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24 février 2017

L’album du mois : Dirty Projectors – « Dirty Projectors »

par Francois Blanc

Extrait de Tsugi 99, à commander ici

On ne le dit pas assez, mais Dirty Projectors est un des groupes les plus importants de la pop indépendante américaine de ces dix dernières années, même s’il reste relativement boudé par le public (surtout en France), comparé à ses confrères Grizzly Bear, Vampire Weekend ou Animal Collective. Un groupe qui évoluait dans son coin, dans un certain calme et sans faire de vagues… Jusqu’à l’après Swing Lo Magellan (son dernier formidable disque, sorti en 2012) : Dave Longstreth, le despote à bord et sa muse Amber Coffman, deuxième voix et guitariste du groupe, se séparent. Ce nouvel album, le septième, s’ouvre sur la terrassante chanson qui, on le comprend, relate cette rupture. Le texte de « Keep Your Name » est d’ailleurs truffé de phrases assassines d’une dureté effroyable : « On continuera séparément et tu peux garder ton nom », « ce que je recherche dans l’art c’est la vérité, ce que tu veux c’est la célébrité », etc. Un morceau dont l’enregistrement a été entièrement ralenti (voix comprises), décuplant sa mélancolie, où Longstreth sample même des paroles d’un morceau précédent où Coffman chantait « we don’t see eye to eye » (« nous ne sommes pas d’accord »). Passé ce premier morceau, la suite ressemble à une longue reconstruction de soi (le second s’ouvre sur la phrase « I was reborn ») truffée d’embûches. Côté musique, le disque est finalement dominé par un enrobage très R&B et funk électronique, tel un D’Angelo blanc futuriste poursuivant ainsi une tradition de Dirty Projectors à composer des arrangements à tiroirs. La voix de Longstreth, déjà particulièrement élastique et ample, est ici constamment trafiquée, comme pour remplacer la richesse des choeurs qui ont fait le sel du groupe et qui ont disparu avec Amber. Un disque passionnant, qui laisse échapper çà et là colère, rancœur et soulagement même quand son artisan semble vouloir tout contrôler. Un disque surtout jonché de morceaux fascinants (« Death Spiral », « Work Together », « Cool Your Heart » écrite avec Solange). Mais l’affaire n’est pas finie : quelques jours à peine après la sortie du single « Keep Your Name », Amber sortait son premier morceau solo… produit par Longstreth, qui en assure aussi les chœurs. Les bruits de couloir disent qu’après avoir essayé mille producteurs, la jeune femme aurait décidé qu’elle ne pouvait travailler qu’avec son ex.

Dirty Projectors (Domino/Sony Music), sorti ce 24 février.

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