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30 novembre 2021

La passion de Torgull : les feux d’artifices

par Clémence Meunier

Depuis Riyad où il s’apprête à installer un massif feu d’artifice aux côtés de cent quarante collègues, Philippe Daveney, alias Torgull,  légendaire DJ et producteur hardcore, raconte comment il est tombé la tête la première dans le métier d’artificier… En sortant de boîte évidemment.

Article issu du Tsugi 145 : les grandes énigmes de la musique, en kiosque et à la commande en ligne.

« C’était en 2004. Je venais du Rex, je n’avais pas dormi de la nuit. À l’époque, à côté de mes dates comme DJ, je travaillais pour une boîte de roadies sur des concerts. Ce jour-là, par hasard, la mission était différente: je suis allé bosser sur l’installation du feu d’artifice du 14 juillet de la tour Eiffel. J’ai retrouvé la même adrénaline et le même stress que je pouvais ressentir avant de prendre les platines. Le même plaisir une fois que tout s’est bien passé aussi. Après ce premier contrat, j’ai proposé aux artificiers de cette boîte, Groupe F, de me contacter directement pour multiplier les collaborations. Au début, le boulot est très simple: d’autres mettent les bombes dans des tubes et toi tu ne fais que brancher les fils et porter le matériel. Au fur et à mesure, j’ai appris à lire les plans de tir, connaître les produits, les techniques, les processus. Il n’y a pas d’école d’artificiers, tout se fait sur le tas.

 

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Aujourd’hui, je continue à produire et jouer live, et je travaille toujours pour Groupe F, en tant qu’artificier, avec une spécialisation dans les flammes. Faire de la musique pour le plaisir sans avoir besoin d’en vivre me rend beaucoup plus libre artistiquement. Et l’artifice, c’est varié, intéressant, je reste sur la route. Je suis allé installer des feux en Azerbaïdjan pour l’Eurovision, chaque été mon bureau, ce sont les jardins du château de Versailles, j’étais dans la tour Eiffel pour l’anniversaire de ses 120 ans avec les pompiers qui se planquaient à l’intérieur tellement ça pétait de partout. On a tiré sur le Burj Khalifa, la plus haute tour du monde (800 m) et le Burj Al Arab, l’hôtel en forme de voile… Et là je suis à Riyad pour tirer depuis la Mamlaka Tower, cette immense tour en forme de décapsuleur. Au départ, je ne voulais pas me rendre en Arabie saoudite, à cause de tout ce qu’on sait du pays.

 

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Il y a beaucoup de femmes qui bossent chez Groupe F, pour qui il y a quinze ans c’était impossible de venir. Aujourd’hui ça s’est bien amélioré. De la même manière, ça fait quatorze ans que je me rends régulièrement à Dubaï. J’ai vu la ville se développer à une vitesse hallucinante, le climat changer à cause de toute l’eau qui a été ramenée, le côté bling-bling avec des mecs pétés de blé et des nanas avec des tenues que tu ne vois que dans les films. Et moi je les croise avec mes mains dégueulasses. Nous, on voit l’autre côté de Dubaï, on travaille avec les workers de là-bas, des mecs qui vivent à vingt-cinq dans un appartement, envoient tout leur argent à leurs familles restées au pays, et sont souvent traités comme des esclaves. Ma boîte les considère exactement comme nous, mais certains m’ont raconté que quand ils bossent pour telle entreprise anglaise, les managers leur tapent dessus. Littéralement. Via les feux, on est observateurs des évolutions de toute une région, c’est très intéressant. Et ça reconnecte à la réalité. »

Retrouvez plus d’articles dans le Tsugi 145 : les grandes énigmes de la musique, disponible en kiosque et en ligne.
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