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© Zoé Joubert / clip de "bootycall" réalisé par Lily Taïeb
29 novembre 2022

💿 Yoa, de l’ange à la bad bitch avec son EP ‘Chansons tristes’

par Bérénice Hourçourigaray

Avec son EP Chansons Tristes, Yoa se hisse parmi les jeunes artistes françaises les plus prometteuses. Sa voix cristalline contraste avec son franc-parler et se fond sur des productions à la frontière entre l’hyperpop et l’électronique. Des Chansons tristes oui, mais qui paradoxalement nous réconfortent.

Yoa. Trois lettres qui s’apprêtent à se hisser au rang des artistes les plus ambitieuses de la musique pop française. Son deuxième EP, signé chez Panenka music, marque une nouvelle couleur sur sa palette musicale. Avec des productions beaucoup plus travaillées confiées à Tomasi et Alexis Delong, elle vacille entre hyper pop et électro avec des morceaux aux réminiscences d’Oklou ou de l’artiste anglaise PinkPantheress.

Côté style : un délicieux mélange entre la voix angélique de Billie Eillish et la candeur et l’esthétique ‘années 2000’ aussi kitch que réconfortante de BabySolo33. C’est ainsi qu’après son premier EP Attente, basé sur le duo piano/voix, elle assure la première partie de Feu ! Chatterton à L’Olympia de Paris.

Son timbre cristallin était ce qu’il y avait de plus remarquable sur son duo avec MAGENTA, « Un Peu d’Amour« , sorti au début de l’été. Yoa était dans la sélection « chanson pop » des iNOUïs du Printemps de Bourges 2022, mais son dernier EP Chansons Tristes, elle prend un délectable tournant électro. Avec des textes toujours aussi sensibles mais beaucoup plus crus, elle renouvelle son image d’ange pour se transformer en bad bitch.

Un EP remède

Chansons Tristes c’est l’itinéraire, en sept titres, des nuits mouvementées de Yoa. Car les quatre murs d’une chambre peuvent être bien plus cruels qu’il n’y paraît. C’est le lieu des insomnies qui sont « comme ses sœurs » et des questions terrassantes qui ressortent par une déformation de sa voix, et une outrance d’autotune et d’échos. Plus le choix, Yoa assomme ses angoisses à coups de « paroxetine« , dernier titre de l’EP.

Elle présente tendrement « l’EP comme une sorte de petit remède moins coûteux qu’une thérapie ». Dans « insomniaques 4 ever » Yoa scande « Génération maladie mentale, normaliser la honte » : cri du cÅ“ur sanglant mais réaliste d’une artiste prête à embrasser les considérations grinçantes d’une jeunesse désenchantée.

 

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Certes il y a beaucoup de Chansons tristes, mais pas que. Elle arrive toujours à présenter ses tourments avec une pointe d’ironie. Ses textes se refusent à la facilité du mielleux. Ils sont cash, bruts, sans détour. « Parfois le soir je me sens seule. Je vais sur Pornhub pour me calmer. Une fois, dix fois, jusqu’à en pleurer » clame-t-elle dans « chanson triste« . Une femme de 23 ans qui assume sa consommation de porno tout en y mêlant une critique, ça claque. Car attention, ne vous fiez pas la voix angélique de Yoa : cet EP la révèle comme une ‘bady’.

 

Yoa, de l’ange à la lionne

La nuit, c’est aussi le moment pour retrouver son amant. À cet égard, « Maddy <3 » apparaît comme un réel pivot. Le morceau commence à la Billie Eillish, avec une superposition de voix cristallines a cappella. On s’attend à ce que Yoa s’attèle à son traditionnel mélange piano/voix.

Mais loin de là. Un beat reggaeton hérisse le poil. Il s’effile sur tout le morceau avec des variantes, parfois couplé par des « bébé », répétés frénétiquement par la chanteuse. Complètement addictif. « Je porte tes tresses préférées pour que tu viennes me dresser. » La fleur bleue se meut en tigresse qui ne cache pas ses intentions claires et limpides sur sa conquête du moment : du sexe et point barre. Il vaut mieux faire passer ses insomnies avec une rencontre nocturne qu’avec un lexo. On confirme Yoa, tu es bien aussi badass que Maddy -l’une des héroïnes ultra sexy de la série Euphoria.

L’EP est couronné d’une superbe pochette par Zoë Joubert, qui s’apparente plutôt à un portrait. Une larme dévale sa joue, des paillettes argentées ornent le creux de son Å“il. Yoa : au croisement de la mélancolie et de l’irrévérence.

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