© ARTHUR WILLIAMS

Tom McFarland, de Jungle : “notre amour pour la musique et le jeu n’a pas changé”

Comme bien d’autres groupes, l’histoire de Jun­gle débute dans une cham­bre d’adolescent, à Lon­dres . Mais la propo­si­tion qui en découle, elle, est unique : un duo élec­tron­ique, imprégné par des vibes dis­co et hip-hop, repous­sant tou­jours plus loin les lim­ites de leur son. On a pu dis­cuter avec Tom McFar­land, moitié du duo londonien.

 

Jungle duo

Joshua Lloyd-Watson et Tom McFar­land © ARTHUR WILLIAMS

Selon la presse, entre Josh et toi, tu serais le plus taiseux, le plus timide. T’es d’ac­cord avec ça ?

Plutôt d’ac­cord oui, surtout en inter­view ! Josh a tou­jours beau­u­u­u­coup à dire. Moi aus­si mais plus calme­ment, à ma manière. Je pense que je com­mu­nique mieux que lui, tout sim­ple­ment (rires). 

 

Bien­tôt dix ans depuis la sor­tie du pre­mier album de Jun­gle. Qu’est-ce qui a changé depuis ? 

Une cer­taine con­fi­ance en nous. Quand tu com­mences dans la musique, tu as par­fois l’im­pres­sion que les autres cherchent à trou­ver ce que tu fais mal, à point­er tes erreurs, à te cri­ti­quer. En par­ti­c­uli­er en Grande-Bretagne. J’avais l’im­pres­sion qu’on essayait de nous coin­cer. C’est d’ailleurs très dif­férent avec la presse étrangère, notam­ment en France. La presse française a tou­jours été cool avec nous. Alors mer­ci, j’e­spère que ça va con­tin­uer (rires).  Je sens vrai­ment qu’au fil des années, on est de plus en plus calmes, plus sere­ins, con­fi­ants dans ce qu’on fait.

 

Juste­ment, avec la sor­tie de ce nou­veau pro­jet Vol­cano, vous sen­tez que vous n’avez plus rien à prouver ?

C’est très facile de penser que tu dois impres­sion­ner les gens. Aujour­d’hui on est assez vieux pour se ren­dre compte que ce n’est qu’un mythe. La plus grosse sat­is­fac­tion vient de ton cœur, de toi, et pas des autres. L’im­por­tant c’est ce que tu fais, ce que tu accom­plis et le fun que tu en tires. Ce que tu arrives à faire de ta vie, avec les cartes qu’on t’a donné.

Tu vois, si je regarde les dix dernières années, objec­tive­ment… On est hyper chanceux. Deux mecs ont passé dix ans à jouer leur musique autour du monde, avec ses potes… J’ai une famille géniale. J’ai acheté une mai­son. Je me sens chanceux.

 

 

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Au con­traire, pen­dant ces dix ans, qu’est-ce qui n’a absol­u­ment pas changé pour Jungle ?

Notre amour pour la musique. La pas­sion pour “le jeu”. Mon amour pour Josh, même si évidem­ment il a été testé un bon nom­bre de fois. Je pense que par­fois, tu n’es pas for­cé­ment en phase émo­tion­nelle­ment, même avec des per­son­nes dont tu es très proche. Vous en êtes à des moments dif­férents de vos vies. Et tu peux vite te dire “merde, avant on était telle­ment liés, proches”. Mais le lien entre nous ne s’ef­frit­era jamais.

 

Est-ce que c’est tou­jours sim­ple de tra­vailler avec quelqu’un que tu con­nais depuis si longtemps ? 

Oui, c’est même plus sim­ple en fait ! Avec Joshua, on se con­nait depuis qu’on est enfants, donc ça aide.

 

Parce qu’avec le temps, ça peut devenir de plus en plus dif­fi­cile de sur­pren­dre l’autre

Oui, et c’est d’ailleurs pour ça qu’on s’est sen­tis blo­qués à un moment. Parce qu’on avait l’im­pres­sion qu’on ne s’in­spi­rait plus mutuelle­ment. Dès que tu perds cette con­fi­ance de pro­pos­er de nou­velles idées, de nou­velles com­pos… C’est com­pliqué. On a eu une longue péri­ode comme ça, où on n’avait plus con­fi­ance en nos idées. Parce que c’é­tait devenu si facile de se cri­ti­quer. Alors naturelle­ment, cha­cun cachait ses trucs : “non, je ne vais pas te mon­tr­er ça, parce que je te con­nais et je sais que ce n’est pas assez bon”. Alors que ça n’a pas tou­jours été comme ça. Avant, quand il n’y avait aucune notion d’ego dans l’équa­tion, on arrivait à partager nos idées et à savoir dire très rapi­de­ment “oui/non/oui/non”. Et puis au fil du temps, dès que l’un d’en­tre nous dis­ait “non”, l’autre le pre­nait comme une attaque personnelle.

 

Et aujour­d’hui, vous avez réglé ça ? Vous sem­blez plus libérés sur la question.

Main­tenant c’est réglé ! On est arrivés à un point où on peut être super cri­tiques envers nous-même ET c’est con­struc­tif. C’est la seule rai­son pour laque­lle je te donne mon opin­ion : c’est pour le bien de la musique qu’on crée ensemble.

Jungle Live

Joshua Lloyd-Watson et Tom McFar­land sur scène © Luis Aviles

 

 

Com­ment avez-vous tra­vail­lé sur votre nou­v­el album ? Quelle était l’idée direc­trice du projet ?

L’én­ergie, la vitesse. C’est cer­taine­ment la péri­ode la plus courte qu’on ait eue entre deux albums.

 

Et oui, deux ans ! Un laps de temps plus court, ça vous évite aus­si de sur-réfléchir au moment de composer ?

Exacte­ment ! On a même sor­ti deux sin­gles l’an dernier, ce qui était nou­veau pour nous : GOOD TIMES” et “PROBLEMZ, un titre qu’on a gardé pour Vol­cano. 

On a voulu tra­vailler plus vite, pour éviter d’être trop cri­tiques envers nous-même. Pour essay­er de ne pas tuer nos idées trop vite. Parce que c’est très facile de lancer une idée, et de l’éditer-mixer trop tôt. Imag­ine que tu écris un livre : tu finis le pre­mier para­graphe, et avant d’écrire le reste du bouquin, tu com­mences par repren­dre ton pre­mier para­graphe. Ça ne marche pas, tu pens­es for­cé­ment que c’est de la m**de. Alors tu sup­primes ce que t’as fait, et au final tu n’as rien écrit. Alors que si t’avais con­tin­ué à écrire pour finir le livre, pour faire une deux­ième lec­ture, tu aurais pu amélior­er ton pre­mier jet. Si tu jettes directe­ment ton pre­mier para­graphe, tu n’as pas de bonnes fon­da­tions pour ton travail.

Donc ce qu’on a voulu faire dans Vol­cano, c’est bâtir des fon­da­tions assez vite. Pas d’edit­ing, juste de la créa­tion. Créa­tion, créa­tion, créa­tion. Et puis on s’est mis trois ou qua­tre semaines dans un stu­dio pour faire tout l’edit­ing d’un seul bloc. Parce qu’on avait l’idée générale, et tous les titres en tête

 

 

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L’un des sin­gles sor­tis avant l’al­bum, c’est le très effi­cace “I’ve been in love”. De quoi par­le exacte­ment la chan­son, quelle était l’idée ?

Cette chan­son c’est sim­ple­ment la joie ! La pre­mière idée qui est venue c’est le “I’ve been in love”[il chante]. C’est juste nos­tal­gique, roman­tique. Mais c’est aus­si “I’VE BEEN in love” : donc “j’é­tais amoureux”, sans con­texte. Il y a tou­jours cet élé­ment de mys­tère sur ce que ça veut vrai­ment dire. J’aime que ça soit sim­ple et com­pliqué à la fois, en quelques mots.

 

 

Jun­gle entre­tient un lien fort avec la danse, que ce soit dans vos clips ou vous-même sur scène. Vous avez beau­coup tra­vail­lé avec la choré­graphe Nat Zan­gi, on peut en parler ?

Bien sûr, avec plaisir ! Elle a tra­vail­lé avec notre groupe Jun­gle sur les clips du sec­ond album. Et puis elle est car­ré­ment venue chanter avec nous en live, par­tir en tournée avec nous. Elle nous a ouvert pas mal de portes, nous a fait ren­con­tr­er ceux avec qui on bosse encore aujour­d’hui. Main­tenant elle est choré­graphe pour de gros artistes, elle est “move­ment direc­tor” pour dévelop­per l’ai­sance scénique des artistes sur scène. Elle est vrai­ment incroyable.

 

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Et pourquoi Jun­gle est si attaché à la danse ? 

C’é­tait si évi­dent pour nous : si on fait de la musique pour que les gens dansent, alors la plus belle chose c’est de regarder quelqu’un danser dessus. Pour nos clips, on ne voulait pas créer des his­toires com­pliquées. On voulait trou­ver un style qui soit unique, qui nous rende iden­ti­fi­able : des danseurs, un seul plan-séquence, pas de montage.

 

 

En fait, c’est comme ça que vous avez mis votre album en avant. Vous n’aviez pas encore mon­tré vos vis­ages, cer­tains spec­ta­teurs vous con­fondaient même avec vos danseurs. L’idée, c’é­tait que l’au­di­teur se con­cen­tre seule­ment sur le côté artistique ?

Très sim­ple­ment, oui ! Je pense qu’on a aus­si gran­di avec le fait que les artistes, avant, gar­daient un cer­tain côté invin­ci­ble, inac­ces­si­ble. On a mis longtemps à savoir qui était Daft Punk. Et même, on ne savait pas vrai­ment qui était David Bowie, qui sont Jus­tice, les Strokes etc. Parce que ces groupes-là ne pos­tent que rarement sur leur compte Insta­gram (s’ils en ont), parce qu’ils n’ont pas gran­di dans l’ère des réseaux sociaux.

 

Alors vous avez voulu vous inspir­er de ça, dans un sens ? 

Pour nous, ne pas tout savoir à pro­pos des artistes que tu aimes, ça te per­met de créer une image d’eux dans ta tête. Et je pense que ça crée un attache­ment plus fort avec eux. Comme avec les livres : quand tu lis un roman, tu ne sais pas à quoi ressem­blent les per­son­nages. Donc tu te crées une image d’eux. Et quelque part, tu t’at­tach­es plus à eux émo­tion­nelle­ment qu’en regar­dant un film. On voulait que le pub­lic puisse retrou­ver ça avec Jungle.

 

Tout le monde ne le sait pas mais vous jouez régulière­ment en DJ set, comme au Bois de Vin­cennes pour la Fête de la Musique par exem­ple. Quel genre de musique jouez-vous ?

[Il ouvre son PC et fait écouter les titres qu’ils ont joués à Vin­cennes. On passe de Kay­trana­da à Alan Dixon en pas­sant par Tom San­ta et Bicep

Juste des trucs ‘funs’ : un peu de house, de dis­co, de garage house… Un peu de Kay­trana­da, de Bicep, quelques remix­es de nos titres… Ça c’est vrai­ment cool par exem­ple : “Make Me” de Borai & Den­ham. Bref des morceaux cools, entre joie et exci­ta­tion, qui don­nent envie de danser ! C’est ça aus­si Jungle.

 

Avec Josh, vous avez les mêmes références en ter­mes de musiques électroniques ?

Finale­ment, oui ! On aime juste quand ça sonne bien, et on s’ac­corde sou­vent sur les mêmes choses. On a évidem­ment gran­di en écoutant la French Touch. Ça a représen­té une ééééénorme part de ma vie. Tout ce qui sor­tait d’Ed Banger. J’ado­rais Cas­sius… C’est telle­ment sim­ple de dire Daft Punk et Jus­tice ! Mais ils sont stupé­fi­ants. J’ai eu la chance de voir les deux groupes en live, et à chaque fois… [il mime sa tête en train d’ex­plos­er] Des artistes incroy­ables, qui avaient LEUR truc, et fai­saient les choses à leur manière. C’é­tait fou de vivre ces moments, enfant, d’é­couter leur musique avec tous mes amis.

Jungle Studio

Joshua Lloyd-Watson et Tom McFar­land au stu­dio © LYDIA KITTO

 

Rapi­de­ment, c’est quoi une bonne chan­son de peak time ?

Mmmmh… Je vais dire “I Wan­na Be Your Lover” de Prince. Parce que c’est ma chan­son pop préférée.

 

Et une très mau­vaise chan­son, pour vider le dancefloor ? 

C’est telle­ment sub­jec­tif… Mais quand même, n’im­porte quelle com­po par Louis Tom­lin­son ou Zayn Malik (deux ex-One Direc­tion). Le seul bon mem­bre des One Direc­tion, c’é­tait Har­ry Styles ! Aujour­d’hui c’est un roi (rires).

 

Rap­pel : Vol­cano, le nou­v­el album de Jun­gle, est sor­ti ven­dre­di 11 août :