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12 octobre 2017

Indochine, Johnny Hallyday, Patricia Kaas, Christophe Maé… Où vont les aides destinées aux jeunes artistes ?

par Antoine Tombini

Sur le papier, les sociétés de perception et de répartition des droits sont géniales. Elles prélèvent une partie des revenus des producteurs, pour les redistribuer dans des projets d’aide à la création et des actions de formations artistiques. D’ailleurs, la loi prévoit que ces organismes doivent reverser 25% des redevances qu’ils perçoivent à des projets soutenant de jeunes artistes. Sous forme de sociétés civiles, elles sont composées d’auteurs, d’éditeurs, de producteurs et d’artistes-interprètes sous tutelle du Ministère de la Culture. Le problème est que, trop souvent, les membres du conseil d’administration de ces sociétés se placent aussi comme bénéficiaires de ces aides, autant dans l’industrie musicale, audiovisuelle, que celle du livre, provoquant alors des conflits d’intérêts difficiles à masquer.

Déjà l’année dernière, le site lelanceur.fr dénonçait l’attribution de ces aides principalement aux majors, à leurs artistes déjà bien en place et surtout plus tout jeunes : Chimène Badi, Charles Aznavour, Eddy Mitchell et Johnny Hallyday, Les Enfoirés ou encore Zazie.

Aujourd’hui, c’est le site lalettrea.fr qui vient de dévoiler les arrangements entre les organismes collecteurs et les bénéficiaires. Ainsi, on apprend que la Société civile des Producteurs Phonographiques (SCPP) a reversé 100 000 euros d’aides à Johnny Hallyday (encore une fois) pour son nouvel album, 123 000 € pour Christophe Maé, et 122 000 € pour Patricia Kaas, tous les trois signés chez Warner Music France. Du côté d’Universal Music France, Roberto Alagna et Gerald de Palmas ont perçu respectivement 80 000 € et 78 000 € tandis que chez Sony Music France, Indochine a obtenu 123 000 €, Julien Doré et Yannick Noah (seulement) 87 000 €. Et il n’y a pas que la SCPP. La Spedidam, qui s’occupe des droits des auteurs-interprètes aurait reversé 20 000 € à Musique Nouvelle en Liberté, association soutenant financièrement des festivals et des formations musicales, présidée par Jean-Claude Casadesus, aussi vice-président de la Spedidam. L’organisme a par ailleurs reversé 55 000 € au Centre des Musiques Didier Lockwood et 13 000 € au batteur Manu Katché, alors que tous deux font partie du conseil d’administration de la société.

Étrange coïncidence ? Et ce n’est pas seulement spécifique à l’industrie musicale. L’audiovisuel et le monde du livre connaissent aussi le même genre d’arrangements. Par exemple, la Société Française des Intérêts des Auteurs de l’Écrit (Sofia), présidée par Alain Absire, a redistribué 72 000 € à l’Association du Prix du Jeune Écrivain. Le président du jury d’écrivains qui délibèrent pour attribuer le fameux prix ? Alain Absire.

De la même manière que les lobbyistes de Monsanto se sont vus interdits l’accès au Parlement Européen, peut-être faudrait-il commencer sérieusement à revoir la législation quelque peu « opaque » de redistribution de ces aides, qui au lieu de donner des opportunités à de jeunes artistes, permet de prolonger la carrière de certains.

 

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