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© Frédéric Ragot Instagram : fredrgt
18 juillet 2019

Blood Orange à l’Elysée Montmartre : un concert qui donne la foi

par Elie Chanteclair

L’orange sanguine se tenait là, lunettes teintées, casquette plate noire et veste assortie. Elysée-Montmartre, 15 juillet 2019, vingt heures tapantes : l’occasion était donc trop belle, et surtout trop rare. Né outre-Manche, le désormais New-yorkais est effectivement assez peu coutumier des scènes européennes, encore moins françaises ; la dernière venue de Dev Hynes dans notre capitale remontait à novembre dernier, au Pitchfork Festival. D’autant plus que cette nouvelle visite estivale s’accompagnait d’une actualité de taille : vendredi dernier sortait Angel’s Pulse, mixtape annoncée quelques jours auparavant et fidèle à la créativité débordante du chanteur/producteur de 33 ans. Zigzaguant entre les pseudonymes (on n’oublie pas le délaissé Lightspeed Champion), Blood Orange – adopté depuis le début des années 2010 à l’occasion de la Blood Orange Home Recording Mixtapedonne suite à l’excellent album Negro Swan, à l’aide d’un R’n’B toujours élégant où les voix envoûtantes, les sonorités délicieusement soul, les influences rap et les batteries hybrides accouchent d’un disque innovant et très enthousiasmant.

Hynes ne vient pas seul ; c’est d’ailleurs l’un des grands points forts du R’n’B « alternatif » par rapport au rap, quelle que soit l’échelle. La plupart des rappeurs – Dieu merci, ça ne concerne pas tout le monde, le seul Kendrick Lamar suffit à nuancer l’observation qui va suivre – se contentent de shows bien souvent paresseux, où une paire de platines et une bande-son se battent en duel. Alors que leurs concerts se transforment en vagues DJ-sets option playback, le R’n’B se montre généralement plus généreux en terme de prestation scénique. The Weeknd, Frank Ocean ou The Internet : tous misent sur les instruments et leurs instrumentistes, qui amènent une saveur organique, une réelle maîtrise et une certaine classe non négligeables en 2019.

Blood Orange fait partie de cette école ; débarquent donc sur scène batteur, bassiste, choristes, guitariste, claviériste et saxophoniste. Sans oublier Dev Hynes himself, qui alterne avec grande aisance les moments de chant, piano et guitare électrique. Aisance et beaucoup de talent : tout est fait dans la grandeur et la subtilité. Les solos de guitares sont toujours maîtrisés et justifiés, les explosions instrumentales -propulsées par un saxophone ou un alliage de vocalises – font frissonner, les puissants sons électroniques de la batterie sont sublimés par un jeu bien organique. L’orange enchaîne ses titres phares et défend ses nouveautés , les modifiant ou les étirant comme il l’entend, comme son petit tube « You’re Not Good Enough », impeccablement dansant et funky. Il n’hésite pas non plus à s’effacer derrière ses choristes, qui se lancent dans des démonstrations vocales à couper le souffle. Le concert se finit en apothéose, après seulement une bonne heure de jeu… et aucun rappel. Mais peu importe la durée, ce genre de prestation redonne la foi. Il ne manquait plus qu’une nef, des vitraux et une chorale de gospel.

Meilleur moment : quand Dev s’est pris pendant quelques minutes pour un guitar hero avec slides, tapping et doigts qui parcourent le manche à toute berzingue

Pire moment : pas de rappel. Quand même…

© Frédéric Ragot Instagram : fredrgt

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