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© Luis Escudero Gimenez
6 juillet 2022

đŸŽ€ Rock brut, festivals, musique et genre : l’interview d’Ottis Coeur, duo Ă©tincelant

par Corentin Fraisse

PrĂ©sent dans pas mal de festivals cet Ă©tĂ©, de Biches Ă  Rock en Seine en passant par le MIDI festival, le duo Ottis Coeur trace son chemin. À coups de guitares lourdes, de textes carrĂ©s en français et d’harmonies dĂ©vastatrices. « Deux filles qui chantent fort » -ce sont elles qui le disent- pour une Ă©nergie positive et dĂ©vorante. Il y a un potentiel fou dans ce projet, alors Tsugi a tenu Ă  leur proposer une interview, entre deux festivals et une tournĂ©e au PĂ©rou (oui). PrĂ©sentations.  

Bon comment ça s’est passĂ© vos lives aux 24h de l’insa, Ă  Biches Festival, Ă  Minuit avant la Nuit ?
Les 24h de l’INSA c’était un peu
 inattendu, inespĂ©rĂ©. Le public c’est souvent trĂšs â€˜Ă©tudiants dĂ©jĂ  bourrĂ©s’. On ne s’attendait pas Ă  avoir un tel accueil, c’était vraiment blindĂ© ! Personne ne nous connaissait, c’est la premiĂšre fois qu’on jouait Ă  Lyon/Villeurbanne et les gens Ă©taient chauuuuds ! AprĂšs on a fait Biches, ils Ă©taient pas mal du tout. C’était trop bien le cadre est cool, les gens aussi… LĂ  on a jouĂ© en fin d’aprem, un festival Ă  taille humaine c’est trĂšs chouette
 On s’est baladĂ©es un peu dans le festival et on a rencontrĂ© les gens, c’était hyper accessible. Minuit avant la nuit pareil, bon on est arrivĂ©es un peu tard pour profiter du fest, on a clĂŽturĂ©, aprĂšs nous c’était fini. On a Ă©tĂ© super bien accueillies, partout d’ailleurs!

Comment est nĂ© le projet Ottis cƓur ? Comment ça s’est montĂ© ?
Camille : En 2019 on s’est rencontrĂ©es avec Margaux, en formation de musique Ă  Paris. Margaux m’aimait pas trop au dĂ©but, et puis on a fait des blagues et c’était parti quoi!

 

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Margaux : Et puis mars 2020, premier confinement, j’appelle Camille pour savoir ce qu’elle fait et elle me dit
 (On refait la scùne pour toi haha)
Camille : … Qu’est-ce que tu fais pour le confinement ? Je lui dis que je vais chez mes parents, que je prends tout mon matos de musique. Et je lui dis de venir.
Margaux : « Je te réponds dans une heure, faut que je réfléchisse un peu » et en fait 5 minutes aprÚs je la rappelle en mode « On part à quelle heure demain ? »
Camille : Donc on a dĂ©barquĂ© chez mes parents, on pensait partir deux semaines et on s’est retrouvĂ©es
 pendant 3 mois. Et puis ce qui Ă©tait cool ; c’est qu’on avait une piĂšce oĂč on dormait ET oĂč faisait de la musique. En fait on a complĂštement enregistrĂ© l’EP lĂ -bas, avec les moyens du bord, et c’était trop bien. Une sorte de grande piĂšce dans une maison encore en travaux, donc pas d’eau, pas de chiottes mais y’avait l’électricitĂ©.

Vous avez commencĂ© Ă  composer directement, ou juste vous avez fait de la musique et Ă  force 
 ?
Camille : On est parties d’un morceau, on a chantĂ© sur un titre et quand on a harmonisĂ©, on a fait « woaaaa » et on a enregistrĂ© direct. On a continuĂ© sur la lancĂ©e, on a crĂ©Ă© des titres toutes les deux sans forcĂ©ment penser qu’on allait monter un groupe. Et au bout d’un moment on s’est dit « bon  »
Margaux : C’est ta mĂšre qui nous disait tout le temps de monter un groupe. En fait c’est arrivĂ© trĂšs vite : on est parties le 16, et quand on regarde la date des fichiers du premier enregistrement, c’Ă©tait le 17. On se disait « Bon ben on est lĂ  de toute façon, qu’est–ce qu’on fait ? »

De toute façon vous aviez des influences communes ? 
Oui mĂȘme si souvent, l’une Ă©coute beaucoup de groupes que l’autre ne connait pas, et au final on aime trop. On reste quand mĂȘme dans un style rock, qu’on a forcĂ©ment en commun. Pour Ottis CƓur on a beaucoup Ă©coutĂ© les Kills, Feist aussi dans la voiture pour aller en Loire-Atlantique, on Ă©coutĂ©e sa chanson « Pleasure » au moins 15 fois d’affilĂ©e sur le trajet… En fait Ă  chaque fois, tu te focalises sur un instrument ou un traitement de son particulier. Je crois que ça a lancĂ© un peu le truc.

Des influences communes ? Des role models ?
Margaux : Camille elle a Francis Cabrel
Camille : Ouais Margaux m’a offert un t-shirt Cabrel

C’est plus en mode vanne, ou y’a un vrai truc ?
Ah non non c’est premier degrĂ© ! Moi j’aime bien. [Elles se mettent Ă  chanter] « Mon Enfant nue sur les galets  ». [Camille reprend la main] En role models y’en a plein
 PJ Harvey surtout, Avril Lavigne aussi, d’ailleurs elle revient ! AprĂšs on est trĂšs fan d’Alison Mosshart, tous ses projets. TOUS ses trucs. Jack White aussi, Amyl and the Sniffers
 On aime leur musique et c’est des sources d’inspiration avec, souvent, des attitudes qui nous plaisent.

Votre EP est sorti fin d’annĂ©e derniĂšre. Pour vous de quoi ça parle, c’est quoi l’énergie commune de l’EP ?
On est vĂ©nĂšres. On ÉTAIT vĂ©nĂšres. C’était un exutoire de cette colĂšre et de cette envie de vengeance qu’on a eues. Quand on s’est rencontrĂ©es, quand on s’est confinĂ©es, on s’est pas mal racontĂ© nos histoires. Ce qui nous est arrivĂ© dans la musique et personnellement. On s’est rendues compte qu’on avait pas mal d’histoires en commun, qui se rĂ©pondaient. Quand on a composĂ© l’EP, y’avait toutes ces histoires-lĂ  qui tournaient encore autour de nous. On les a matĂ©rialisĂ©es pour s’en dĂ©barrasser. Maintenant quand on les chante, c’est un peu diffĂ©rent ! Ça prend une autre dimension.

Vous avez dit plusieurs fois que Ottis Coeur c’est « deux filles qui chantent fort ». Le rock en France c’est un milieu trustĂ© par des hommes, comment on fait pour s’imposer dans ce milieu en tant que projet 100% fĂ©minin ?
On le fait en Ă©tant sur scĂšne, en Ă©tant nous-mĂȘme. Juste faire des concerts, produire, se rendre visible ! Du coup ça permet dĂ©jĂ  de s’imposer dans ce milieu-lĂ , qui en effet est assez masculin. Je dirais que le confinement ca nous a aussi pas mal protĂ©gĂ© de tout ça. Y’avait pas de gens pour nous dire  « ah tu devrais tester ça », « tu devrais pas faire comme ça »  On a fait notre truc sans vraiment penser Ă  une suite, c’Ă©tait spontanĂ© ! Le projet s’est dĂ©veloppĂ©e avec juste une envie de crĂ©er et de faire de la musique. On n’a pas rencontrĂ© d’obstacle immĂ©diatement quoi. Je pense que ca nous a aidĂ©es. AprĂšs quand on fait des concerts, y’a toujours des remarques un peu sexistes quand mĂȘme j’avoue
 Je crois qu’à l’époque on avait fait 10 concerts, et on avait dĂ©jĂ  notĂ© dix rĂ©flexions qu’on nous avait faites
 C’est plutĂŽt des gens qui essaient de t’apprendre comment rĂ©gler ton ampli, de te dire quoi faire alors que tu sais trĂšs bien le faire. Tous ces trucs d’infantilisation de la femme. La femme c’est pas ‘juste’ la chanteuse.

 

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Des trucs qui nous ramĂšnent toujours Ă  notre genre quoi, alors qu’en fait on fait de la musique, on fait du rock. Mais bon c’est aussi important de le revendiquer : tu vois c’est un peu la contradiction du truc. C’est important de montrer un peu l’exemple, en tout cas dĂ©jĂ  d’ĂȘtre sur scĂšne. On va pas nier et dire qu’on veut ‘juste’ faire de la musique, on a des trucs Ă  dire d’autant plus aujourd’hui.

On m’a parlĂ© du fanzine que vous aviez amenĂ© aux iNOUĂŻS du Printemps de Bourges
Le fanzine c’est trĂšs Riot grrrl, l’idĂ©e c’est de pouvoir se prĂ©senter Ă  travers un support qui a du sens. Le fanzine c’est toute une identitĂ© DIY, un peu Ă  l’image de notre musique et de notre premier EP. Tout a Ă©tĂ© fait Ă  la maison, avec des contraintes techniques et matĂ©rielles. Le fanzine, pour moi c’est vraiment l’objet parallĂšle qui fait Ă©cho Ă  notre musique, c’est cohĂ©rent et ça a du sens pour nous.

Avec les Transmusicales, vous avez pu donner des lives devant des enfants, des Ă©lĂšves de primaire et collĂšge
 Comment ça s’est fait et comment ça s’est passĂ© ?
Y’a eu deux jours de concerts. Le premier c’était avec une classe de primaire avec des petits de 7 ans et le deuxiĂšme, des collĂ©giens genre 4Ăšme. Pendant le concert ils connaissaient les chansons par cƓur, ils chantent, ils crient c’était fou. [La preuve en images ci-dessous] Ils avaient Ă©coutĂ© nos chansons sur Internet, sur Youtube. Et aprĂšs le live, les Ă©changes avec eux Ă©taient
 trop mignons. Surtout une petite, qui au dĂ©but avait du mal Ă  parler parce qu’elle Ă©tait hyper timide, qui nous a dit Ă  la fin « vous nous donnez de la force, je comptais monter un groupe et aujourd’hui vous nous avez inspirĂ©s » et lĂ  on s’est mises Ă  pleurer sur scĂšne. Quand ça sort de la bouche d’un enfant tu sais que c’est hyper sincĂšre, et tu te prends ça en pleine tĂȘte.

Un dĂ©clic qui se crĂ©e. C’est la rĂ©elle motivation Ă  faire ce que tu fais, Ă  faire de la musique. Tu te dis que rien que le fait d’ĂȘtre sur scĂšne, de chanter des chansons, d’ĂȘtre nous, ça donne envie Ă  des gosses de faire la mĂȘme chose.
– Et des filles en plus tu vois donc
 C’était hyper fort. Deux jours d’émotions intenses !

J’imagine qu’en plus à cet ñge-là, pour la plupart c’est leur premier concert ?
Ouais ! Y’en a qui ont dit « c’est trop fort ! » niveau volume, d’autres Ă  qui on donne de la force pour monter des groupes, donc l’un dans l’autre on est bien haha.

C’est quoi cette histoire de tournĂ©e au PĂ©rou ?
C’est grĂące Ă  l’accompagnement du FAIR [dispositif de soutien et accompagnement d’artistes pour leur dĂ©but de carriĂšre]. Eux sont en lien avec l’Institut français qui, chaque annĂ©e, dĂ©voile leurs nouveaux laurĂ©ats et laurĂ©ates. Et je sais pas, notre nom a dĂ» circuler, le PĂ©rou nous a envoyĂ© un mail par l’Alliance française. Ils nous ont dit « on aimerait bien proposer une petite tournĂ©e Ottis CƓur, 3 dates
 «  donc on a rĂ©pondu non tout de suite haha. [Ceci est une blague]

GĂ©nial, vous jouez dans quels lieux ?
C’est l’Alliance française, aprĂšs y’a une place Ă  Arequipa
 C’est un truc oĂč tous les ans Ă  cette pĂ©riode, les Alliances françaises de tous les pays essaient d’exporter la FĂȘte de la musique. Donc lĂ  on est sur une place, y’a plusieurs concerts de groupes locaux, et nous !

ottis coeur instagram

© Ottis Coeur au PĂ©rou // Captures d’Ă©cran Instagram @ottiscoeur

Le FAIR, ça s’est passĂ© comment ?
Pour ceux qui connaissent pas c’est un systĂšme d’accompagnement, qui te suit pendant un an. Et en fait mĂȘme plus qu’un, parce que quand tu quittes le FAIR, tu peux toujours ĂȘtre en contact avec eux et leur demander plein d’infos ! Ils conseillent, ils sont toujours lĂ . Et aprĂšs ça nous offre Ă©normĂ©ment de choses possibles : par exemple on a fait des formations oĂč on s’est informĂ©es sur des aspects comptabilitĂ©, contrats, plein de choses comme ça. On a gagnĂ© en visibilitĂ© parce qu’ils ont un rĂ©seau de fou, et une aide financiĂšre aussi. Ils nous aident Ă  dĂ©velopper notre deuxiĂšme EP [ne serait-ce pas une exclu pour Tsugi?]. On a aussi fait une capta’ qui va nous servir pour avoir une belle vidĂ©o live
 Ils aident vraiment le projet.

Bon alors ce deuxiÚme EP en préparation, vous avez des dates, quelques infos ?
Le deuxiĂšme EP prĂ©vu pour en janvier-fĂ©vrier 2023! Avec des petits singles qui seront parsemĂ©s jusque-lĂ . Peut ĂȘtre bientĂŽt. On sait pas.

Vous avez repris du Eddy Mitchell j’ai vu, avec Dominique Blanc-Franquart, c’était dans quel cadre ? Pourquoi cette reprise ? 
En fait on travaille avec BĂ©nĂ©dicte Schmitt et Dominique Blanc-Franquart, qui masterisent les titres. Et ca lui faisait vachement plaisir de nous avoir sur la rĂ©Ă©dition de son album, et du coup on a dit oui tout simplement. On a fait la petite expĂ©rience avec eux, c’était trop cool !

Cet album-lĂ  il est mixĂ© en Dolby Atmos, c’est une sorte de technique rĂ©cente au niveau du son. Et quand tu l’écoutes avec le bon systĂšme son, qui est pas encore trĂšs rĂ©pandu, t’as l’impression d’ĂȘtre dans le studio avec les artistes ! Avec 11 ou 13 enceintes autour de toi, au niveau de la spatialisation c’est novateur.

Les prochaines échéances pour vous ?

Rock en Seine ça va ĂȘtre trop chouette on a vraiment hĂąte ! AprĂšs y’a pas mal d’Ă©vĂ©nements et de festivals, on a par exemple le MIDI festival en juillet, la Guinguette du Moloco… Venez venez, on a hĂąte de vous voir !

 

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Écoutez Ottis Coeur et retrouvez-les sur scùne, et courez les voir en live. Promis, ça vaut vraiment -vraiment- le coup.

 

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