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14 juin 2023

Interview : on a parlé trash, pop, écriture, innocence et ambition avec Kalika

par Vicky Pozzobon

Mélange explosif de sonorités électroniques et d’hyper pop ? C’est bien Kalika et son premier album Adieu les monstres, disponible depuis le 5 mai. Auteure, compositrice, interprète, réalisatrice et j’en passe, la guerrière pop nous a accordé une interview pour décortiquer son premier album. Un entretien intense où elle dévoile les multiples facettes de sa personnalité artistique.

À travers sa musique, elle recrée le chaos tumultueux de son enfance, explorant les méandres de sa propre existence et s’interrogeant sur le passage à l’âge adulte. Kalika nous enchante avec des textes bruts, sans langue de bois et en interview c’est pareil ! (Re)découvrez son univers à La Cigale le 16 juin, et pour les plus impatients voici un petit avant-goût :

 

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Après la sortie de ton EP Latcho Drom tu disais de ta musique : « ce qui est trash, c’est un peu mon univers global. Même s’il y a aussi des codes très pop, c’est toujours très coloré » – tu balances entre le sombre et la lumière, l’humour et les sujets profonds : pourquoi ce paradoxe dans ta musique ?

Kalika : Je suis comme ça dans la vie. Quand je suis confrontée à des situations “hardcore” j’aime bien en faire très vite des blagues. Je ne m’enfonce pas dans mes problèmes ! Je préfère transformer ça à mon avantage -en faire des chansons. C’est pour ça que les sujets sont deep, mais que les sonorités sont lumineuses. Avec une touche d’humour c’est toujours plus facile à entendre ! C’est important de faire passer des messages, que les histoires soient entendues mais ce n’est pas nécessaire d’aller dans le « trash ». J’ai toujours une approche enfantine, je n’ai jamais changé là-dessus. Ça permet de me protéger aussi.

Pour le titre « Sarah et Stéphane », il n’y pas de touche d’humour, j’y suis allée à fond ! Mais là encore dans la mélodie, il y a cette note lumineuse d’espoir.

 

Justement dans le titre « Sarah et Stéphane », tu parles de violences conjugales. C’était important pour toi de mettre en avant ce sujet ?

Kalika : Ce morceau sur mes parents, c’est l’une des premières chansons que j’ai écrites pour mon album Adieu les monstres. C’était il y a presque cinq ans maintenant. Le texte est sorti d’une traite, surement le besoin de mettre des mots sur ce que je ressentais. Mais à ce moment-là, je ne me rendais même pas compte que j’étais en colère contre eux. Ça m’a un peu chamboulée… C’est ce qui explique pourquoi j’ai mis autant de temps à le sortir. Mais dès que je l’ai su, c’est allé très vite ! Je l’ai enregistré en une seule fois, je ne l’ai jamais modifié, je n’arrivais pas à retransmettre la même émotion. C’était pur, c’était vrai… 

Même si c’est la vérité, j’ai gardé beaucoup de beauté dedans. Je suis restée soft -on ne retrouve que 1% de la réalité dans « Sarah et Stéphane ». Ce titre est important pour moi. Mais c’était aussi essentiel de pouvoir donner la parole à l’enfant que j’étais, de donner la parole à tous les enfants qui ne sont pas entendus, qui subissent leurs parents et qui ne sont pas pris au sérieux.

 

Où se place l’écriture dans ta vie ?

Kalika

© Vicky Pozzobon

Kalika : Je passe mon temps à écrire, mes textes sont toujours inspirés de ce qu’il se passe dans ma vie. Dès que je suis dans le flou, dès que je suis face à des émotions qui me dépassent, j’ai besoin de l’écrire, c’est comme un journal intime. Ça me soulage !

 

Tu te mets rarement dans une case, mais quelles sont les sonorités qui t’ont le plus inspirées pour ton album ? 

Kalika : C’est les textures de l’hyperpop qui m’ont le plus inspirée. Mais je ne considère pas du tout ma musique comme telle. Je n’ai pas de limite en termes de création : je pense être une artiste pop mais avec toutes mes influences qui gravitent autour -rock, emo, punk, variété française, hyperpop… Je n’aime pas trop faire comme le voisin d’à côté, même si j’adore son travail.

Je préfère avoir mon propre univers, quitte à être nul. J’ai essayé d’être la plus sincère dans Adieu les monstres, avec une justesse d’émotion, de contrastes. Je préfère partager des sensations plutôt que de me dire « j’appartiens à telle famille d’artistes ». Je raconte mes histoires comme j’en ai envie.

 

Dans le titre « Personne » en feat. avec Youv Dee ou « 18 ans », tu donnes l’impression d’avoir passé un cap dans ta vie, où te situes-tu aujourd’hui ?

Kalika : C’est horizontal, je suis tout le temps un peu partout. Entre l’adulte et l’enfant. Je me mets à des endroits en fonction de mes émotions. Même si tu grandis, l’enfant qui est en toi est toujours là ! Et l’innocence qu’on perd tous en devenant adulte, moi, je le retrouve dans la création : c’est ma salle de jeu. Ce qui est drôle c’est que je joue souvent avec des émotions très sombres. Malgré ça, j’essaye toujours d’apporter de la couleur et des strass. Plus tu comprends, plus tu grandis, plus tu vois le monde tel qu’il est : c’est à dire, dégueulasse. Et même dans ces côtés négatifs, j’essaie de garder une touche d’espoir. 

 

Sur l’album on retrouve deux collaborations : Youv Dee et Yelle. Peux-tu nous en dire plus, pourquoi avoir choisi ces artistes ? 

Kalika : C’est mes artistes préférés en France. Et c’était logique pour moi qu’on collabore un jour ensemble. J’avais ce petit rêve dans un coin de ma tête. Puis la vie est tout de même bien faite -je pense qu’on ressent certaines choses en avance. Un jour, Yelle nous a demandés de faire les premières parties de leurs concerts. Et le feeling est super bien passé. Et Grand Marnier (la moitié de Yelle) m’a dit qu’il fallait qu’on fasse un feat ! Ça s’est fait naturellement. Pour Youv Dee, ce sont les coïncidences qui nous ont amenés à travailler ensemble : un jour il m’envoie un message après la sortie de mon clip « Chaudasse » : « trop drôle, j’ai tourné au même endroit il y a une semaine, et avec un lance-flamme aussi ! » Il m’a dit que mon travail était lourd (rire). Et de fil en aiguille, on s’est soutenus, j’ai écrit « Personne » et j’ai tout de suite pensé à lui ! Et l’alchimie musicale a opéré. Comme moi, il adore mélanger les genres.

 

Et les feats que tu aimerais faire ? 

Kalika : Actuellement, j’aimerais collaborer avec Alice Longyu Gao. Pour moi, elle révolutionne la musique en ce moment. Entre hyperpop, punk et métal. Pour moi c’est presque la nouvelle Sophie. Avec Girli aussi, qui a des sonorités très pop, poprock. En termes de musicalité, ça peut vraiment être intéressant. Dans les artistes francophones, j’adore Poupie. Mais j’attends de voir ce qu’elle va proposer comme nouvelle era.

Comme pour Joanna, si on avait collaboré maintenant, ça aurait forcément moins matché. Je suis dans ma période pop, elle dans une périodé plus dark. Faut vraiment trouver le bon moment ! Récemment j’ai sorti un feat avec Dani Terreur, « Le temps d’avant ». C’est plus de la chanson française, dans la couleur de « Primer Amor ». Avec un clip dont je suis très fière, une inspiration vampirique.

Kalika

© DR

 

Après Adieu les monstres, quels sont tes projets ? Tu aimes entre autres la réalisation et le dessin, souhaites-tu les explorer davantage ?

Kalika : Je suis encore en transition, je sors à peine de l’album. Je me laisse encore un petit peu de temps pour savoir ce que je vais faire de ma vie (rire). J’ai un peu d’avance car j’ai suffisamment de chansons pour une réédition. Mais pour le moment, j’aimerais partir en Inde -j’ai déjà vécu là-bas- pour vivre de nouvelles choses et me retrouver seule avec moi-même. Côté création, j’essaye d’organiser une exposition, mais ça prend du temps. J’ai retrouvé tous les dessins de mon enfance et j’ai pour projet de les faire prendre vie avec le créateur Charles de Vilmorin. En gardant toutes leurs étrangetés ! Le but est vraiment de corréler pleins de niveaux de création -la musique, le dessin, la couture, la vidéo. Et le plus cool, c’est le nombre de collaborations qui gravitent autour.

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