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27 mars 2025

Dave Clarke, sans concession avant Mia Mao | INTERVIEW

par Siam Catrain

Le 5 avril prochain Dave Clarke, le « Baron de la techno », prendra les commandes de Mia Mao pour sa première résidence ‘Off The Grid‘. Techno, hard, intransigeant : Tsugi l’a sondé avant cette belle date parisienne.

Dave Clarke a encore frappé. Cette fois, c’est à Mia Mao qu’il posera ses flight cases, le 5 avril, avec une promesse : offrir un espace où la musique respire, où les compromis n’existent pas, où le bruit du mainstream s’arrête net à l’entrée.

« Off The Grid », c’est le nom de sa nouvelle résidence, en même temps qu’un bras d’honneur à l’aseptisation des dancefloors et à l’uniformisation sonore. Ici pas de hits prémâchés ni de drops faciles, pas d’ego inutile. Juste du son brut distillé par des artistes qui n’ont pas oublié l’essence de la techno : une musique qui parle, qui cogne et qui vit.

 

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La foule est là pour ça, et lui aussi. Dave Clarke surnommé « le Baron de la techno », est une figure de la scène électronique depuis les années 1990. DJ et producteur britannique, il s’est distingué par son style brut et avant-gardiste mêlant techno, hard et punk. Connu pour son franc-parler et son exigence artistique, il a laissé des albums cultes comme Archive One et sa série Red. Avant cette première résidence, on a discuté un peu avec lui. Production, digging, mix, Mia Mao et futur… On vous partage tout ça avant son set le 5 avril.

 

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Archive One a marqué les esprits avec son approche brute et analogique. Comment ton processus de production a-t-il évolué depuis cet album ?

Dave Clarke : J’ai commencé avec de petites machines analogiques et des samplers offrant une palette de sonorités très particulières. Produire sur ce genre de machines coûtait cher. Au début des années 1990, je suis aussi passé au numérique avec Logic. Même si j’ai fait des allers-retours avec d’autres logiciels de montage audio et d’autres machines, Logic reste un bel outil qui n’oblige pas à mettre la main au portefeuille à chaque mise à jour. Depuis mes débuts, le logiciel a évidemment changé et s’est amélioré.

Je donne des cours à la fac à Amsterdam. J’ai essayé de faire deviner à mes élèves combien de gigaoctets étaient autrefois disponibles pour les plugins. Ils ont tous misé sur 10 Go. Et non ! À l’époque, on n’avait que 2 Go. Il fallait faire des choix, sélectionner quelques plugins qu’on tordait dans tous les sens pour trouver de nouveaux sons intéressants.

Ce qui est bien aujourd’hui, c’est qu’on peut empiler plusieurs couches d’automations. On peut superposer plusieurs niveaux d’effets « delay » ou « spatial » pour enrichir la composition et donner une toute nouvelle dimension au son, ce qui n’était pas possible avant.

 

Ton son est reconnu pour son punch et son agressivité. Penses-tu qu’avec le temps, tes productions vont s’adoucir ?

Dave Clarke : Je ne pense pas avoir voulu faire de la musique agressive juste pour être agressif, ça n’a pas de sens. Avant la techno, je viens du punk et du rock. Leur énergie m’a nourri. Une colère et une puissante envie de liberté ont guidé certaines de mes productions pour leur donner une âme.

J’ai déjà fait des remixes pour des groupes de rock, comme Mirwais ou Depeche Mode. Les rythmes sont évidemment plus lents, mais la musique a une raison d’être. Une musique purement agressive qui ne veut rien dire n’est, en soi, pas très difficile à faire.

Quels artistes ou genres ont eu le plus d’impact sur ta façon de produire et de mixer ? Qu’est-ce qui t’influence aujourd’hui ?

Dave Clarke : Il n’y a pas un artiste spécifique qui m’ait particulièrement marqué, que j’aie suivi ou qui ait été une sorte de mentor. Je ne cherche pas à suivre une tendance, ni à copier ce que fait un autre artiste. Je n’en vois pas l’intérêt. Je suis une éponge : les musiques et les différentes sonorités que j’écoute nourrissent ce que je fais aujourd’hui avec la techno.

Je conseille à mes étudiants de passer par la copie ou l’imitation pour se former à la composition. C’est important pour l’apprentissage technique et scientifique que cela procure. Cependant, pour donner une âme à un morceau, il faut mettre cette science au service du message et de l’intention derrière la production.

 

À lire sur Tsugi.fr : Dave Booth, DJ historique du Manchester de Joy Division est décédé

 

La techno des années 1990 était brute et expérimentale, tandis qu’aujourd’hui elle est souvent ultra-produite et calibrée pour le streaming. Comment perçois-tu cette évolution ?

Dave Clarke : Personnellement, je m’en fous. Je suis désolé pour tous ces DJs qui ne fonctionnent qu’aux streams et aux vues sur les réseaux sociaux.

Dave

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Toutefois, même si les plateformes de streaming sont condamnables pour la manière dont elles rémunèrent les artistes ou exploitent les morceaux générés par IA, on ne peut pas nier que le streaming reste un outil important. Pour moi, c’est aussi un terrain de jeu qui me permet de préparer mon émission « White Noise« .

Avant, il fallait aller chez des disquaires, essayer une pile d’une centaine de CDs ou de vinyles. Aujourd’hui, on peut digger et écouter de nouvelles choses à l’infini. Cela permet, au même endroit, d’explorer presque toute la carrière d’un artiste. En général, je descends tout de suite au premier single ou EP sorti pour capter l’essence, la sensibilité et la raison d’être du projet.

 

Tu continues de digger de la musique en physique ?

Dave Clarke : Bien sûr, je vais toujours chez des disquaires. J’y étais encore, il y a quelques jours. Quand je suis rentré, un Gallois essayait un disque. Ça a immédiatement capté mon attention. S’il n’avait pas été là, ou si je n’avais pas été à cet endroit à ce moment précis, je n’aurais peut-être jamais découvert ce que j’ai écouté ce jour-là.

 

Partager de la musique sans passer par un disque ou une plateforme de streaming a une valeur toute particulière. C’est ce qui donne au métier de DJ tout son sens. Pourquoi la résidence à Mia Mao t’a-t-elle séduit ?

Dave Clarke : C’est Mia Mao qui est venu vers moi. Je connaissais déjà quelques personnes de l’équipe. Mais ce qui m’a séduit dans cette résidence, c’est que je parlais avec des gens qui aiment vraiment la musique. Et je pense que le public qui sera présent aussi. J’ai l’impression que cette date offre beaucoup de liberté dans la construction du set. Les gens connaissent le type de musique que je fais et savent à quoi s’attendre pour la date du 5 avril.

 

J’adore la France pour ça. La subvention de la culture et son indépendance par rapport à d’autres pays d’Europe permettent aux Français d’être très libres. À Paris le soir, ils ont le choix d’aller écouter ce qu’ils veulent, en s’habillant comme ils le souhaitent. Je pense qu’en France, vous n’avez jamais connu le punk comme en Angleterre, parce que chez vous, des gens se retrouvent tous les samedis à République pour se révolter.

 

30 ans de carrière, 800 épisodes de « White Noise »… Quelle est la suite pour Dave Clarke ?

Dave Clarke : (Rires) Je pense passer plus de temps en studio pour produire des tracks plus punk. Je ne joue pas d’instruments acoustiques, j’aurais bien aimé, mais je pense qu’il est trop tard ! Pour le moment, je veux déjà me remettre derrière les consoles. Le reste, ce sera pour plus tard.

 

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Dave Clarke présentera sa nouvelle résidence à Mia Mao le 5 avril. Sur le line-up de « Off The Grid », on retrouvera également Bloody Mary, Spencer Parker et Surgeon. Impatient·e ? Nous aussi ! On vous remet la billetterie juste ici.

 

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