sonorités post-rock, électroniques et atmosphériques avec une énergie émotionnelle qui transcende les genres.  Aujourd’hui réduit à un duo composé de Pierre Van Vlaenderen et Nathan Mondez, le groupe revient avec Souvenances, un album prévu pour février 2025. Plus introspectif et nostalgique, ce disque mêle guitare classique, musique électronique et enregistrements de leur enfance, tout en préservant l’énergie qui fait leur signature.

Endless Dive

© Pochette album

 

Après le départ de deux membres fondateurs, comment avez-vous abordé la transition vers une composition centrée sur la production en duo ?

Au début, on a tenté de composer comme quand on était quatre : en nous retrouvant au local de répétition. Mais rapidement, on s’est rendu compte que ce format ne fonctionnait plus. À deux, les idées venaient moins facilement, et les sessions tournaient souvent à vide. Parfois, Pierre faisait de la route pour qu’on se retrouve, et on repartait sans avoir avancé. On a changé de méthode : chacun travaillait de son côté, enregistrant ses idées sur ordinateur, puis on partageait nos créations. Une fois que chacun avait assez de matière, on se retrouvait au local pour construire les morceaux ensemble. Cette approche nous a permis de retrouver une dynamique productive.

 

Souvenances est le premier album en duo et marque un virage musical, avec l’intégration de guitare classique et de musiques électroniques. Qu’est-ce qui vous a inspirés à explorer dans cette direction ?

Pierre : La guitare classique était déjà présente, avant même qu’on décide d’explorer la thématique des souvenirs d’enfance. J’avais quelques idées qui traînaient sur mon ordinateur, je les ai proposées à Nathan. On s’est dit que c’était intéressant d’aller dans une direction différente, un peu comme une parenthèse, pour marquer une transition par rapport à ce qu’on avait fait avant. On cherchait une fraîcheur musicale, et l’ajout de guitare acoustique et de sonorités électroniques semblait être une bonne manière de montrer cette évolution à deux.

Nathan : Le concept de l’album s’est vraiment construit au fur et à mesure. Quand Pierre m’a envoyé ses idées à la guitare classique, je me suis dit qu’on ne pouvait pas simplement les intégrer dans un album traditionnel d’Endless Dive. Cela dit, ce choix reste propre à Souvenances. Ce n’est pas une direction qu’on envisage de conserver sur le long terme, mais plutôt une exploration spécifique à cet album.

 

Pourquoi avoir intégré des enregistrements de votre enfance dans le disque ? Comment cela a-t-il influencé son ambiance ?

Nathan : Lors du déménagement de ma grand-mère, je suis tombé sur une cassette où mon arrière-grand-mère chantait. En l’écoutant, j’ai eu l’idée de l’ajouter à une maquette que Pierre avait composée à la guitare. Ça a été le point de départ du concept. Ensuite, Pierre a retrouvé de vieilles VHS de son enfance, comme celle où son père lui apprend à faire du vélo, qui a inspiré ‘Deux roues’. Ces souvenirs d’enfance sont devenus une base émotionnelle essentielle pour l’album.

Pierre : J’étais d’abord sceptique sur l’utilisation de field recordings, car notre musique a toujours laissé l’auditeur libre d’imaginer ses propres histoires. Mais en entendant la cassette de l’arrière-grand-mère de Nathan, j’ai compris la force émotionnelle de cette approche. On a choisi d’assumer pleinement une thématique, celle de l’enfance et des souvenirs, et de guider davantage l’auditeur. Cela ajoute une dimension personnelle et touchante qu’on n’avait jamais explorée auparavant.

 

 

Quelles ont été vos inspirations lors de la composition de cet album ?

Pierre : J’ai été très inspiré par Saya Gray, une artiste anglo-canadienne-asiatique incroyablement talentueuse. Son album 19 Masters a vraiment marqué ma façon d’aborder la guitare acoustique. Son utilisation de cet instrument est une grande référence pour moi sur cet album.

Nathan : Pour ma part, c’était un peu plus atypique. J’ai beaucoup pioché dans des influences issues du rap américain, comme Suicideboys ou Ghostemane. Ce n’est pas du tout le même style, mais j’écoute beaucoup ce genre en parallèle, et ça a influencé ma manière d’approcher la batterie électronique. En composant, j’ai utilisé plein d’enregistrements de petits sons du quotidien, capturés avec un enregistreur portable, pour donner un côté organique à mes rythmes.

 

L’utilisation de la musique électronique s’est-elle imposée naturellement dans cet album ?

Nathan : À l’origine, c’était l’idée de Pierre (rire). Moi, j’imaginais quelque chose de très orchestral, avec cymbales, tambours et percussions. Mais quand j’ai envoyé une première maquette, Pierre m’a dit qu’il ne voyait pas ça du tout. On a donc progressivement transformé tout ça en version électronique.

Pierre : On voulait donner l’impression que l’album avait été conçu dans une chambre, comme si un enfant l’avait créé. On a inclus des sons du quotidien, comme des bruitages de Game Boy, et gardé certaines prises enregistrées à la maison avec du matériel basique. Ce côté DIY ajoute un grain particulier, en parfaite adéquation avec l’ambiance enfantine et nostalgique qu’on cherchait à transmettre.

 

Votre musique reste énergique et émotive, malgré une approche plus atmosphérique et introspective. Comment avez-vous réussi à préserver cette dynamique ?

Pierre : On a vraiment pensé au live pour préserver l’énergie. Nos concerts ont toujours alterné entre des moments calmes et des passages très intenses, comme des montagnes russes émotionnelles. C’est une dynamique qu’on adore et qu’on veut continuer à offrir. Même si Souvenances est plus introspectif et apaisé, notamment grâce à la guitare acoustique, on a veillé à inclure quelques passages puissants et nerveux, même s’ils sont moins nombreux. Et en live, on adaptera les morceaux pour retrouver cette intensité et cette énergie qui nous sont essentielles.

 

Quel message souhaitez-vous transmettre à travers cet album ?

Nathan : Je dirais que c’est une sorte de mélancolie mêlée à des souvenirs d’une époque révolue. C’est un peu triste de réaliser que cette période de notre vie, qui nous semblait si parfaite, est définitivement derrière nous. Ce sentiment de perte, cette nostalgie, c’est quelque chose qu’on retrouve tout au long de l’album. Par exemple, dans le morceau ‘La petite danseuse’, on entend la voix de mon arrière-grand-mère, ce qui ajoute encore cette dimension émotionnelle liée au passé.

 

Après une centaine de concerts à travers l’Europe, comment vos expériences live influencent-elles votre processus de création ?

Pierre : Le live, c’est une source d’inspiration bien plus profonde que la musique elle-même. Au-delà de l’aspect musical, c’est aussi humainement que ça te nourrit. Les rencontres qu’on fait au fil des concerts, les échanges avec le public et les autres groupes, ça te fait grandir en tant que personne. Et quand tu grandis humainement, ça se reflète forcément dans ta musique. Après, de manière plus concrète, c’est difficile à définir précisément. Par exemple, en ce moment, on travaille sur un clip et on a récupéré des photos d’enfance de nous, mais aussi d’amis et de groupes qu’on a rencontrés en tournée. C’est ce genre de petites choses qui créent des liens sympas et nourrissent la créativité.

 

Vous parlez de proposer un post-rock différent. Qu’est-ce que cela signifie pour vous, et comment espérez-vous que cela soit perçu par votre public ?
Endless Dive

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Pierre : Peut-être que ‘réinvention’ est un mot un peu fort, mais en réalité, on ne se sent plus vraiment dans le post-rock. Quand on a commencé, c’était un genre qui nous intéressait beaucoup, mais au fil du temps, on s’en est un peu éloigné. On essaie maintenant d’incorporer d’autres influences. Par exemple, je me suis mis à utiliser moins de réverbération et de delay, qui sont des effets très typiques du post-rock.

L’idée est de proposer quelque chose de différent tout en restant fidèle à notre essence. Après, on ne sait pas vraiment si le public percevra ce changement comme tel. Ce qui est certain, c’est que cet album est très différent de ce qu’on a fait auparavant, et aussi différent de ce qui se fait habituellement dans le post-rock.

Nathan : C’est pour ça qu’on présente Souvenances comme un album concept, pas comme un virage définitif. Il y aura forcément des réactions variées : certains adhéreront, d’autres non. On pourrait gagner un nouveau public, mais aussi en perdre une partie. C’est un risque qu’on assume, car on refuse de nous enfermer dans un style. À force de répéter la même formule, on finit par s’ennuyer. On préfère s’écouter et aller là où la musique nous mène.

 

 

Quelles sont vos ambitions pour l’avenir, que ce soit sur scène ou en studio ?

Nathan : En studio, je n’ai pas de grandes ambitions spécifiques. Mais sur scène, l’idée serait de jouer à l’étranger, de réussir à jouer aux États-Unis, au Canada, en Angleterre… ce sont des rêves qu’on aimerait réaliser.

Pierre : Ce qui est vraiment chouette avec Endless, c’est qu’on a cette progression naturelle d’album en album, avec de plus en plus de concerts. Notre ambition, c’est que ça continue dans cette direction, qu’on touche de nouveaux publics et qu’on découvre de nouveaux endroits. Et surtout, tant qu’on continue à aimer ce qu’on fait, c’est déjà un gros objectif atteint. On est fiers de chaque album qu’on a fait, et si ça reste comme ça, c’est déjà énorme pour nous.

 

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