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27 juin 2024

Bob Sinclar, parrain du BPM Contest : son regard sur la relève électronique | INTERVIEW

par Patrice BARDOT

Référence des concours consacrés aux jeunes productrices et producteurs électroniques, le BPM Contest lance sa douzième édition 2024 ce samedi 29 juin à Paris en association avec la SACEM, Clubbing TV et Tsugi. La péniche Fluctuart accueillera les live des douze lauréats de 11h à 19 h qui seront relayés sur nos réseaux.

Avec comme parrain pour succéder à Étienne de Crecy, Chloé, Pedro Winter ou Vitalic, un certain Bob Sinclar. On a donc posé quelques questions à Christophe Le Friant de son vrai nom, co-fondateur du label Yellow Productions qui fête ses trente ans cette année pour connaître la signification de cet engagement au BPM Contest en direction des nouveaux talents.

 

bpm contest

©DR

Pourquoi as-tu accepté ce rôle de parrain du BPM Contest ?

J’ai toujours aimé transmettre. C’est très important la transmission. Ce concours lancé par Sébastien Roch que j’aime beaucoup par ailleurs, me permet en tant que parrain de répondre à des questions que des jeunes producteurs peuvent se poser et je trouve ça très sympa. Attention, je ne parle pas de questions du genre : comment on fait pour être célèbre ? (rires)…

Je suis donc très honoré que Seb m’ait demandé de jouer ce rôle :  on va aider des jeunes, c’est un joli moment qui correspond en plus aux 30 ans de mon label Yellow Productions. On a démarré à une époque où cette scène n’existait pas. Aujourd’hui on regarde les DJ’s comme des stars, quand on a commencé ils étaient considérés comme des drogués…

 

Quels conseils à donner aux jeunes producteurs pour réussir ?

L’important n’est pas d’avoir du succès immédiatement, mais de posséder la couleur musicale la plus originale qui trouvera peut-être son public sur la durée, et qui va pourquoi pas te permettre de devenir un des leaders de ta scène. Je crois aussi qu’il ne faut pas être dans la tendance du moment. C’est ringard et c’est même être déjà “has been”. C’est la clé. C’est comme ça que j’ai commencé.

On a créé le label avec DJ Yellow parce que personne ne s’intéressait à ma musique. Forcément dix ans plus tard, quand je sors “Love Generation” et que ça explose dans le monde entier, ceux qui me suivaient à mes débuts, aux Inrocks et dans les journaux spécialisés me tournent le dos sous prétexte que j’ai vendu mon âme au diable. C’est normal et ce n’est pas grave parce que le public a répondu présent et je considère avoir été intègre en faisant juste évoluer ma musique.

 

Aujourd’hui, pour un jeune producteur, le challenge c’est de durer ?

Le challenge c’est déjà de sortir un titre, puis deux, puis trois. Je ne sais même pas si aujourd’hui c’est possible de faire une carrière de 10, 20, 30 ans. On voit beaucoup de jeunes qui arrivent avec un track très fort et puis il n’y a plus rien derrière. Mais ce qui est assez fou aujourd’hui, c’est que tout est possible.

Quand j’ai commencé, d’abord il fallait soit aller dans un studio ou alors construire ton home studio, deux options qui coûtaient alors beaucoup d’argent. Ensuite, il fallait fabriquer les vinyles pour qu’il soit joué par les DJ’s pour te faire connaître, puis, s’il avait attiré l’attention des radios, elles pouvaient te le passer. Le processus était très long, ça pouvait durer six mois.

Aujourd’hui, avec un ordinateur et des logiciels puissants tu peux faire tout et n’importe quoi. Tu postes une petite vidéo du titre sur les réseaux sociaux, si ça marche, tu peux ensuite trouver une plateforme qui t’aide à sortir le titre dans le commerce. En théorie, c’est directement du producteur au consommateur. Mais du coup comme ça apparait facile, il existe un nombre énorme de nouveaux producteurs chaque mois et pour arriver à ce que ton titre soit remarqué, même pour moi, c’est comme jouer au loto.

Avoir accès aux playlists qui sont le nerf de la guerre, c’est très difficile. Il faut réfléchir à comment tu vas promouvoir non seulement ta musique, mais aussi ta personnalité sur les réseaux. Il faut être acteur.

 

BPM contest

©DR

Tu as été un peu précurseur en créant ce personnage de Bob Sinclar que tu as mis en scène et avec lequel tu continues de jouer aujourd’hui

Au départ en 1998, je l’ai fait sans calcul à une époque où les producteurs étaient très anonymes. Je crois que la French Touch a mis en avant grâce à leur style et à leur image des DJ’s français qui ont été tout de suite identifiables. C’est grâce à cela qu’ils ont pu jouer partout et devenir énormes.

Aujourd’hui, malheureusement, l’image a pris le pas sur la qualité de la musique. Quand un jeune producteur arrive dans une maison de disque, on va lui demander combien il a de followers avant même d’écouter sa musique. C’est-à-dire que si tu es excellent, mais que tu n’en as pas, tu ne possèdes quasiment aucune chance, alors que si tu as moins de talent, mais beaucoup de ces fameux followers, alors il y a peut-être une possibilité qu’un label s’intéresse à toi. C’est un peu pervers ce système. Les réseaux sociaux ont transformé la qualité de la musique, pas forcément en mieux.

 

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Est-ce que l’on te sollicite pour des conseils ?

Jamais. Je ne trouve pas ça bizarre. Aujourd’hui, comme je te le disais, on me pose plus souvent des questions sur comment on fait pour être connu sans penser à mon parcours depuis trente ans. Les gens me voient dans un club, les bras en l’air, en jouant mes tubes et ils se disent que c’est “easy” de jouer deux heures et de prendre autant d’argent.

Ils ne voient pas le travail que j’ai effectué depuis mes débuts, les investissements sur les vidéos, les photos. D’accord il y a un vrai business aujourd’hui, mais il faut investir beaucoup d’argent aussi, donc non ce n’est pas facile. Et puis quand j’ai commencé, il n’y avait pas de possibilité d’être connu en étant que DJ.

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