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©Holly Whitaker
11 mai 2021

💿 Album du mois : Squid [Warp]

par Valentin Allain

C’est l’album du mois du Tsugi 140 : Bright Green Field de Squid, sorti chez Warp.

Chronique issue du Tsugi 140 : Free Party Story, disponible en kiosque et en ligne.

« Houseplants », « The Cleaner », « Match Bet »  Si vous avez dĂ©jĂ  eu vent de – ou tout simplement entendu – Squid, c’est sans doute par l’un de ses trois morceaux que la foudre est arrivĂ©e. Des titres aux allures de bulldozer post-punk qui ont su, depuis trois ans maintenant, fĂ©dĂ©rer un public qui aime danser collĂ©-serrĂ© en jouant des coudes tout en faisant tomber la moitiĂ© de sa pinte sur son voisin. Et pourtant, vous n’en entendrez aucun de ces trois titres sur le premier album des Britanniques, Bright Green Field. Les yeux rivĂ©s vers l’avenir, ces cinq garçons de Brighton ont dĂ©cidĂ© de continuer Ă  nous surprendre, et plutĂŽt que de la jouer comme Beckham, de la jouer comme ils le veulent.

C’est d’ailleurs ce qu’ils chuchotent, disent et finissent par crier 92 fois (on a comptĂ©) Ă  gorge dĂ©ployĂ©e sur « Narrator », « I’ll play my part » ou au choix « I’ll play mine ». C’est avec ce mantra qu’Ollie Judge dĂ©construit piĂšce par piĂšce ce personnage masculin, dont la vision des femmes se limite Ă  celle crĂ©Ă©e par ses propres fantasmes. Une histoire dont son personnage serait le hĂ©ros autoproclamĂ©, avant que cette vision ne soit contrecarrĂ©e par l’intervention vocale de Martha Skye Murphy, qui finira d’ailleurs par prendre le dessus. Une tempĂȘte de plus de huit minutes sublimĂ©e par la production de Dan Carey, qui transforme les guitares en avion Ă  rĂ©action avant de faire briller un cor d’harmonie avec la mĂȘme intensitĂ©. Autant dire que si Carey semble ĂȘtre de tous les bons coups – il a produit le dernier album de Fontaines D.C. et le premier black midi –, il y a de quoi penser que ce n’est peut-ĂȘtre pas qu’une question de chance. Ce travail d’orfĂšvre collectif s’exprime au grand jour sur « Paddling » et son groove dĂ©vastateur qui tombe dĂšs la barre des cinq minutes passĂ©es. On reprend ensuite une claque sur l’incroyable « Documentary Filmmaker » et ses cuivres virtuoses, avant de partir avec « 2010 » sur un morceau alternant entre expĂ©rimentations jazz, guitares heavy mĂ©tal et des mĂ©lodies rappelant le travail de John Murphy sur la bande originale du film 28 jours plus tard.

 

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Si Ă  l’écoute de leur musique, on voit un avenir radieux se dessiner pour Squid, leurs textes ne sont pourtant pas des plus optimistes. Un univers aux lignes dystopiques infuse entre chaque morceau, non pas inspirĂ© par une peur du futur, mais soulignant les travers de notre prĂ©sent. Un imaginaire nourri aussi bien par les images du 11-septembre, qui ont traumatisĂ© une gĂ©nĂ©ration Ă  laquelle appartient Ollie Judge, que par la mĂ©lancolie liĂ©e au Brexit dont est directement inspirĂ© le morceau « G.S.K. » qui a fini par donner son ton Ă  l’album. Évitant l’attaque frontale, Squid Ă©chappe Ă  la politique de comptoir pour s’attaquer aux sujets contemporains avec finesse, tout en rĂ©ussissant un exploit dont peu de groupes peuvent se targuer avec leur premier album : celui d’avoir su crĂ©er un univers qui lui est propre.

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