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22 août 2022

🤖 On était au dernier live de Kraftwerk en Belgique : Tsugi vous raconte tout

par Olivier Pernot

Kraftwerk, Lokerse Feesten, Lokeren (Belgique)

Le léger crépitement d’un compteur Geiger se distille dans les enceintes. Kraftwerk entame « Radioactivity », morceau phare du répertoire du groupe de Düsseldorf. Placé au centre de la setlist, ce titre majeur bénéficie d’une sono boostée : la seconde partie du show va gagner en puissance et en impact sur un public un peu mollasson. Avant cela, les Allemands ont aligné plusieurs classiques comme « Home Computer », « The Man Machine » ou « Autobahn ». Mais la foule du Lokerse Feesten, plusieurs milliers de personnes, est plutôt calme, happée par l’immense écran au fond de la scène qui diffuse des images 3D. Chaque spectateur s’est vu remettre à l’entrée du festival des lunettes en cartons avec des « verres » spéciaux pour apprécier cette illusion.


Kraftwerk « Radioactivity » – Dolina Charlotty, Pologne, aoĂ»t 2022

Le show de Kraftwerk est avant tout visuel et sonore, déclinaison du concept esthétique Gesamtkunstwerk (« oeuvre d’art totale » en allemand). Visuel car l’écran transporte dans des graphismes seventies conceptuels – une force du groupe depuis toujours – aux lignes simples et efficaces. La mise en scène se complète avec quatre pupitres au devant de la scène et, derrière, les quatre musiciens/techniciens. Sur la gauche on peut reconnaître Ralf Hütter, 75 ans, créateur et leader du groupe (l’autre tête pensante historique de Kraftwerk, Florian Schneider, avait quitté la formation en 2008 et est décédé en 2020). Mais, à part Hütter, qui sont les trois autres hommes ?

Peu importe. Car la force de Kraftwerk réside avant tout dans l’esthétique sonore. Et le groupe a un répertoire démentiel. Comme seulement quelques formations dans l’histoire de la musique des cinquante dernières années (Velvet Underground, Joy Division, etc.), il a bousculé la planète pop, inventant de nouveaux sons, créant un nouveau genre. Son influence est majeure et sans Kraftwerk, la techno n’aurait pas été la même. Pourtant, le quatuor allemand reste en 2022 un groupe à la notoriété presque underground. Il ne joue pas dans des stades, s’intercale parfois dans des programmations de grands festivals, comme à Rock en Seine dans quelques jours, mais ce n’est pas un headliner, ou se retrouve dans des festivals de moindre échelle. Comme lors de ses dates récentes au Danemark (Smukfest) ou en Pologne (Dolina Charlotty).

L’autre soir, Kraftwerk jouait donc à Lokeren, commune située entre Gand et Anvers, lors de ces Lokerse Feesten qui s’étalaient sur dix soirées et accueillaient en têtes d’affiche aussi bien The Black Eyed Peas que Judas Priest, Damian Marley que Kings Of Leon.


Kraftwerk « Tango » – Live Ă  Milan, mai 2022

Pour doper l’affiche autour des Allemands, le festival avait conviĂ© 2manydjs en live – qui a clĂ´turĂ© la soirĂ©e – ainsi que quelques artistes proches des frères Dewaele comme Tiga, Asa Moto ou encore Charlotte AdigĂ©ry & Bolis Pupul. Ce duo s’est particulièrement fait remarquer sur la grande scène avec son Ă©lectro soul pop colorĂ©e et fĂ©dĂ©ratrice. Pas facile pourtant, de jouer avant cette institution qu’est Kraftwerk. Mais le duo a relevĂ© le dĂ©fi avec beaucoup de fraĂ®cheur et d’enthousiasme. Après lui, le quatuor de DĂĽsseldorf a servi une heure et demie de show millimĂ©trĂ© oĂą les images rĂ©pondent aux mots scandĂ©s par Ralf HĂĽtter aussi bien en allemand, qu’en anglais ou en français.

Kraftwerk n’est clairement pas un groupe festif et les quatre hommes figés derrière leurs pupitres en témoignent. Pourtant sa musique froide et cérébrale est ensorcelante. C’est tout un pan de l’histoire des musiques synthétiques et électroniques qui se joue devant nous avec des morceaux étirés en version longue et souvent redynamisés avec des beats plus technoïdes. Notamment « Tour de France », « The Robots » ou « Musique Non Stop ». Tous les morceaux du show, issus de singles ou d’albums mythiques publiés lors des années 1970 et 1980, proposent alors un voyage dans le temps. Une odyssée sensorielle incomparable.

Olivier Pernot

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