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© Melchior Tersen
4 février 2022

On a suivi Von Bikräv une nuit à Dream Nation à Saint-Denis

par Patrice BARDOT

Mélangeant jouissivement samples hip-hop et techno hardcore, 200% Bibi, sorti en fin d’année dernière, couronne la puissance inventive et ludique de Von Bikräv, membre éminent des Casual Gabberz. Le producteur et DJ nous raconte une nuit à Dream Nation, rendez- vous incontournable des fans d’électronique qui tape dur. 

Article issu du Tsugi 147 : Radio Activity, La folle histoire des radios musicales : des pirates aux webradios disponible maintenant en kiosque et à la commande en ligne.

 

20h : Depuis juillet dernier, je suis papa d’une petite fille, donc le before c’est changer le bébé, le nourrir, le coucher.(rires) Je ne pense pas tout le temps mes sets à l’avance, notamment pour les clubs où ça freestyle plus, mais pour un énorme festival très attendu comme Dream Nation où le son est énorme et les gens ont payé cher leur place, j’aime bien me préparer. Je me sens plus serein.

 

23h: Deux potes me rejoignent. Ils profitent de mon taxi. Ils sont comme des fous parce qu’ils y vont pour faire la fête. Je commence quand même à stresser parce que c’est une grosse scène et je n’ai jamais joué là-bas. Quand tu vas dans un club, généralement tu sais à quoi cela va ressembler. Ce soir ça va être gros, il y a un côté mystère et suspense. Mais on rigole quand même bien entre nous.

 

23h30 : On arrive sur place suffisamment tôt, histoire de prendre ses marques, boire quelques bières, discuter un peu. J’aime bien voir qui est là, s’il y a des copains. On se pose un peu backstage.

 

00h : On fait un tour des scènes. C’est quand même l’un des rares festoches qui laisse autant de place à la hard music. Ils n’ont pas rigolé sur la déco, ça fait vraiment évènement hollandais. J’ai l’impression qu’avec le Covid, les gens sont vraiment heureux d’être là, car on ne sait jamais si cela ne va pas être annulé au dernier moment. Il y a un mélange : les habitués du hardcore à la hollandaise qui ne vont pas en club à Paris, et aussi un public plus parisien coutumier des warehouses mais aussi des festivaliers classiques.

 

00h15 : On se cale un peu devant Warface : on veut jauger la sono. Je suis programmé sur la Newtrack Stage, une scène entre la Techno Stage et la Hard Music Stage. Ils ont vraiment mis le paquet, il y a des écrans LED partout. Je kiffe bien Rooler.

 

00h30 : Ça retourne backstage pour un peu de calme. On va boire une ou deux bières histoire de se mettre dans l’ambiance. Parfois, j’aime rester cinq minutes dans un coin, mais je ne suis pas du genre à faire une retraite spirituelle avant un set. Je commence à me placer derrière les platines où Cassie Raptor joue avant moi. C’est la première fois que je la vois et elle termine dans un beau finish hardcore.

 

01h : C’est l’heure ! J’ouvre par mon remix de « Jean-Luc Mélenchon » de Fadoo, un rappeur de Bobigny. Ça fonctionne très bien. Il y a un petit message, on occupe l’espace, même si je ne suis pas là pour faire la campagne de Mélenchon. Les gens chantent, je suis surpris de l’impact. Aujourd’hui, le snobisme parisien qui disait que le hardcore était un truc de bouseux, c’est fini. Grâce à Internet, tout le monde est devenu un peu plus curieux et on juge moins sans connaître.

 

01h30 : J’ai bien préparé mon set, je suis tout schuss. Je vois aussi qu’il y a une attente du public qui veut entendre des vieux morceaux. Mais c’est un peu le showcase de 200% Bibi donc je ne les ai pas forcément joués. Je ne fais pas le chien et j’envoie par exemple « Fuck le 17 », le remix de 13 Block par Casual Gabberz. Quand je passe certains de mes nouveaux morceaux, je me dis : « Ah, celui-là, ils ont l’air de bien l’aimer. » Les paroles en français, ça met le contact direct. Des jeunes ne captent pas d’où vient le sample, et il y a des anciens qui disent : « Wouah le sample de Rohff ! »

 

01h45 : Il y a plus de monde qu’au début. C’est un peu vertigineux. C’est cool. Je n’ai pas fait tout ça pour rien.

 

02h30 : Je conclus par «World Renown» le dernier morceau de l’album, un peu mélancolique avec un sample de Johnny Smith, un guitariste qui faisait des reprises de vieux morceaux à la guitare dans les années 1960. Plein de gens le connaissent sans le savoir. Le set se termine. Grosse euphorie, le stress est évacué, les gens ont kiffé, je n’ai pas fait de pain, les nouveaux tracks ont bien marché. Je vais checker les copains qui m’attendent backstage. Je serre des pinces, je rebois des bières.

 

03h : On refait un petit tour des scènes pour voir qui traîne et on croise ce bon vieux Manu Le Malin, toujours un plaisir de le voir. On se fait de gros câlins. C’est un peu grâce à lui si on en est là avec Casual Gabberz, il nous avait programmés à Astropolis. Mais il ne faut pas que je rentre trop tard, parce qu’il y a ma femme et ma fille à la maison.

 

03h30 : Je pars pendant le set de Jacidorex – un très bon gars. Dans le taxi, je vais sur Insta et je vois le nombre impressionnant de stories où je suis tagué. Ça fait plaisir. Mes potes sont restés là-bas, ils n’avaient pas de bébé sur qui veiller.

 

04h : Tout le monde dort et je vais me coucher bien sagement, parce que je risque de me faire réveiller à tout moment.

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Tsugi 147

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