© MOMEM

Manque de diversité : le nouveau musée sur l’électro à Francfort durement critiqué

Un nou­veau musée dédié aux musiques élec­tron­iques a ouvert à Franc­fort ce 6 avril. Son souhait : célébr­er cette musique, et trac­er son his­toire, tout en met­tant en avant ses nou­velles fig­ures. Cepen­dant, le pro­jet ne fait pas l’unanimité.

L’histoire était belle. Annon­cé en 2015, le MOMEM, musée de la musique élec­tron­ique mod­erne, avait eu un par­cours tumultueux. Man­quant de fonds, puis d’un lieu, il a fini par ouvrir ses portes le 6 avril dernier. L’inauguration était accom­pa­g­née d’un DJ set de Sven Väth, objet de la pre­mière expo­si­tion du musée, en plein air à Franc­fort. Avec une volon­té de célébr­er non seule­ment cette musique mais sa cul­ture, le musée pos­sède égale­ment un espace de live et un bar. Bref, tout sem­ble aller pour le mieux. Mais le pro­jet a pour­tant subi une cri­tique forte.

Celle-ci est issue du col­lec­tif female:pressure, réseau mon­di­al d’artistes élec­tron­iques féminines, trans ou non-binaires. Fondé en 1998, il pub­lie égale­ment chaque année depuis 2012 un baromètre de la présence de ces artistes en fes­ti­vals, nom­mé FACTS. Le 6 avril, jour d’inauguration du MOMEM, il adres­sait une let­tre ouverte au maire de Franc­fort, Peter Feld­mann, et la respon­s­able de la cul­ture de la ville, Ina Hartwig. La ville est en effet le prin­ci­pal financeur du musée. Et les mots du col­lec­tif envers le musée sont durs. Female:pressure pointe deux prin­ci­paux prob­lèmes : le manque de diver­sité dans l’équipe direc­trice, et le manque de recon­nais­sance pour les artistes noirs de la techno.

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Le pre­mier point sem­ble pure­ment factuel. Que ce soient les DJ locaux impliqués, que ce soit Sven Väth ou les autres, ou le cura­teur Tobias Rehberg­er, il ne s’agit là que d’hommes blancs hétéro­sex­uels. Pour le col­lec­tif, « la pos­si­bil­ité d’une équité de genre sur les scènes pro­gresse notam­ment à tra­vers la présence de femmes et per­son­nes non-binaires dans les postes de déci­sion ». Cela con­duit, selon ielles, à un manque de recon­nais­sance de la place de ces artistes dans l’histoire de la musique électronique.

Le sec­ond point, lui, s’adresse directe­ment au maire. Dans son invi­ta­tion à l’inauguration du musée, il présente Franc­fort comme lieu d’origine de la tech­no. Pour le col­lec­tif, une telle affir­ma­tion vient réduire le rôle majeur des artistes afro-américains de Detroit, New York ou Chica­go. « Quand bien même il s’agirait là d’une phrase pure­ment pro­mo­tion­nelle, il s’agit d’une exploita­tion inad­mis­si­ble des cul­tures de peu­ples dont l’histoire est mar­quée par la migra­tion, l’oppression et la mar­gin­al­i­sa­tion de leurs réus­sites ».

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Pour­tant, dès ses pre­mières lignes, le musée met en avant la phrase « Black Music Mat­ters ». Les pre­miers musi­ciens célébrés, aux orig­ines de la tech­no, sont ain­si Fela Kuti, Franck­ie Knuck­les ou le bat­teur Earl Young. Mais female:pressure y voit avant tout une manœu­vre hyp­ocrite. « Nous ne pou­vons inter­préter cette mesure que comme une stratégie peu crédi­ble, avec l’intention de mas­quer le fait que les réels pro­tag­o­nistes du MOMEM sont prin­ci­pale­ment blancs ». Pour l’heure, ni le musée ni la ville de Franc­fort n’ont répon­du. L’in­ten­tion était pour­tant bonne.

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