Mais que se passe t‑il dans la tête de Tristesse Contemporaine ?

Paris est une ville de ren­con­tres et de mélange cul­turel, un melt­ing pot pou­vant aboutir à de très jolies choses. La preuve avec la Japon­aise Naru­mi, le Sué­dois Léo et l’Anglais d’o­rig­ine jamaicaine Maik. Voisins dans la ville lumière, le trio s’est alors décou­vert une pas­sion com­mune qui a fait naître deux albums emprunts de rock, de cold-wave et de new-wave tous aus­si délec­tables. Il y a quelques mois, les trois joyeux lurons ont offert leur troisième album Stop And Start. Un long-format pour lequel le groupe a pris beau­coup plus le temps. Con­traire­ment aux deux pre­miers albums très intu­itifs, ils ont cette fois-ci pris le temps d’en­lever et de rajouter des détails et enfin trou­ver le son Tristesse Con­tem­po­raine dans sa ver­sion la plus pure. Album de la matu­rité ? La for­mule est cliché mais c’est claire­ment ce qu’ils nous ont fait com­pren­dre lors d’un agréable entre­tien avec ses trois musiciens.

Tsu­gi : Vous décrivez cet album comme un acte III, peut-on voir ces trois actes comme un seul et même album ?

Naru­mi : Oui c’est une véri­ta­ble trilogie.

Les deux pre­miers albums ont été une sorte de rodage pour vous ?

Maik : Le pre­mier album était très spon­tané, dans le bon sens du terme. On a pro­duit la musique à laque­lle on a rêvé pen­dant longtemps. Les idées nous venaient très vite. À l’inverse, le deux­ième Stay Gold­en était plutôt un album de recherche. On par­le assez néga­tive­ment de ce long-format, pour­tant je n’ai jamais ren­con­tré per­son­ne qui ne l’aime pas.

N : Moi je l’aime bien, mais d’une façon différente.

L : Stay Gold­en est plus pro­pre et plus calme. On joue très peu de ses morceaux en live parce qu’il a des struc­tures un peu bizarre. Le pre­mier album, on ne savait pas ce que l’on voulait et pour­tant le résul­tat est con­va­in­quant. Ici, on savait où on allait, on a fait plus atten­tion, on a réfléchi les morceaux plus longtemps.

N : Exacte­ment. Stop And Start par con­tre c’est vrai­ment un album par­fait pour le live.

Sur ce nou­v­el album, vous avez choisi de rajouter un bat­teur, com­ment l’avez vous choisi ?

M : C’est un vieil ami en fait. On l’a plus choisi pour son ami­tié que pour sa tech­nique (rires)

Sur la pochette de votre dernier album, il y a une femme nue de dos, ça sig­ni­fie quelque chose ?

N : On voulait être sur le disque, mais on a lais­sé carte blanche à la direc­tion artis­tique pour le reste. Lau­rent Fétis, le DA de notre pro­jet, s’est inspiré du Déje­uner sur l’herbe de Manet. Une oeu­vre où la femme est nue et les autres restent habil­lés. Même si la femme est nue, c’est com­plète­ment asex­ué, c’est juste pour la beauté du corps de la femme. Le cliché est vrai­ment superbe, c’est comme un album pho­to, une invi­ta­tion à décou­vrir le reste.

Vous serez au Bad­aboum le 6 avril. Com­ment fonc­tion­nez vous pen­dant vos lives, vous repensez les morceaux, vous les ren­dez plus longs, plus club ?

L : Plus longs ou plus courts cela dépend. Il y a des morceaux qui marchent vrai­ment très bien en live. Un titre comme “Cer­e­mo­ny” par exem­ple, il prend une toute autre dimension.

N : En tout cas pour ce qui est du live, on a énor­mé­ment évolué par rap­port à nos débuts. Quand on y repense on se dit “olala c’était hor­ri­ble”. Pour­tant on était tou­jours con­tent de nous, telle­ment que l’on s’était dit que c’était super impor­tant de filmer !

L : Je sais qu’il existe une vidéo d’un de nos pre­miers con­certs au Pop in, une toute petite salle parisi­enne, je ne l’ai jamais vu mais je sais qu’elle existe (rires)

Math­é­ma­tiques Mod­ernes, Syn­di­cat Elec­tron­ique, Poème Elec­tron­ique, ces noms de groupes cold-wave sont dans le même esprit que votre nom. Ils vous ont inspiré ?

N : Bizarrement, je n’y avais jamais pen­sé ! Math­é­ma­tiques Mod­ernes et tous ces groupes font par­tie de nos influ­ences mais je n’ai jamais fait le lien.

L : Peut être aus­si qu’au moment de choisir notre nom on ne savait pas encore que l’on fai­sait de la cold-wave. Sur le troisième album c’est enfin plus clair, plus iden­ti­fi­able comme tel. Au final, au début on ne savait pas vrai­ment ce qu’on fai­sait (rires)

Vous avez fait remix­er “Fire” et “I Do What I Want” ? Vous comptez le faire à nouveau ?

L : On a fait un remix avec Piloos­ki, mais cette fois-ci on a choisi de ne pas deman­der trop de remix­es. C’est peut-être un peu pré­ten­tieux, mais on a eu la sen­sa­tion qu’il n’y avait rien à changer.

N : Il y a quand même une per­son­ne avec laque­lle on aimerait beau­coup tra­vailler : The Black Madon­na. J’adore ce qu’elle fait et je me demande vrai­ment com­ment elle repenserait nos morceaux.

Vous êtes des adeptes du “less is more”, c’est une manière de faire vivre cha­cun des arrangements ?

M : On ne pense pas vrai­ment comme ça, mais en général je n’aime pas trop les musiques où il y a trop de détails.

N : C’est la ten­dance d’ajouter plein d’élé­ments, mais je pense qu’il faut savoir faire des sac­ri­fices dans les morceaux et avoir la dis­ci­pline d’enlever des choses.

Vous avez util­isé quoi comme instru­ments pour cet album ?

L : Il y a la bat­terie bien sûr, mais aus­si un syn­thé­tiseur Roland SH que l’on a syn­chro­nisé avec une boîte à rythmes TR 808. Il y a beau­coup de titres créés avec cette base, “Cer­e­mo­ny” par exemple.

N : “Get what” aussi ?

M : On l’avait mis mais on l’a enlevé ! (rires)

L : De toute façon on l’a mis sur tous les titres et puis après on l’a retiré… Peut-être sur tous les morceaux !

L : Sinon, on a util­isé deux syn­thés, un kick et un snare, tout le reste passe par des effets analogiques. Cela donne une cer­taine cohérence dans l’album. Si on avait cher­ché dif­férents snare sur chaque morceau l’al­bum aurait été bien trop éclec­tique et un peu brouillon.

Vous par­lez beau­coup de “Cer­e­mo­ny”…

N : Oui parce que il est très représen­tatif de l’album. Sa créa­tion a beau­coup influ­encé le reste des titres.

À vous enten­dre échang­er, vous sem­blez être un groupe en par­faite osmose..

N : On a un moto qui dis­ait “back seat dri­ver” ce qui sig­ni­fie “tous chauffeurs”.

L :  On est tout les trois der­rière en train d’expliquer com­ment con­duire. La com­mu­ni­ca­tion est quelque chose de très impor­tant pour nous. On ne veut pas de leader ou de tête pen­sante. Aupar­a­vant, je tra­vail­lais en stu­dio de pro­duc­tion et j’ai eu quelques mau­vais­es expéri­ences avec des gens dif­fi­ciles. Notre manière de tra­vailler c’est : on a une idée, on la teste tout de suite et on en discute.

N : Je me rap­pelle d’une ses­sion ou je tra­vail­lais par terre. On avait quelques micros et quelques bières, c’était par­fait. Bières que l’on a util­isé pour le morceau “I Did­n’t Know”, il y a un sam­ple de l’un de nous qui tape dessus avec un sty­lo. Ce track, Karl Lager­feld l’a util­isé pour un défilé Chanel. En regar­dant le spec­ta­cle , on pen­sait à com­ment on l’avait pro­duit, ça nous a bien fait rire, le con­traste était assez mar­rant ! Aujourd’hui, c’est peut être un peu moins spon­tané, mais au moins main­tenant on a plus de technique !

Piloos­ki a pro­duit votre album, quelle impor­tance a t‑il eu dans la pré­pa­ra­tion de l’album ? 

N : Au début, on lui avait juste demandé de mix­er l’al­bum. Au final, il nous a beau­coup aidé pour la pro­duc­tion. Il a rajouté des élé­ments, des breaks surtout, un peu trop d’ailleurs. On a batail­lé avec lui pour se met­tre d’ac­cord, mais main­tenant on est très sat­is­fait du résultat.

L : La pro­duc­tion a été un moment long et douloureux, on a dû vrai­ment faire des com­pro­mis, dis­cuter avec Piloos­ki pour savoir ce qu’il fal­lait enlever ou rajouter. Même si ça nous a ren­dus dingues c’était nécessaire !

M : Tu te rap­pelles du sam­ple qu’il a oublié ?

J : Ah oui le “WooooWOoooWooo

N : Oui ! On s’en est ren­dus compte trop tard et pour­tant on ado­rait ce sam­ple d’im­i­ta­tion de chien de Maik !

J : Heureuse­ment, on peut l’en­ten­dre sur l’EP !

Main­tenant que la boucle est bouclée c’est quoi la suite ? Une nou­velle trilogie ? 

L : On en a déjà un peu par­lé.  Ces trois albums vont ensem­ble, main­tenant, il nous faut une nou­velle idée fédéra­trice. Nous n’avons pas envie de refaire la même chose. De toute façon tu ne peux jamais récréer des instants de vie. Ces moments nous ont beau­coup inspiré pour la créa­tion des trois albums. Peut-être qu’il faut chang­er le snare maintenant !

Tristesse Con­tem­po­raine sera en con­cert au Bad­aboum le 6 avril.

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