© Melchior Tersen

On a suivi Von Bikräv une nuit à Dream Nation à Saint-Denis

Mélangeant jouis­sive­ment sam­ples hip-hop et tech­no hard­core, 200% Bibi, sor­ti en fin d’année dernière, couronne la puis­sance inven­tive et ludique de Von Bikräv, mem­bre éminent des Casu­al Gab­berz. Le pro­duc­teur et DJ nous racon­te une nuit à Dream Nation, rendez- vous incon­tourn­able des fans d’électronique qui tape dur. 

Arti­cle issu du Tsu­gi 147 : Radio Activ­i­ty, La folle his­toire des radios musi­cales : des pirates aux webra­dios disponible main­tenant en kiosque et à la com­mande en ligne.

 

20h : Depuis juil­let dernier, je suis papa d’une petite fille, donc le before c’est chang­er le bébé, le nour­rir, le coucher.(rires) Je ne pense pas tout le temps mes sets à l’avance, notam­ment pour les clubs où ça freestyle plus, mais pour un énorme fes­ti­val très atten­du comme Dream Nation où le son est énorme et les gens ont payé cher leur place, j’aime bien me préparer. Je me sens plus serein.

 

23h: Deux potes me rejoignent. Ils prof­i­tent de mon taxi. Ils sont comme des fous parce qu’ils y vont pour faire la fête. Je com­mence quand même à stress­er parce que c’est une grosse scène et je n’ai jamais joué là-bas. Quand tu vas dans un club, généralement tu sais à quoi cela va ressem­bler. Ce soir ça va être gros, il y a un côté mystère et sus­pense. Mais on rigole quand même bien entre nous.

 

23h30 : On arrive sur place suff­isam­ment tôt, his­toire de pren­dre ses mar­ques, boire quelques bières, dis­cuter un peu. J’aime bien voir qui est là, s’il y a des copains. On se pose un peu backstage.

 

00h : On fait un tour des scènes. C’est quand même l’un des rares fes­toches qui laisse autant de place à la hard music. Ils n’ont pas rigolé sur la déco, ça fait vrai­ment évènement hol­landais. J’ai l’impression qu’avec le Covid, les gens sont vrai­ment heureux d’être là, car on ne sait jamais si cela ne va pas être annulé au dernier moment. Il y a un mélange : les habitués du hard­core à la hol­landaise qui ne vont pas en club à Paris, et aus­si un pub­lic plus parisien cou­tu­mi­er des ware­hous­es mais aus­si des fes­ti­va­liers classiques.

 

00h15 : On se cale un peu devant War­face : on veut jauger la sono. Je suis pro­grammé sur la New­track Stage, une scène entre la Tech­no Stage et la Hard Music Stage. Ils ont vrai­ment mis le paquet, il y a des écrans LED partout. Je kiffe bien Rooler.

 

00h30 : Ça retourne back­stage pour un peu de calme. On va boire une ou deux bières his­toire de se met­tre dans l’ambiance. Par­fois, j’aime rester cinq min­utes dans un coin, mais je ne suis pas du genre à faire une retraite spir­ituelle avant un set. Je com­mence à me plac­er derrière les platines où Cassie Rap­tor joue avant moi. C’est la première fois que je la vois et elle ter­mine dans un beau fin­ish hardcore.

 

01h : C’est l’heure ! J’ouvre par mon remix de « Jean-Luc Mélenchon » de Fadoo, un rappeur de Bobigny. Ça fonc­tionne très bien. Il y a un petit mes­sage, on occupe l’espace, même si je ne suis pas là pour faire la cam­pagne de Mélenchon. Les gens chantent, je suis sur­pris de l’impact. Aujourd’hui, le sno­bisme parisien qui dis­ait que le hard­core était un truc de bouseux, c’est fini. Grâce à Inter­net, tout le monde est devenu un peu plus curieux et on juge moins sans connaître.

 

01h30 : J’ai bien préparé mon set, je suis tout schuss. Je vois aus­si qu’il y a une attente du pub­lic qui veut enten­dre des vieux morceaux. Mais c’est un peu le show­case de 200% Bibi donc je ne les ai pas forcément joués. Je ne fais pas le chien et j’envoie par exem­ple « Fuck le 17 », le remix de 13 Block par Casu­al Gab­berz. Quand je passe cer­tains de mes nou­veaux morceaux, je me dis : « Ah, celui-là, ils ont l’air de bien l’aimer. » Les paroles en français, ça met le con­tact direct. Des jeunes ne captent pas d’où vient le sam­ple, et il y a des anciens qui dis­ent : « Wouah le sam­ple de Rohff ! »

 

01h45 : Il y a plus de monde qu’au début. C’est un peu ver­tig­ineux. C’est cool. Je n’ai pas fait tout ça pour rien.

 

02h30 : Je con­clus par «World Renown» le dernier morceau de l’album, un peu mélancolique avec un sam­ple de John­ny Smith, un gui­tariste qui fai­sait des repris­es de vieux morceaux à la gui­tare dans les années 1960. Plein de gens le con­nais­sent sans le savoir. Le set se ter­mine. Grosse euphorie, le stress est évacué, les gens ont kiffé, je n’ai pas fait de pain, les nou­veaux tracks ont bien marché. Je vais check­er les copains qui m’attendent back­stage. Je serre des pinces, je rebois des bières.

 

03h : On refait un petit tour des scènes pour voir qui traîne et on croise ce bon vieux Manu Le Malin, tou­jours un plaisir de le voir. On se fait de gros câlins. C’est un peu grâce à lui si on en est là avec Casu­al Gab­berz, il nous avait programmés à Astrop­o­lis. Mais il ne faut pas que je ren­tre trop tard, parce qu’il y a ma femme et ma fille à la maison.

 

03h30 : Je pars pen­dant le set de Jaci­dorex – un très bon gars. Dans le taxi, je vais sur Ins­ta et je vois le nom­bre impres­sion­nant de sto­ries où je suis tagué. Ça fait plaisir. Mes potes sont restés là-bas, ils n’avaient pas de bébé sur qui veiller.

 

04h : Tout le monde dort et je vais me couch­er bien sage­ment, parce que je risque de me faire réveiller à tout moment.

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Tsugi 147

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