Skip to main content
23 décembre 2022

Le coin lecture de Tsugi : 10 livres sur la musique pour passer les fêtes

par Benoît Carretier

C’est une certitude, 2022 a été une année prolifique pour l’édition musicale. Jamais autant de livres sur la musique, tous genres confondus, n’ont atterri dans les librairies. En quête d’un cadeau de dernière minute ou d’un ouvrage dans lequel se plonger pendant les fêtes ? Suivez le guide et pochez dans la liste des livres que nous avons préférés cette année.

 

Tresor: True Stories

Les 30 ans de Tresor, c’est une histoire qui dure. Après le plantureux coffret vinyle 52 titres sorti il y a un an, l’exposition Techno, Berlin und die große Freiheit et le festival Tresor 31, qui a duré près de deux mois l’été dernier, le vénérable club, pionnier de la techno à Berlin, a clôt les festivités avec Tresor: True Stories. Le (beau) livre revient en images sur les premières années de son existence, depuis la découverte de sa future implantation – la salle des coffres de Wertheim, un grand magasin désaffecté situé dans l’ancien Berlin-Est (l’équivalent des Galeries Lafayette avant la montée du nazisme). En 400 pages et autant de photos, flyers, coupures de presse et autres pochettes, l’ouvrage est un véritable voyage à travers le temps (et les looks improbables), qui illustre bien le big bang que fut l’arrivée de la techno dans la ville à peine réunifiée. Des textes signés Dimitri Hegemann, Achim Kohlberger, Johnnie Stieler et Regina Baer (récemment disparue), les quatre cofondateurs du lieu, ainsi que Jeff Mills, « Mad » Mike Banks (alliance Detroit-Berlin oblige), Ellen Allien ou encore Electric Indigo viennent compléter le récit de ces années folles qui ont suivi la chute du mur. Une tranche d’histoire. Tresor: True Stories (Tresor)

livre Tresor : True Stories

 

 

Photodiscographie

livres Photodiscographie

Vous voyez souvent ses brillants clichés dans les pages de Tsugi. Parfois même en couverture, comme ce fut le cas en septembre avec son portrait de Lomepal. Le photographe Philippe Lévy est donc un compagnon de route de longue date de ce journal. Il vient de publier un ouvrage très original qui mérite bien son petit coup de pouce. Pendant un an et demi, il a shooté dans son appartement/studio une centaine de personnalités liées à la musique (de Laurent Garnier à Jessica 93 en passant par Jennifer Cardini) en mode portrait noir et blanc et en leur demandant de choisir un album dans sa copieuse discothèque vinyle (Philippe, incollable sur la cold wave, est capable de chanter à tue-tête du Throbbing Gristle déguisé en Cosey Fanni Tutti) et de le commenter en quelques lignes. Un angle certainement pertinent qui permet de joindre les deux passions de notre ami. Mais quel a été le choix de Laurent Garnier ? Test Dept ou Wire ? Pour le découvrir, une seule solution : investir. N’hésitons pas à affirmer que c’est certainement un bon choix pour un cadeau de Noël (même en retard). Photodiscographie (Art Book Magazine)

 

 

Le Sens de la fête

livres Le Sens de la fête C’est quand elle ne pouvait plus être que clandestine (et encore…) pendant cette terrible période Covid que l’on a compris à quel point la fête pouvait être importante dans nos vies. Pas seulement comme un vulgaire défouloir, mais surtout comme un moteur essentiel du lien social et intime. C’est une évidence à la lecture de ce livre suintant le dancefloor. Son auteur, Christophe Payet, a rencontré pour quinze entretiens des reines et rois de la night, d’hier à aujourd’hui. Ça démarre avec les années Palace, racontées par une de ses physios Jenny Bel’Air, et ça se termine avec le collectif La Créole, roi du twerk à Paris. Entre-temps, on croise Laurent Garnier, Bob Sinclar, Brice Coudert ou Teki Latex, qui témoignent avec passion sur un sujet qu’ils maîtrisent parfaitement et qui bien sûr ne concerne pas uniquement les clubs branchés de la capitale. On apprécie donc que nos belles régions ne soient pas oubliées, avec notamment l’interview vibrante de Vincent Josserand, patron de La Clé des chants, une boîte de campagne de l’Ain, comme on n’en fait (presque) plus. Au fil des pages, une démonstration que le sens de la fête se conjugue bien au pluriel. Le Sens de la fête (Nique Les Éditions)

 

 

Les Années new wave 1978-1983

livres Les Années new wave 1978-1983

 Après son excellente autobiographie Passeur, désormais disponible en version poche augmentée de trois chapitres inédits et d’une nouvelle couv’ signée Blek le Rat, notre collaborateur et ami JD Beauvallet nous plonge cette fois-ci dans les années new wave, entre 1978 et 1983 (on imagine déjà la polémique sur cette datation historique…) avec ce livre au format original. C’est à la fois une sorte de discographie idéale, selon JD, agrémentée de playlists thématiques (Londres, Liverpool, Manchester), mais aussi le récit, parfois très personnel, de ces années si particulières pour la musique, liées à un contexte économique déprimant et une explosion artistique inégalée. Soulignons les angles malins, comme ce gros plan sur les producteurs de l’époque à travers le génial Martin Hannett, ou un décryptage de la fameuse pochette du Unknown Pleasures de Joy Division. On trouve aussi des interviews de certains héros de ces temps troublés : Siouxsie, Morissey ou Mick Jones des Clash. Au final, les néophytes comprendront parfaitement de quoi il retourne, et les professionnels de la question y dénicheront toujours des infos inédites à grappiller. Les Années new wave 1978-1983 (GM Editions)

 

 

Replay New Rose For Me

 Replay New Rose For MeHymne destroy des pionniers punks The Damned, « New Rose » s’est décliné à Paris en 1980 en magasin de disques, puis label. Les deux étant spécialisés en musiques dites alternatives. Ce qui à l’époque, signifiait bien entendu le punk et ses dérivés, où le mot « wave » était placé quelque part. Le cofondateur de cette aventure musicale, qui a laissé des traces indélébiles dans la mémoire musicale collective, Louis Thévenon (son alter ego Patrick Mathé étant hélas décédé en 2018), est à l’initiative d’un beau et gros livre racontant toute l’histoire à l’aide d’une multitude de documents, non seulement sur la boutique et la maison de disques, mais aussi sur les nombreux artistes développés par New Rose. On a une tendresse particulière pour ceux qu’il a aidés à remettre sur le devant de la scène comme Chris Bailey (The Saints), Sky Saxon (The Seeds), Alex Chilton, Chris Spedding, Arthur Lee (Love) et tant d’autres encore. Un splendide ouvrage de souvenirs et de témoignages, richement illustré et conçu par les proches de cette aventure, paraît pour raconter en détail ce moment essentiel dans l’histoire du rock en France. Replay New Rose For Me (Moonboy Books)

 

 

 

Berlin Sampler

 Berlin SamplerHeureux les amateurs d’histoire musicale ! Voilà qu’est réédité le premier volet d’un duo d’ouvrages passionnants – pour ne pas dire essentiels – qui combleront leur soif de connaissances. Paru en 2009 – et épuisé depuis trop longtemps –, Berlin Sampler se veut particulièrement ambitieux, son auteur Théo Lessour retraçant l’histoire musicale de la capitale allemande, traversant un siècle marqué par l’expressionnisme, le Bauhaus, les cabarets, le nazisme, le communisme, la guerre froide, la scène alternative et finalement la techno. Un panorama étourdissant pour une ville à la richesse musicale renversante, qui n’a jamais cessé dans son histoire de séduire la scène culturelle européenne. Le deuxième livre du diptyque, le tout aussi passionnant Detroit Sampler de Pierre Evil (originellement publié en 2014), est annoncé pour le mois de janvier 2023 chez le même éditeur, Le Mot et Le Reste. Hâte. Berlin Sampler (Le Mot et Le Reste)

 

 

 

Rock Strips

 Rock Strips

Qui peut se targuer de proposer dans le même ouvrage soixante-quatre artistes aussi variés que Björk, PJ Harvey, Kraftwerk, Metallica, Arcade Fire, The Libertines, LCD Soundsystem, Mano Negra, Bob Marley, Alain Bashung, Nick Drake ou encore Pixies, croqués par autant dedessinateurs et dessinatrices de BD ? Rock Strips, dont la version intégrale, sous la direction de notre confrère Vincent Brunner, réunit la fine fleur de la BD française (Serge Clerc, Coco, le regretté Charb, Loustal, Luz, Nine Antico, Jean-Christophe Menu, Mathieu Sapin, etc.). En 448 pages, cette édition, qui regroupe les deux volumes d’une série entamée en 2009, plus quatre chapitres inédits, ne s’aventure jamais sur le terrain de la biographie, mais dévoile des histoires courtes – entre deux et six pages –, des récits un peu obsessionnels où chaque bédéiste semble prendre un malin plaisir à creuser la mythologie de chaque musicien et à jouer avec. On ne s’ennuie pas une seule seconde et on se surprend même à dévorer les strips consacrés à des groupes que l’on déteste. Rock Strips – L’Histoire du rock en BD (Flammarion)

 

Hardcore

hardcoreUn ouvrage de Simon Reynolds est toujours en soi un petit événement. Entre récit, histoire et sociologie, chacun de ses livres, depuis Energy Flash à Retromania, jusqu’à Rip It Up and Start Again ou Bring The Noise ausculte avec intelligence la musique indépendante britannique, si possible électronique. Anthologie de textes parus notamment dans The Wire depuis 1992, Hardcore, publié chez Audimat quelques mois après l’excellent Le Choc du glam, est une réflexion passionnée et passionnante sur ce que Reynolds nomme le « continuum hardcore », un flot de genres musicaux où l’on retrouve la drumn’n’bass, le dubstep, le grime ou encore le speed garage, tous friands de breakbeat et de basses. Reynold voit dans toutes ces approches nées dans les villes anglaises multiculturelles (le plus souvent à Londres) une longue histoire commune dont il tire le fil le temps de chapitres courts qui relèvent autant du reportage in situ où l’excitation de la nouveauté est palpable que de l’analyse érudite. On ressort de la lecture avec envie de se replonger dans ces années post-rave gorgées de basses rondes et de rythmiques toujours plus innovantes. Intelligent et dansant donc. Hardcore de Simon Reynolds (Audimat)

 

 

À contre-courant. L’épopée du label 4AD

à contre courant

Qui d’autre que les éditions Allia pouvait publier la version française d’A contre-courant, pavé de plus de 800 pages de Martin Aston consacré au mythique label 4AD ? Personne. Si l’histoire de 4AD, qui reste aujourd’hui l’un des meilleurs labels britanniques, fascine autant, c’est que cette petite maison, arrivé au bon endroit (le Londres survolté du post-punk) et au bon moment (quand les labels indés, à l’image de Factory ou Beggars Banquet, commençaient à toucher un public bien plus large qu’avant le punk), avait pour fondateur et directeur artistique Ivo Watts-Russell, défricheur de talents qui fait éclore toute une scène britannique et internationale dopée au post-punk, à la new wave, aux influences gothiques, au shoegaze ou au college rock américain. Entre 1980 et 1999, période couverte par cet ouvrage passionnant et minutieux, nourri par une centaine d’interviews, 4AD verra défiler des groupes essentiels de la scène indépendante : Cocteau Twins, The Birthday Party, The Breeders, Pixies, Bauhaus, l’incroyable projet collectif ThisMortal Coil… Mais le génie d’Ivo ne réside pas seulement dans l’esthétique musicale de 4AD, il est d’avoir confié la réalisation des pochettes à l’immense Vaughan Olivier, qui marquera de sa patte graphique identifiable entre mille deux décennies de sorties du label. Un disque 4AD était un univers global. Et c’est là toute la magie de ce livre que dévoreront les férus de rock indé britannique : restituer dans le détail et avec passion les vingt ans qui ont fait de 4AD un label intemporel, si ce n’est immortel. À contre-courant. L’épopée du label 4AD (éd. Allia)

 

 

Ice Cold. A Hip-Hop Jewelry History

ice cold

Voici peut-être l’un des plus beaux livres sur la culture hip-hop depuis longtemps. Dans Ice Cold. A Hip-Hop Jewelry History, un ouvrage massif publié par Taschen, l’Américaine Vikki Tobak retrace l’histoire et la symbolique des bijoux dans le hip-hop, photos et archives inédites à l’appui. Depuis les débuts dans les années 1980, avec les pendentifs Adidas en or massif de Run-DMC ou les médaillons Mercedes d’Eric B. & Rakim, jusqu’aux pièces en diamant improbables de la génération actuelle, les artistes ont toujours aimé se montrer et « en montrer », afficher leur style comme leur statut et leur réussite. À la fois beau livre de photos, avec des dizaines de clichés signés entre autres de Wolfgang Tillmans, Jamel Shabazz ou David LaChapelle, plongée chez les joailliers les plus créatifs de ces dernières décennies, et galerie de portraits des artistes hip-hop américains les plus importants de ces quarante dernières années, ce voyage au pays du bling-bling est plus qu’une simple collection chronologique de photos de signes extérieurs de richesse. C’est la preuve par l’image de la prise de pouvoir (et aussi de son grain de folie) du hip-hop, style venu de la rue auquel personne ne voulait s’associer à ses débuts. Et un magnifique livre. Ice Cold. A Hip-Hop Jewelry History (Taschen)

Visited 104 times, 1 visit(s) today