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© M. Tchakmakdjian / C. Fraisse / F. Mayolet
26 juin 2023

Live report : La Magnifique Society 2023, jardin royal sous soleil de plomb

par Corentin Fraisse

« Donner son coeur avec un bouquet d’fleurs : ohlala, c’est Magnifique ! » La Magnifique Society était de retour en ce dernier week-end de juin, pour prouver que Reims reste une terre propice aux sacrements de rois et de reines. Trois nouveaux jours pleins de tendresse, de (bonnes) surprises musicales et de grandes confirmations, sous une chaleur écrasante… Chaleur qui a peut-être un peu entamé l’énergie de certains festivaliers.

Bonheur de retrouver la Magnifique Society après une édition record en 2022, où le le parc de Champagne avait accueilli 26 000 festivaliers dans un week-end chargé de bonnes ondes et de grands lives.

magnifique royal garden

© B.BARTHOLET

Au vu de la nouvelle programmation cette année, on était de toute évidence sur du grand-public (plutôt que de l’underground) et une volonté internationale. Comme on ne se refait pas, de notre côté on a évidemment passé pas mal de temps sur la seule des trois scènes à ne jamais prendre de pause : celle du Royal Garden, LA scène électronique de la Magnifique. La structure circulaire, club à ciel ouvert, avec des enceintes autour permettant une spatialisation parfaite. Ladite scène changeait de bannière chaque jour : Nova vendredi soir, Pan African le dimanche avec la présence de Derek Debru, créateur du festival Nyege Nyege… et Tsugi Radio le samedi. Fierté.

Au Royal Garden donc, on aura notamment vu Bonne Nuit à demain ouvrir dès le vendredi, avant l’excellent set de Yuksek et son Dance’o’Drome en b2b avec Marina Trench… Le dimanche Croustisbass invitait entre autres Niz, Vodkakoka et Monjules… Et évidemment le samedi était orchestré par la team Tsugi Radio, de 14h jusque tard dans la nuit, d’abord Moonshiners avec Panteros666, puis La Mverte et ses tracks suintants de sensualité, suivi par le duo Japonais Dongorizu formé par un MC, Mori et un producteur, Chomo.

C’était la belle surprise du samedi, juste avant de laisser place aux reimois du collectif La Forge, qu’on retrouve eux aussi puisqu’ils étaient déjà là l’année dernière, avec toujours autant de fougue et de volonté de partager, de communier avec le public présent -à l’aide de samples aussi éloignés que « Magalenha » de Sergio Mendes et « Welcome To Jamrock ». Profitez-en pour regarder la vidéo Instagram qui résume ce week-end au Royal Garden !

magnifique la forge

© B.BARTHOLET

magnifique royal g

© A.MASSIN

 

Côté concerts sur les deux autres scènes, les lives ont rythmé le week-end. Sur la scène Club Trotter, on est restés pendus aux lèvres de Clara et aux boucles synthétiques d’Armand du duo Agar Agar, ambiance entre new wave et rave 90’s, portée par un synthé modulaire qui transperce la peau. Coup de chapeau à « Trouble » qui, définitivement, fonctionne bien en live. Et que dire de leur scéno, avec cet immense rocher aux grands yeux rouges qui s’ouvrent et se referment ? Flippant à souhait. On l’a écrit plus haut, le festival a voulu renouer avec des ambitions internationales. En témoigne par exemple la présence de Rema, superstar pop-afrobeat venue du Nigeria, les Japonais de Dongorizu.

Et deux projets qui nous ont interpelé : d’abord Jan Verstraeten, qui a débarqué sur scène maquillé de blanc et coiffé d’oreilles de Mickey roses. D’ailleurs tout le groupe qui l’accompagne est vêtu de rose, de la bassiste au batteur en passant par le trio de cordes frottées. Côté musique c’est solaire, une pop chic des plus efficaces avec, çà et là, des cordes disco grandiloquentes à la ABBA. Comme un live de Jamiroquai, sans un chanteur qui en fait des caisses. Et alors s’il ramène un ours en peluche de 2 mètres 50 -toujours rose-, on ne peut que fondre pour le Flamand.

Profitez-en pour écouter l’intéressé, au micro de Tsugi Radio peu après son show :

 

magnifique verstraeten

© J.DERA

On s’est fait cueillir au moment où on s’y attendait le moins : ce fut devant Lova Lova, début d’après-midi sous la chaleur écrasante. On a vu débarquer ce punk de Kinshasa, vêtu d’un kilt écossais et des même ailes que Buzz L’Éclair -le fameux duo gagnant ? Son énergie sur les planches est folle, le jeu de scène habité, la voix est droite et le monsieur sait crier (ce qui n’est VRAIMENT pas donné à tout le monde, croyez-nous sur parole). Il offre une reprise de « I Wanna Be Your Dog » des Stooges, avec de vrais bouts de Lingala dedans… Dans l’assistance les hanches se décoincent, tout doucement.

Phoenix a également offert un moment de partage et de nostalgie, commençant par l’hymne « Lisztomania ». Puis suivront « Armistice », « If I Ever Feel Better », « Entertainment » devant un immense visuel de la galerie des glaces… Le chanteur Thomas Mars le dit lui-même entre deux chansons : « je voudrais bien parler, mais on a 7 albums et une heure de musique ». Ici on sait tenir un public, la scénographie est grandiose, et le travail sur les lumières est admirable : c’est pas Versailles, ici ? Un live plein, complet, qui a envoyé du bois et rendu honneur au duo basse-batterie, impeccable tout du long.

 

 

magnifique phoenix

©️ F. MAYOLET

 

Ont suivi trois grandes dames de la pop chantée en français, nouvelle génération. D’abord Angèle, dont le live nous a un peu déçu, peut-être pour la première fois. Depuis les premières chansons et les premiers lives, on est assez subjugués (on n’est pas les seuls) par les mélodies intelligentes et par le potentiel pop d’Angèle. Mais depuis le dernier album 95, depuis le feat avec Dua Lipa, depuis Coachella, le changement de dimension de la Belge nous déroute. C’est joli et propre, le show est calibré, les danses sympa, mais c’est carré et lisse. Donc très froid au ressenti. Qu’importe, une bonne partie du public a eu l’air de s’en satisfaire.

En revanche, Aya Nakamura n’a pas déçu. La dernière fois qu’on l’avait vue sur scène, c’était en 2019 à We Love Green. Alors le contraste a été saisissant : depuis, elle vend des disques dans le monde entier et remplit des stades. Son spectacle dégouline d’assurance, de chorés et de tableaux entre danseurs et choristes, d’orchestrations kompa avec une batterie qui claque… Et quand on a 450 tubes que le public peut reprendre en choeur, c’est tout de suite plus facile. Qu’on aime ou pas, difficile de nier le charisme et la progression d’Aya Nakamura. Queen.

magnifique aya

©️ F. MAYOLET

Mais l’immense claque/confirmation du week-end, c’est Zaho de Sagazan. Si vous lisez régulièrement Tsugi, vous savez qu’on suit son travail, que son album La Symphonie des Éclairs nous a plu. On vous avait même raconté son concert au Trianon. Mais le journaliste qui écrit ces lignes n’avait pas encore vu Zaho sur scène… Comment vous expliquer le choc ? Ce concert fut une vague d’émotions, où Zaho a fait preuve d’une justesse d’interprétation assez déroutante. Parce que la jeune chanteuse et son groupe semblent avoir pensé chaque seconde de ce show.

D’abord cela vous enveloppe et vous captive, puis on vous balade entre émotion franche et danses cathartiques. Quelle voix, et que de grandes chansons. « Sans tristesse, dit-elle entre deux titres, je n’aurais pas d’album (…) Ma sensibilité c’était sur mon piano, ça créait de jolies mélodies, et c’était tout de suite mieux que de pleurer sur mon oreiller » Ce concert nous mènera jusqu’à une transe collective, une invitation au lâcher-prise. Zaho a réussi à nous faire danser ET pleurer en moins d’une heure. Plusieurs exploits d’un coup.

Le week-end se terminera sur une liesse générale devant Louise Attaque et son chanteur emblématique Gaetan Roussel, impressionnant chef d’orchestre. C’est le genre de concerts qui réunit les petits (on a vu beaucoup d’enfants, même de très jeunes dans des poussettes) et les grands, les familles… Même ceux qui n’écoutent pas de musique. Et en ça, c’est un pari hautement gagnant pour la Magnifique Society.

On n’oublie pas le doux concert de Sofiane Pamart, mais aussi Japanese Breakfast ou encore Kekra ! On préfèrera ne pas se concentrer sur la mollesse générale du public pendant le week-end, pour se focaliser sur l’esprit de communion et de partage qui transpire du festival. Ce que beaucoup d’artistes n’ont pas manqué de souligner lors de leur passage sur scène. Merci Reims, merci la Magnifique, pour l’accueil, l’ambiance, les découvertes. Et à l’année prochaine !

 



 

Pire moment : le cagnard invivable (on est passé tout près des insolations) et la demi-déception sur le live d’Angèle

Meilleur moment : le Royal Garden et Zaho de Sagazan, à égalité ! Le corps s’est délié, des larmes ont coulé

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