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crédit : Dan Medhurst
25 août 2020

Inter[re]view : le nouvel album de Romare ne ressemble pas à celui d’un mec rangé

par Alix Odorico

Changement de terrain pour Romare. Après de longues années passées en tournée, l’Anglais a décidé de se poser en famille dans la campagne londonienne. Son dernier album Home ne ressemble pourtant pas à celui d’un mec rangé, mais plutôt à un producteur en pleine transition qui tente d’explorer de nouvelles pistes.

Romare

crédit : Dan Medhurst

Archie Fairhurst (Romare) a passé une bonne partie de sa jeune existence à voyager, tout d’abord avec ses parents et d’incessants déménagements, puis lors de ses tournées à travers le monde. Il a effectué plus de 150 concerts au cours des deux dernières années seulement. Il était donc temps pour lui de se poser : « Beaucoup de voyages ont influencé le son de cet album, mais Home correspond surtout au fait de s’installer et de fonder une famille ». Home, la maison, difficile de faire plus démonstratif. Spirituellement plus posé ? « Je peux me concentrer davantage à la campagne. Comme me réveiller avec une mélodie dans la tête le matin et ensuite la siffler au studio sans distraction ».

« les sonorités de l’album viennent d’un mélange entre tournées et retour à la maison dans la paix et la tranquillité. Ces deux mondes ont inspiré l’album. »

Mais ces “aventures” domestiques, ne doivent pas faire oublier que Romare est un aventurier. Il y a eu tout d’abord les rythmes et ambiances africaines sur son EP Meditations on Afrocentrism (2012), puis l’Amérique multiculturelle, son blues et son jazz sur Projections (album réalisé en 2015 en hommage à une exposition de l’artiste Romare Baerden, d’où il tire son nom). Un an plus tard avec Love Songs Part Two, il se met à la musique irlandaise, à l’enregistrement live, aux synthétiseurs monophoniques, à la flûte à bec de sa grand-mère ainsi qu’à la mandoline de son père. Arrive donc Home, quatre ans plus tard. Comme s’il lui avait fallu ce laps de temps pour réfléchir à un projet transitoire, entre vie d’avant et vie d’après : « les sonorités de l’album viennent d’un mélange entre tournées et retour à la maison dans la paix et la tranquillité. Ces deux mondes ont inspiré l’album ». Sons électroniques détonnants sur un dancefloor blindé de clubbers, mêlés au sifflet éternel d’un oiseau, entouré de bruissements de feuilles dans une forêt silencieuse : à priori, une étrange combinaison, mais surtout la démonstration que la musique de Romare est instinctive, mais pas encore assez pour son auteur : « j’aimerais devenir plus naturel dans mes productions et un peu moins prévisible. J’aime le côté trippant de la musique en ce moment, l’incertitude et la folie qu’elle possède parfois ». Une imprévisibilité confirmée à l’écoute des neuf tracks, où instruments chinés durant ses voyages, field recording et machines poussiéreuses s’entremêlent (peut-être trop) pour livrer un album d’explorateur aguerri.

 « j’ai enregistré le tabla sur « Gone », tout comme l’accordéon de ma mère et la guitare 12 cordes de mon père sur « Home » ».

Romare

Crédit : Dan Medhurst

Cet attirail de machines remplit le studio de Romare. Le Synthétiseur Casio CZ-1000 et ses notes envoûtantes font qu’on imaginerait presque « Dreams » composé au studio parisien Motorbass. Puis il y a le modulaire MFB 522 sur « Sunshine », un synthé analogique Roland TB-03 pour les lignes de basse de « High », une boîte à rythme DrumBrute pour le kick de « The River », et une pédale de chorus sur « le vieux casio de mon frère » dans « Heaven ». Ce sont les nouveaux instruments sortis de son placard magique pour la composition de Home. « J’ai aussi enregistré mon kit de batterie entièrement configuré sur « Deliverance » et échantillonné une cassette dans un magasin d’occasion sur « You See » ». Romare agrémente également ses productions analogiques et modulaires d’instruments à vents, à cordes et de percussions : « j’ai enregistré le tabla sur « Gone », tout comme l’accordéon de ma mère et la guitare 12 cordes de mon père sur « Home »». Un morceau qui a pris forme après avoir été joué dans une version live à Printworks à Londres fin 2018 : « À l’origine, la chanson a commencé comme un sifflet ou un bourdonnement, puis différentes lignes d’harmonie et lignes de basse ont été ajoutées ». Ce dernier titre éponyme clôture l’album sur une ballade campagnarde, après huit tracks retraçant son éducation musicale construite lors de ses voyages et représentée par cette multitude d’instruments. Home est construit selon une narration précise, appuyée par la longueur de certains titres tels « Heaven » (10.04) ou « The River » (7.52) : « Il y a aussi un sens du voyage que vous pouvez explorer avec des compositions plus longues », ajoute-t-il.

Si l’on imagine que cela fait beaucoup d’instruments sur un album, Romare semble vouloir aller plus loin pour ses prochaines sorties : « j’ai dû enlever beaucoup de matériel lorsque j’ai terminé cet album, ce qui m’a fait réaliser que je ne voulais plus laisser autant de temps entre les sorties. J’aimerais aussi avoir quelques instruments supplémentaires et commencer à utiliser davantage de field recording pour mes futurs titres ». La campagne est en tout cas un endroit idéal.

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