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© Maxime Chermat
14 septembre 2022

Peacock Society : réinventer la fête diurne, toujours aussi sauvage

par Bérénice Hourçourigaray

Du 10 au 11 septembre, la Peacock Society a fait sa plus belle roue pour nous charmer. Les notes électroniques sont venues se mélanger aux chants des oiseaux du parc de Choisy Paris-Val-de-Marne pour un week-end placé sous le signe de l’excitation, de la découverte et évidemment de la danse, sous toutes ses formes. Sa nouvelle formule 100% diurne et bucolique réinvente les pratiques festives des Parisiens.

Samedi 10 septembre, le RER D déversait un flot continu de danseurs drapés de k-ways vers les 60 000 m² du parc de Choisy. Ce n’est pas la pluie qui va décourager les festivaliers. Au contraire, ils s’en amusent. Sur le chemin, les groupes d’amis esquivent tour à tour les flaques d’eau au prix de quelques gouttes de bière renversées. Dès l’entrée de Peacock Society, la couleur est annoncée : la plus grande scène, la Solar, surplombe la plus grande partie du festival où des ginguettes, stands de prévention et friperies s’organisent. Ça fourmille pendant que DJ Harvey s’occupe de chauffer le public de 18h à 20h. Oui, deux heures ! On touche au gros point fort de ce festival. Loin des pauvres trente minutes que l’on peut accorder aux artistes dans d’autres évènements, Peacock Society laisse la possibilité à ses invités de déployer un réel set, allant de 1h30 à 2h pour les têtes d’affiche. Il en ressort des concerts mémorables qui laissent place à la modulation, que les festivaliers s’empressent d’embrasser par la variation de leurs danses. Quel bonheur. Alors on a fait le choix -même si c’était parfois déchirant- d’honorer ce parti pris du festival, et d’assister aux concerts du début à la fin, ne cédant pas à l’envie de faire moitié/moitié entre deux artistes.

 

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On avait une petite appréhension face à la nouvelle formule diurne du festival : arrivée dès 13h mais départ obligatoire à minuit. Mais les festivaliers ont joué le jeu, comme s’ils voulaient défier la nuit. Car même si le voile de l’obscurité n’était là que pour quelques heures, les possibilités de transgression que nous avons de la nuit, elles, étaient bien là. Outrance, détachement du regard des autres, extravagance, dépassement de soi. On renverse notre imaginaire pour laisser place à une fête de jour. Bref, place aux hostilités : les concerts.

Délicieux mélange de valeurs sûres et de bonnes surprises

Comme chaque année, la Peacock Society offre les pointures de la scène électronique. On est irradié par les rayons de la scène Solar, où les dieux de la house se sont succédé. Samedi, Peggy Gou a fait son grand retour sur le festival en tant que maîtresse de cérémonie, 5 ans après sa dernière venue. On a aussi tapé du pied sur DJ Harvey, Jamie Jones et l’ensorcelante Vanille qui nous avait impressionnés lors de son live disjoncté à Nuits sonores. Dimanche, c’était au tour du maestro de l’électro français, Laurent Garnier, de présider la soirée. Il était, comme l’a si bien souligné le festival sur son Instagram, « comme à la maison pour 3h de set légendaires ». Il était accompagné de Kölsch et DJ Koze.

La mirror stage était mise à l’écart, nichée au fond du festival. Et pour cause ! Elle a fait trembler les alentours avec de magnifiques sets. Au programme, un quatuor de pure folie : Anetha, Amélie Lens et VTSS et u.r.trax, déesses de la techno. VTSS est connue pour ses sets déchaînés sur fond de techno acid, surfant sur l’EBM. La reine de la nuit ne nous à pas déçus, même en plein jour.

Amelie Lens sur la mirror stage ©Maxime Chermat

On a aussi eu droit à de bonnes surprises. Avec notamment l’Anglaise Anz -dont on avait déjà décelé l’énergie communicative dans sa Boiler Room. On est en plein milieu d’après-midi, on arrive devant la scène Woody qui nous paraît bien vide après l’effervescence provoquée par la Darude la veille. Une poignée de festivaliers s’étalent, prennent toute la place nécessaire pour s’engouffrer vers la délivrance de la danse. On est sur le point de tourner les talons lorsqu’Anz nous appâte avec un merveilleux remix du tube de Baby D,  » Let Me Be Your Fantasy ». La productrice semble directement s’adresser à nous « Let me be your fantasy, I’ll take you higher ». Tu as gagné, on reste. Et aucun de regret. Elle passe de morceaux dansants à de la techno plus dark avec une aisance déconcertante. Les festivaliers accompagnent ses mouvances par leur danse. Tantôt expérimentant tout leur corps, tantôt en ne bougeant que leur tête avec des mouvements saccadés.

Trikk

©Maxime Chermat

 

Un peu plus loin, c’est Trikk qui parvient à retourner la foule amassée devant la Nomad. On se faufile entre les centaines de festivaliers, on se bouscule, les verres se renversent, on croise des âmes esseulées perdues dans leur monde, qui se trémoussent yeux mi-clos devant les déflagrations de l’artiste. Originaire de Porto, il a vite trouvé sa place dans la famille d’Innervisions avec Âme et Dixon, gage d’un talent qui se confirme sur scène.

 

 

 

La Darude et ses lofteurs survoltés 

DJ kwame © Maxime Chermat

Le festival ne se contente pas de ces grosses têtes d’affiche. Il invite la crème des collectifs qui organisent nos plus belles soirées pendant l’année. La Darude, Nyege Nyege, Rinse et 99Ginger ont pu s’approprier une scène et développer leur univers singulier.Une belle manière de leur rendre hommage et de laisser parler leur créativité. On vous avoue qu’un collectif nous a un peu plus fait danser que les autres : La Darude. Depuis quatre ans maintenant, elle souhaite mettre en avant l’eurodance et la trance, le tout ponctué d’une esthétique rétro-kitch. Sur leur scène, la Woddy, on a pu voir les créateurs DJ Kwame et Die Klar, qui ont ouvert le bal à une déferlante de pépites. La légende dit que leurs sets était tellement qualitatifs qu’ils ont dû se balader avec des sacs plastiques dans le festival pour ne pas qu’on leur saute dessus pour les acclamer.

Paul Seul

Paul Seul © Geoffrey Hubbel

Paul Seul, qu’on a vu arpenter tous les festivals avec son acolyte Mathilde Fernandez du duo ascendant vierge, a pris la relève avec brio. Il a surpassé toutes nos attentes lors de son closing, en reprenant « I Love You Always Forever » de Donna Lewis, tube incontournable de la fin des années 1990. Merci Paul, elle nous a trotté dans la tête tout le week-end !

Qui de mieux qu’Hannah Diamond pour feater avec l’esthétisme de La Darude. Il suffit de scroller 3 min son compte Instagram pour comprendre : cheveux rose pastel, haut tube, casquette, paillettes, bref tout y est. Sa musique pop presque robotisée nous a charmés, surtout quand elle a partagé les platines avec Danny L Harle qui clôturait la soirée.

 

Tous les invités du collectif ont joué le jeu en nous proposant un pont entre deux temps, avec un pied dans les années 2000, l’autre ancré dans les méandres des musiques électroniques. Le tout a créé une faille temporelle, où les lofteurs ont pris plaisir à se défouler. Il faut aussi saluer le public du collectif, qu’on sacre le plus bienveillant et le plus motivé. Le tout se finit sur une distribution, ou plutôt un lancé de sucettes dans l’assemblée. Ce bonbon est à l’image de La Darude, acidulé et qui craque sous la dent.

Die Klar et ses lofteurs © Geoffrey Hubbel

Finir en apothéose avec le show futuriste de  BPM x Molécule

On arrive devant la Solar pour finir ce festival en beauté. Le show doit commencer à 21H10. 21H16, les techniciens font encore des allers-retours sur scène. Un « bon, on se casse ? » fuse à côté de moi. « Mais t’es fou, tu veux vraiment louper un set fait par un robot ? » Effectivement J.I.L. n’est pas encore tout à fait prêt. J.I.L. ? C’est l’instrument du futur née de la collaboration entre Molécule et l’équipe du BPM, l’acronyme de Brain Performance Mix, qui permet « la première performance musicale créée et contrôlée par la pensée d’un artiste« . Ce n’est pas un robot, mais une technologie innovante qui permet à l’artiste de jouer de la musique sans utiliser ses mains en connectant directement son cerveau et donc ses émotions. La musique évolue en fonction de son état d’esprit comme l’a expliqué récemment Molécule sur Tsugi radio.

 

À ÉCOUTER AUSSI : Place des fêtes avec avec Molécule et The Absolut Company 

 

Ce projet fou est porté par le mécénat de The Absolut Company Creation, la startup française NextMind, spécialisée dans les technologies des neurosciences et Molécule. C’est bon, sous les applaudissements de la foule, le producteur de « Sila » apparaît. Mais ce live ne commence pas comme les autres, une voix métallique résonne : « Processus de calibration… Cerveau connecté. » Une fois l’esprit de Molécule connecté à J.I.L au moyen du petit casque développé par Nextmind, le show peut commencer. La noirceur des vêtements de Molécule se fond avec la scène qu’il parcourt sans cesse d’un coté a l’autre. Il navigue entre son studio recréé sur la droite avec ses machines traditionnelles et J.I.L., sur la gauche, incarné sous la forme d’un monolithe qui semble tout droit sortie du film 2001 l’Odyssée de l’espace, créant des moments quasi mystiques où les beats sortis de nulle part semblent  flotter dans le ciel. Plus besoin de ses rayons, la scène Solar s’illumine de l’intérieur. Les sceptiques de tout à l’heure sont aux anges. Grâce à une performance visuelle discrète mais efficace qui parfait la grandeur du duo homme-machine, on touche encore une fois les hauteurs, les nuages de cet univers recomposé à coups de fumée sur scène. C’est l’ovation.

Le sujet vous intéresse ? LISEZ : 🗞️ Brain Performance Mix : créer et contrôler de la musique par la pensée

Votre cœur était serré à la lecture de cet article parce que le festival vous manque déjà ? ARTE Concert a tout prévu et a posté sur Youtube la retransmission des concerts d’Anetha, u.r.trax, Adam Beyer et Boys Noize.

 

À LIRE AUSSI : ARTE Concert restransmet les têtes d’affiche de la Peacock Society !

Meilleur moment : Quand on a croisé, dimanche, un groupe qui chantonnait « I Love You Always Forever« , le fameux closing de Paul Seul.

Pire moment : Quand on a reçu une sucette lancée par DJ Kwame, fondateur de la Darude, dans l’œil.

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