Olympe4000, Sherelle, Vegyn … Les albums de la semaine
Des disques qui touchent, qui bousculent, qui apaisent : cette semaine, voici les albums à ne pas manquer ! Et au programme : Olympe4000, Yorina, Antoine Assayas, Nell Smith, Sirens of Lesbos, Astels, Vegyn, Sherelle, Jon Onj, Bon Iver et Logic1000.
Olympe4000 – Mutante
Elle a toujours du flair Jennifer Cardini, qui signe sur son label une DJ et productrice connaissant une vraie montée en puissance depuis un peu plus de deux ans et la sortie du très réussi EP Hack Me I’m Famous. Avec Mutante, Olympe4000 laisse entendre trois nouveaux titres club qui confirment tout son potentiel. De la techno puissante mais sensuelle, dont la fausse linéarité est remplie de malines chausse-trappes. Fameux.
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Yorina – Blood Rush
L’ancienne costumière de The Dø retrouve Dan Levy, la moitié du duo, à la production de ce mini-album entre indie et électro. Le chemin est large, on pourrait s’y perdre mais la chanteuse retrouve parfaitement sa route, avec une sensibilité à fleur de peau et une puissance inspiratrice qui construisent de la grande pop moderne. On est convaincus.
Antoine Assayas – Quand j’aurai l’âge
Compositeur nomade et tisseur de sons pour le cinéma et la danse, Antoine Assayas balance Quand j’aurai l’âge, un EP sensible et voyageur dispo dès aujourd’hui. Nourri de field recordings glanés au Vietnam et ailleurs, ce nouveau projet oscille entre pop psyché, chansons flottantes et textures atmosphériques.
Toujours épaulé par Juveniles au mix, Antoine façonne une musique intime mais ouverte sur le monde, où la nostalgie se mêle à l’exploration sonore. Une œuvre à la fois douce, mouvante et envoûtante, à découvrir en live le 22 avril à La Boule Noire.
Nell Smith – Anxious
À seulement 17 ans, Nell Smith laisse derrière elle un album qui résonne comme un souffle suspendu : Anxious, un disque posthume d’une intensité troublante. Traversé par les doutes, l’euphorie et les vertiges de l’adolescence, l’album tisse un lien entre folk intime et éclats psychés, avec la complicité de Jack et Lily Wolter (Penelope Isles).
Chaque morceau est chargé de cette énergie brute propre aux débuts, d’un regard qui découvre le monde avec candeur et lucidité. De ‘Bubba’ à ‘Split in the Sky’, la lumière affleure même dans les ombres.
Sirens of Lesbos – i got a song, it’s gonna make millions
Astels – The Meeting
Un album comme un carnet de route griffonné à l’encre des premières fois : premières claques, premières scènes, premières nuits à douter dans un studio trop petit. Astels balance The Meeting comme on jette un sort — un disque sans garde-fou entre house, pop, garage et RnB sans jamais choisir son camp.
C’est brut, hybride, parfois bancal, souvent incandescent. Ça parle d’ego cabossé, de proches qui pigent pas, de faire danser la douleur pour qu’elle s’en aille. Une love story musicale qui commence dans un placard (véridique) et finit sur un dancefloor.
Vegyn & Air – Blue Moon Safari
Reprendre Moon Safari, l’album culte d’Air, est un pari risqué. Mais Vegyn, le déconstruit et le réinvente. Plutôt qu’un simple remix, Blue Moon Safari est une réécriture vibrante et hypnotique, où chaque morceau est redéfini avec des influences trip-hop, des textures 80’s, et des synthés futuristes.
Dès le début, avec ‘New Star In The Sky’, Vegyn prend des libertés. L’original se transforme en un rêve hallucinatoire, plus cryptique et déstructuré. Les mélodies d’Air sont repoussées, les ambiances étendues, créant une version vivante et mouvante de ce classique. Sur des titres comme ‘Remember’, le vocoder et les beats minimalistes effacent l’ADN pop de l’original, le transformant en un souvenir déformé, un reflet à peine reconnaissable.
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Sherelle – With a Vengeance
Sherelle prouve avec With a Vengeance que la vitesse peut être bien plus qu’un simple exutoire. Si vous la connaissez également en tant qu’animatrice radio sur la BBC, vous ne serez pas déçus. Sur cet album, elle semble condenser toutes les découvertes faites dans son émission pour fusionner habilement footwork, jungle et garage. Une expérience aussi jouissive qu’énergique et radicale. Dès l’ouverture, « Enter the Void » fait monter une tension insoutenable grâce à des percussions déchirantes, avant de libérer la foudre sur « Don’t Want U« , un chef-d’œuvre d’hybridation entre footwork et jungle.
Sherelle conserve l’héritage de ces genres, tout comme leur folie primale. Avec With a Vengeance, elle ne cherche pas à faire un énième disque de jungle, mais une œuvre incontournable, fusionnant la palette de ses inspirations. Avec des morceaux comme « Speed (Endurance)« , elle convoque une techno aussi acide que dévastatrice, tandis que « Ready, Steady, Go! » fait basculer le footwork dans les tréfonds du minimalisme techno.
La production est soignée, mais toujours brutale, capturant l’intensité d’une époque qui cherche à se défouler tout en restant lucide. Plus qu’une simple playlist pour clubs, cet album est une déclaration d’intention : la danse comme acte de résistance. Sherelle ne joue pas seulement avec les genres, elle les façonne pour bâtir un avenir où l’énergie est une arme.
Bon Iver – SABLE, fABLE
Sur SABLE, fABLE, Justin Vernon refait surface, non pas en rupture, mais en translation lente, comme une marée qui aurait appris à danser. On connaissait le bricoleur mystique de 22, A Million, le moine folk de For Emma: le voilà devenu artisan pop, à l’aise dans le clair comme dans l’obscur. SABLE est la chambre d’écho intime, quatre morceaux suspendus, voix granuleuse, arrangements épurés. Puis fABLE fait irruption — lumière tamisée, groove feutré, et cette soul des années 80 réinjectée dans le circuit (« Everything Is Peaceful Love », « If Only I Could Wait » avec Danielle Haim).
Toujours un pied dans la folk, l’autre dans le songwriting pur. Bon Iver ne simplifie pas : il clarifie. Il sample l’espoir, trafique le gospel, fait rimer sensibilité et far west. Ce cinquième album ne raconte pas un renouveau — il l’incarne.
Jon Onj – Tekibama
C’est sans aucun doute l’artiste à suivre cette année. Alors que le R’n’B semble retrouver ses lettres de noblesse, Jon Onj le magnifie en écrivant ces trois lettres en encre d’or. Avec Jon Onj, on ne se perd pas dans une énième tentative de devenir le prochain “Frank Ocean”. Tekibama en est la preuve. Le R’n’B, il l’aime, il l’explore.
S’il avait été auréolé du succès de Fochain, il pousse avec ce nouveau projet encore plus loin la fusion entre néo-soul sensuelle, funk classieux et beats sophistiqués. Les synthés chatoyants et ses lignes de basses racoleuses ne sont peut-être pas les guides les plus efficaces, puisqu’ils nous perdent quelque part entre la chaleur d’une nuit d’été et la tension d’une caresse inachevée. Les murmures de Jon Onj flirtent avec l’intime tout en conservant une aura de mystère. Tekibama est une invitation à laisser les sens s’égarer, une balade nocturne sur fond de funk électrifié et de soul intime.
DJ-Kicks : Logic 1000 (DJ Mix)
Un DJ-Kicks est rarement un projet qu’on oublie. C’est le terrain où on partage et où on se révèle. Logic1000 n’a pas contourné l’exercice. Sur ce disque, elle y déroule son “moi” profond, souvenirs diffus et pulsations feutrées, comme si le club avait été déplacé dans la chambre de sa fille. Le mix respire l’intime sans jamais céder au repli : il rêve tout haut, yeux mi-clos, entre downtempo, trip-hop et ambient, avec une élégance flottante.
Chaque morceau semble avoir été sélectionné non pour faire danser, mais pour accueillir les battements de cils d’un dimanche à rallonge (“Scorpio”, “Shush”, “4k Murmurs”). Comme Eris Drew ou Sofia Kourtesis, Samantha Poulter explore un dancefloor du care, sans stroboscope, mais traversé de flashs d’émotions — souvenirs d’enfance, voix de proches, peaux absentes. Dans “Under the Sun, Beneath the Rainfall”, elle sample ses propres archives familiales : un sample flou, comme une discussion d’adultes à demi-mots perçue depuis la pièce d’à côté. Ce mix, c’est l’éloge des interstices — des instants suspendus où la house devient berceuse et le glitch, une caresse.