Crédit : Santiago Felipe

Utopia”, le neuvième album studio de Björk, est en écoute !

Comme sou­vent avec Björk, c’est par l’im­age qu’on a été invité à se plonger dans son nou­v­el album. Avant même d’é­couter une seule note de cet Utopia, nous étions mis en face d’une série de pho­tos pro­mo : la pochette du disque d’abord, symétrique, aqua­tique, mon­strueuse, où Björk s’af­fiche avec une forme à l’air solide mais pour autant visqueux plaquée sur le vis­age. D’autres por­traits ont suiv­is, avec des orchidées rap­pelant la forme d’une vul­ve, ou armée d’un gode cein­ture grenat sur fond de moumoute bleue. L’in­stru­ment fétiche de cet album une nou­velle fois co-produit par Arca ? Des flûtes. Côté évo­ca­tions sex­uelles, qu’elles soient féminines ou mas­cu­lines, on ne pour­rait pas faire plus fourni.

Car Utopia, comme beau­coup de travaux récents de la chanteuse islandaise, par­le de sexe. Mais pas celui, dés­espéré, de Vul­ni­cu­ra, où une fente béante se plaçait sur sa poitrine, blessure repous­sante pour un album de rup­ture. Non, Utopia est une renais­sance. Une décou­verte des appli­ca­tions de ren­con­tre, une quête sex-positive et fémin­iste, où le corps se réap­pro­prie ses envies et son instinct, comme sur “Body Mem­o­ry” par exem­ple. Le titre (peut-être le meilleur de ce long album) évoque le moment où, quand l’e­sprit oublie tout, le corps se sou­vient — com­ment être mère, com­ment être femme, com­ment être amante. Le dis­cours hédon­iste y est soutenu par des cordes, des bruits d’an­i­maux, et une sorte d’ary­th­mie car­diaque dans la con­struc­tion, comme un pal­pi­tant qui saute un bat­te­ment. De bout en bout Utopia sera organique : on y entend des bruits de marais sur “The Gate”, une harpe et des tam­bours sur “Bliss­ing Me” (sur lequel on est invité à “tomber amoureux d’une chan­son”, puis de directe­ment “tomber amoureux” de Björk, et ce dès la deux­ième piste), des bruits d’oiseaux sur le roman­tique et plein de flûtes morceau-titre. Pas de beat, ou presque, jusqu’à la huitième piste.

On a beau gen­ti­ment arriv­er en hiv­er, c’est le print­emps que racon­te Björk sur cet album : celui des oiseaux qui chantent, des corps qui se réveil­lent, de l’amour et de la pas­sion qui revi­en­nent. Mais atten­tion, pas l’amourette gen­tille made in Dis­ney. Comme elle le chante si bien sur “Body Mem­o­ry”, on ne peut pas “apprivois­er” Björk Guð­munds­dót­tir. Alors oui, tout le monde est nos­tal­gique de ses chefs d’oeu­vre DebutHomogenic ou Ves­per­tine. Mais aujour­d’hui plus que jamais, c’est Björk qui décide, et avec Utopia, elle a choisi de se faire plaisir. Et nous avec.

Si vous êtes plutôt Spotify :

Björk sera au fes­ti­val We Love Green au bois de Vin­cennes le 3 juin 2018.

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