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Capture d'écran de l'émission
16 février 2021

Bientôt des Victoires de la musique électronique ? Technopol ouvre le débat.

par Antoine Barsacq

23 ans après la récompense de Laurent Garnier pour son album 30, la musique électronique était la grande absente des Victoires de la musique ce dernier vendredi 12 février. L’association de défense des musiques électroniques Technopol reproche à l’institution un manque de représentativité de la musique française aujourd’hui et pose l’idée d’une cérémonie à part.

Il y a un an, nous commentions l’édition 2020 des Victoires de la musique en remarquant que « la décision de supprimer les catégories par genre musical n’est pas vide de sens tant les artistes et ceux qui consomment la musique se passent d’étiquettes, mais peut-être au détriment d’une juste représentation de la scène musicale dans son entièreté. » Hier soir, la musique électronique était absente de la 36ème cérémonie des Victoires. Même un artiste important de la scène française comme Rone, pourtant nommé aux Césars pour la meilleure bande-son, n’avait visiblement pas mérité sa nomination. On aurait également pu penser à certains producteurs des tubes qu’on entend actuellement à la radio, comme par exemple Saint DX qui est derrière la prod de « 911 » de Damso ainsi que six autres titres de son album. Seul Woodkid semblait tenir la chandelle, nominé dans l’arrière catégorie « création audiovisuelle » – si tant est qu’il soit encore vraiment « électronique » et pas tout simplement « pop ». Cela pose évidemment un problème de juste représentation du panorama de la musique hexagonale.

 

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Tommy Vaudecrane, co-fondateur de Technopol, association de promotion des musiques électroniques qui organise notamment la Techno Parade, se demande quels intérêts cette cérémonie sert. Alors que 40% de la musique française qui s’exporte est électronique (avec notamment Acid Arab ou Carpenter Brut comme ses plus fréquents ambassadeurs, selon le Bureau Export du CNM) et que ses artistes sont réputés dans le monde entier, la cérémonie a snobé toute la scène. Dépité, il constate que « quand il faut payer, on ne nous oublie pas, par contre quand il faut récompenser, on nous dit que ‘c’est compliqué’. » Cette décision vient pourtant à un moment où la musique électronique n’a jamais été aussi populaire : « Les affiches des festivals, même généralistes, affichent des DJs qui font venir beaucoup de monde. »

« Quand il faut payer, on ne nous oublie pas, par contre quand il faut récompenser, on nous dit que ‘c’est compliqué’. »

Au-delà de cette absence, Technopol reproche aussi à la cérémonie de ne pas refléter les attentes de son public : « C’est un événement présenté par Stéphane Bern où les musiques les plus écoutées par les jeunes sont absentes : pas assez de rap, pas d’électronique ». Il salue néanmoins la plus grande part de diversité de genre depuis quelques années, mais fustige le manque de diversité musicale auquel le nom laisse pourtant croire : « Pourquoi nommer cette cérémonie Victoires de la ‘musique’ ? Il vaudrait mieux les renommer Victoires de la ‘pop’, ça aurait plus de sens ».

Incompréhension et déception

Certains chez Technopol en viennent à s’interroger sur la nécessité d’être représenté à cette cérémonie et éventuellement de créer un événement à part, représentatif de la scène électronique française cette fois, avec tous les sous-genres qu’elle inclue. Même si cette idée est encore au stade embryonnaire, certaines pistes sont envisagées. Il s’agirait surtout de ne pas reproduire les mêmes schémas qui ont cours aux Victoires de la musique où « la dominance des majors décide de ce qui est légitime ou non » et où l’entre-soi règne. L’éventuel projet permettrait ainsi de réaliser un événement festif, dans un format plus court, et de dépasser la lourdeur de la cérémonie diffusée sur France 2. Pour Vaudecrane, si ce projet venait à être réalisé, la représentativité serait le maître-mot : « On oublie tout le circuit alternatif avec ce genre de cérémonie, mais il faut représenter les 5 000 DJs qui sont en France toute la base de notre musique« .

Aussi, en cette période où la musique électronique souffre du Covid, beaucoup chez Technopol pensaient quon « pouvait s’attendre à une preuve de solidarité de la part de l’institution. Ces choix décrédibilisent les Victoires de la musique. » Ainsi, pour la scène électronique, cette cérémonie avait un goût particulièrement amer, à l’heure où les protocoles sanitaires drastiques interdisent toujours la reprise des soirées et concerts depuis bientôt un an.

« On pouvait s’attendre à une preuve de solidarité de la part des Victoires de la musique. »

Enfin, sur une dernière note plus positive, on sent depuis quelques temps une prise de conscience de l’institution qui cherche malgré tout à s’adapter à son l’époque en réduisant par exemple le nombre de catégories pour réduire son historique longueur, ou avec la création de la catégorie du « titre le plus streamé ». Mais les efforts sont à poursuivre.

Le palmarès des Victoires de la musique 2021 :

Artiste masculin : Benjamin Biolay
Artiste féminine : Pomme
Révélation masculine : Hervé
Révélation féminine : Yseult
Album de l’année : Grand Prix de Benjamin Biolay
Création Audiovisuelle : « Nous » de Julien Doré
Chanson originale : « Mais je t’aime » de Camille Lellouche et Grand Corps Malade
Titre le plus streamé : « Ne reviens pas » de Gradur et Heuss L’Enfoiré

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