💿 UTO sort ‘Touch the Lock’, premier album organique et joliment déstructuré

par | 26 08 2022 | chronique

Après 6 ans d’activité, le duo UTO sort enfin son premier album, Touch the Lock. Un album organique où se mêlent urgence et légèreté. Une immersion intérieure en pleine nature.

Le château d’Augerville dans le Loiret a vu passer entre ses murs beaucoup d’histoires. Des fêtes organisées au XIXe siècle par le politique Pierre-Antoine Berryer où se côtoyaient Chateaubriand, Alexandre Dumas fils, Franz Liszt, Rossini, Alfred de Musset ou encore Eugène Delacroix à la Libération où le le docteur allemand Kopp avait transformé Augerville en laboratoire de cocaïne. C’est non-loin de ce lieu chargé d’anecdotes et de récits, cloîtré dans une cabane-studio au milieu des bois, que le duo UTO s’est installé pour écrire son premier album Touch the Lock.

Depuis 2016, Emile et Neysa développent une pop indietronica à mi-chemin entre les genres, des sonorités symphoniques, organiques, parfois rock. À la fois envoutantes et déroutantes, un peu à l’image de ce château du Loiret. C’est avec les titres « That Itch » et  » The Beast » que les amoureux se font connaître du public. Deux titres antagoniques. Le premier est lourd, le second est léger, coloré, on court en pleine nature. Six ans après Touch the Lock est l’aboutissement des péripéties musicales de UTO.

 

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Le premier mot qui nous vient à l’esprit à l’écoute de ce premier album, c’est « nature ». Peut-être est-ce en raison du lieu où a été composé Touch the Lock. Au milieu des arbres et des champs, on ne peut qu’écouter la faune, la flore et puis son « moi » intérieur. Touch the Lock ne raconte pas une histoire en particulier. Il conte des sentiments et des ressentis. La pesanteur sur « Heavy Metal » et « Délaisse », la suspension et la déconnexion sur « Lock Myself » et » Behind Windows » et l’errance qui en découle sur « Row Paddle »,  » Steps in the dark »,  « Souvent Parfois ». Emile et Neysa ouvrent une boîte à questions et émotions, mais laisse le tout en suspens, sans réponse. L’une d’elles est d’ailleurs le deuil. La moitié du duo, Neysa, a perdu deux proches pendant l’enregistrement de l’album, ce qui a teinté une partie l’album. Notamment le titre « This New Phase » qui parle de la peine que représente la disparition d’un visage.

Ainsi s’enchainent sur ces 12 titres des morceaux urgents et graves, et des mélodies plus aériennes. Touch the Lock s’ouvre sur « Délaisse ». Un titre organique, qui donne l’impression de nous métamorphoser en l’eau, de nous déverser goûte par goûte dans une rivière. Il est ensuite suivi par « Row Paddle », dont la rythmique et et les claviers lourds et rapides, la voix de Neysa basse et frémissante, nous transportent dans une course poursuite en pleine forêt. En deux morceaux le décors de l’album est posé. Mais le titre pour nous qui marque Touch the Lock n’est autre que le single « Heavy Métal ». Une intro susurrée, puis des guitares heavy. Soudainement, le monde est beaucoup plus lourd sur nos épaules. Mais cela c’est avant que les claviers psychédéliques venues tout droit des années 60′ ne prennent le relais. On se remet alors à danser. Léger.

« Nous avons dû ouvrir de nombreuses portes en nous-mêmes pour faire ce disque. Nous ne sommes jamais restés fidèles à une méthode ou à un style. Nous avons dû continuer à déverrouiller des parties de nous-mêmes pour l’élaborer. C’est devenu une sorte de liberté de ne jamais se limiter à choisir une seule direction. Neysa a fait des morceaux toute seule pour la première fois, par exemple. Elle a senti qu’elle était prête à ouvrir cette serrure », explique Émile.

Trois artistes ont accompagné le processus de création de ce premier album. Kim Gordon et son titre « Sketch Artist« , Tirzah et Adrianne Lenker. On comprend alors d’où vient la pesanteur, l’expérimentation et la douceur de Touch the Lock. Sur « Behind   Windows » on retrouve la délicatesse d’Adrienne Lenker, sur « Heavy Metal », « Row Paddle » ou encore « Steps in the Dark » un peu de « Sketch Artist », et des bizarreries, textures sonores de Tirzah.

Touch the Lock n’est pas un album qu’on écoute à la volée, c’est un album dans lequel on s’immerge longuement pour en capter toute les subtilités et se laisser emporter dans un voyage intérieur en pleine nature.