đź’ż Album du mois : Squid [Warp]
C’est l’album du mois du TsuÂgi 140 : Bright Green Field de Squid, sorÂti chez Warp.
Chronique issue du TsuÂgi 140 : Free ParÂty StoÂry, disponible en kiosque et en ligne.
« HouseÂplants », « The CleanÂer », « Match Bet »… Si vous avez dĂ©jĂ eu vent de – ou tout simÂpleÂment entenÂdu – Squid, c’est sans doute par l’un de ses trois morceaux que la foudre est arrivĂ©e. Des titres aux allures de bullÂdozÂer post-punk qui ont su, depuis trois ans mainÂtenant, fĂ©dĂ©rÂer un pubÂlic qui aime danser collĂ©-serrĂ© en jouant des coudes tout en faisant tomber la moitiĂ© de sa pinte sur son voisin. Et pourÂtant, vous n’en entenÂdrez aucun de ces trois titres sur le preÂmier album des BriÂtanÂniques, Bright Green Field. Les yeux rivĂ©s vers l’avenir, ces cinq garçons de Brighton ont dĂ©cidĂ© de conÂtinÂuer Ă nous surÂprenÂdre, et plutĂ´t que de la jouer comme BeckÂham, de la jouer comme ils le veulent.
C’est d’ailleurs ce qu’ils chuÂchotent, disÂent et finisÂsent par crier 92 fois (on a compÂtĂ©) Ă gorge dĂ©ployĂ©e sur « NarÂraÂtor », « I’ll play my part » ou au choix « I’ll play mine ». C’est avec ce mantra qu’Ollie Judge dĂ©conÂstruÂit pièce par pièce ce perÂsonÂnage masÂculin, dont la vision des femmes se limÂite Ă celle créée par ses proÂpres fanÂtasmes. Une hisÂtoire dont son perÂsonÂnage serait le hĂ©ros autoÂproclamĂ©, avant que cette vision ne soit conÂtreÂcarÂrĂ©e par l’intervention vocale de Martha Skye MurÂphy, qui finiÂra d’ailleurs par prenÂdre le dessus. Une temÂpĂŞte de plus de huit minÂutes subÂlimĂ©e par la proÂducÂtion de Dan Carey, qui transÂforme les guiÂtares en avion Ă rĂ©acÂtion avant de faire briller un cor d’harmonie avec la mĂŞme intenÂsitĂ©. Autant dire que si Carey semÂble ĂŞtre de tous les bons coups – il a proÂduit le dernier album de Fontaines D.C. et le preÂmier black midi –, il y a de quoi penser que ce n’est peut-ĂŞtre pas qu’une quesÂtion de chance. Ce traÂvail d’orfèvre colÂlecÂtif s’exprime au grand jour sur « PadÂdling » et son groove dĂ©vasÂtaÂteur qui tombe dès la barre des cinq minÂutes passĂ©es. On reprend ensuite une claque sur l’incroyable « DocÂuÂmenÂtary FilmÂmakÂer » et ses cuivÂres virÂtuÂosÂes, avant de parÂtir avec « 2010 » sur un morceau alterÂnant entre expĂ©riÂmenÂtaÂtions jazz, guiÂtares heavy mĂ©tal et des mĂ©lodies rapÂpelant le traÂvail de John MurÂphy sur la bande origÂiÂnale du film 28 jours plus tard.
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📊 La formule : à quoi ressemblera ce premier album de Squid
Si Ă l’écoute de leur musique, on voit un avenir radieux se dessinÂer pour Squid, leurs textes ne sont pourÂtant pas des plus optiÂmistes. Un univers aux lignes dystopiques infuse entre chaque morceau, non pas inspirĂ© par une peur du futur, mais souligÂnant les traÂvers de notre prĂ©sent. Un imagÂiÂnaire nourÂri ausÂsi bien par les images du 11-septembre, qui ont trauÂmaÂtisĂ© une gĂ©nĂ©raÂtion Ă laqueÂlle apparÂtient Ollie Judge, que par la mĂ©lanÂcolÂie liĂ©e au BrexÂit dont est directeÂment inspirĂ© le morceau « G.S.K. » qui a fini par donÂner son ton Ă l’album. ÉviÂtant l’attaque frontale, Squid Ă©chappe Ă la poliÂtique de compÂtoir pour s’attaquer aux sujets conÂtemÂpoÂrains avec finesse, tout en rĂ©usÂsisÂsant un exploit dont peu de groupes peuÂvent se tarÂguer avec leur preÂmier album : celui d’avoir su crĂ©er un univers qui lui est propre.
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