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©Jacob Khrist
17 janvier 2020

Le Péripate est mort, vive le Péripate

par Marthe Chalard-Malgorn

Une page se tourne. Le Peripate-Freegan Pony, occupant originel du lieu sous le périphérique du 19e arrondissement de Paris, n’a pas remporté l’appel à projet lancée par la municipalité en décembre dernier pour reprendre la concession. Elle en confie désormais les clés au collectif FAWA pour cinq ans, trois anciens membres du club alternatif, qui doit d’abord se charger de remettre le squat aux normes et maintenir l’identité du lieu. Le Peripate-Freegan Pony était une association culturelle et surtout un club, solidaire et libertaire, porté par Aladdin Charni depuis 2015. Situé dans une sorte de hangar de 1 000 mètres carré sous le périphérique, le lieu régnait en maître dans le milieu de la nuit parisienne indomptable et débridée.

Le jour, le Freegan-Pony était un restaurant solidaire servant des repas à prix libre pour les plus démunis. La nuit, le Péripate se transformait en temple des fêtes les plus déjantées de Paris où pendant 15 heures chacun pouvait se défaire de ses vêtements et de ses mœurs. Seulement voilà, le hangar n’était pas aux normes, ce qui lui a valu une pression de la part de la municipalité ainsi qu’une dénonciation pour concurrence déloyale, en juin dernier, par le SNEG & Co, le syndicat des lieux festifs & de la diversité.

Pourtant, avant d’en arriver à la fermeture définitive, Aladdin Charni et les membres de son association se sont battus pour récolter les 900 000 euros de financement nécessaires à la mise aux normes ERP (établissement recevant du public). Refusant éthiquement tout sponsoring de la part de marques d’alcool, le Péripate est parvenu à récolter 153 000 euros de subvention de la part de la municipalité ainsi que 30 000 euros de la part de particuliers suite à un appel aux dons. Ce ne fut pas suffisant. Sans une remise aux normes, interdiction d’organiser des soirées. Sans soirée, pas de financement nécessaire à la remise aux normes. Rideaux.

Mais le lieu n’est pas mort pour autant. Le collectif FAWA, gagnante de l’appel à projet, est portée par trois femmes habituées du Péripate : Camelia Ben, Jane Sargos-Vallade et la DJ Corbeille Dallas. Dans un communiqué de presse, elles ont annoncé que leur projet allait viser « le développement d’initiatives alternatives, sociales et écologiques, à travers l’organisation d’événements culturels, solidaires et culinaires. » Aussi, il leur tient à cœur d’envisager les « deux versants de cette identité comme devant communiquer l’un avec l’autre afin de créer et de renforcer le lien social. »

Le Peripate, vide / © Luc Bertrand

Concrètement, elles souhaitent rouvrir rapidement le restaurant solidaire. Ensuite, elles projettent d’organiser deux soirées par mois afin de préserver l’originalité première du lieu. Avant cela, il va falloir que la décision de la mairie de Paris soit acceptée par son Conseil. Puis, il s’agira d’entreprendre les travaux requis concernant la mise aux normes du site, notamment en matière de sécurité et de ventilation. Quant à Aladdin Charni, contacté par la rédaction, il se passe de commentaires : « Je recherche l’apaisement et je ne leur souhaite que de la réussite et du courage. » Du côté de la marie de Paris, le discours est également à l’encouragement par la voix de Frédéric Hocquart, adjoint à la nuit et la culture : « L’aventure continue avec un projet de Restauration solidaire et responsable, créatif, festif, nocturne et féminin. »

Le défi est de taille pour le collectif FAWA car ce hangar désaffecté, îlot intemporel aux aspects de club berlinois underground, fait partie des derniers bastions de la fête baroque, sauvage et libre de la capitale.

©Jacob Khrist

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