On y était : Paul McCartney à Paris La Défense Arena | LIVE REPORT
Une légende de la pop, une des dernières en activité : Paul McCartney débarque en ville. Mais grimper sur scène à quatre-vingt-deux ans, est-ce bien raisonnable ? Indice : deux heures et demie de show.
On aurait pu sortir des arguments plus ou moins en bois pour se raccrocher aux branches. Histoire de justifier la présence de Paul McCartney sur le site d’un média censé présenter le futur de la musique, d’où son nom en japonais signifiant ‘suivant’, ‘prochain’, ‘suite’ (toujours bon de le rappeler). Du genre la reine Beyoncé reprend « Blackbird » des Beatles sur son dernier album, ou bien on a parfois entendu Laurent Garnier, grand fan du bonhomme, jouer le très électronico-expérimental « Temporary Secretary » extrait de l’album McCartney II, et même à l’occasion « Goodbye Tonight » des Wings.
Soyons honnête. Si en ce soir pluvieux de décembre, on a pris le chemin vers Paris La Défense Arena notre démarche est toute personnelle. Comme en souvenir de notre premier disque acheté, il y a fort longtemps : la compilation des Beatles surnommée « le double album rouge » 1962-1966.
C’est d’ailleurs par un extrait de notre madeleine proustienne que Macca démarre son set, avec quarante-cinq minutes de retard dû à un soundcheck tardif. Frisson que d’entendre l’historique « A Hard Day’s Night » entonné par un McCartney tout à fait en voix, malgré le poids des ans. Sans doute la bonne surprise de la soirée. Alors que souvent voir sur scène un artiste d’un âge vénérable où on l’imaginerait mieux au coin du radiateur, une tisane à la main (c’est valable pour les journalistes aussi) peut s’avérer une vraie souffrance, Sir Paul, l’œil pétillant et la démarche alerte, s’amuse autant qu’un public ratissant très large. Des jeunes, des moyens jeunes, des vieux, des moyens vieux, et des familles composées ou recomposées (on n’a pas été checker les cartes d’identité). La réunion d’une majorité unie comme on en rêverait sur les bancs de l’Assemblée Nationale. Mais ceci est une autre histoire.
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Rassembleur, McCartney l’est certainement. D’autant plus qu’il peut s’appuyer sur plus de soixante-ans de répertoire dont un nombre incontournable de tubes ayant sonorisé les platines, baladeurs, playlists de multiples générations. Ils sont bien sûr la colonne vertébrale d’un show visuellement sobre où la pyrotechnie (excepté des feux d’artifice sur « Live and Let Die ») et les avalanches de LED pour s’en prendre plein la gueule sont mises de côté. Mot d’ordre : Music First. On est d’accord. Les fameux hits sont donc bien là, époques Beatles et Wings confondues, d’un « Michelle » au piano, en passant par un « Blackbird » tout seul à la guitare acoustique (un bonheur) ou l’électrique « Get Back » et en conclusion un transcendantal « Hey Jude » entonné en cœur par une foule extatique.
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© Apolline Cornuet
Le programme joué en compagnie d’un groupe relativement finaud, à la partition entre heavy blues et southern rock, comporte aussi quelques coups de mou. Le choix du titre mineur des Wings « Junior’s Farm » en deuxième position fait retomber le soufflé. Sélectionner « Being for the Benefit of Mr Kite ! » pas forcément un morceau phrare de l’album Sgt Pepper’s surprend également. Et même s’il met en transe la forte colonie britannique présente, on se serait volontiers passé du toujours insupportable « Obladi Oblada ». On préfère se souvenir de l’étincelant rappel de trente minutes, sorte de medley géant et malin où s’éclatent « Sgt Pepper’s Lonely Hearts Club Band » (reprise), « Helter Skelter » (pierre fondatrice du hard rock faut-il le rappeler), ou « Carry That Weight ».
Paul McCartney got back
Mais les grands moments où l’on sent la foule au bord des larmes (et nous avec), c’est certainement, les hommages à « mon grand ami » et « mon frérot ( les en français dans le texte) disparus, respectivement, John (« Here today ») et George (« Something »). Occupant largement les écrans de scènes au fil du concert grâce des images et films d’époque, et des animations (un peu cheapos quand même), ces chers camarades des Beatles, Ringo l’autre survivant compris, ont accompagné tout le long de ce show émouvant Paul McCartney. En nous donnant rendez-vous pour une prochaine fois, l’éternel petit gars de Liverpool a montré qu’il n’était pas pressé d’aller retrouver tout là-haut Lennon et Harrison. Tant mieux.